Mortal Venom

36-Last lesson for my son

  Perdu.

Qu'est-ce que j'étais censé faire ? J'avais perdu la dernière chose qui valait la peine de se battre.
  Plus rien n'avait d'importance, à présent.

  Je suis retourné à l'hôpital, parce que je n'étais la bienvenue nulle part ailleurs puis j'ai commencé à traîner au hasard, dérangeant absolument tout le monde.

  Mais je n'arrivais pas à culpabiliser pour ça, ces gens qui sauvaient des vies humaines. Peu m'importait ce qui se passait : j'étais devenu un paria aux yeux de Henry.

  Sans doute ne me pardonnera-t-il jamais. J'avais dépassé les bornes cette fois.

  En fait, je les avais dépassées depuis longtemps, mais cette fois, Henry a été assez intelligent pour s'écarter du danger que je représente.
  Du danger.

  Je me sens hyper mal. Où aller ? Une idée se profile cependant dans mon esprit et mes pieds me ramènent aux soins intensifs. Puisque je suis un paria maintenant, autant aller voir celui qui a aussi quelque chose à se reprocher. On fera la paire gagnante, Martin et moi.

  On a tous les deux fait fuir l'être qui tenait le plus à nous.

  Quelle ironie ! Mais maintenant que ma colère est retombée, et que ma tristesse a pris le dessus (ce qui arrive rarement), je comprends ce que Henry voulait dire. Et que je n'aurais pas dû réagir au quart de tour pour ça.

  Martin a l'air de réellement s'en vouloir. Et Scarlett, qui est quasiment impossible à duper, croit en ses regrets. Et elle lui a pardonné. Pensent-ils tous que Martin est quelqu'un de bien ? Moi, je continue à avoir des doutes, mais comme me l'a rappelé Henry, je suis très mal placé pour parler.

  En outre, Martin est l'homme qui m'a élevé, faisant de moi ce que je suis. Et même si ce n'est clairement pas une réussite, je sais que j'aurais pu terminer bien pire si je n'avais pas croisé sa route.

Je repense à mes troubles du comportement et à tous les psychologues à qui j'ai dû parler. Je repense à quand on a suggéré à Martin de me mettre sous Ritaline et qu'il a refusé.

Je repense au moment où il a compris que toutes ces thérapies me rendaient malheureux et qu'il les a arrêtés. Je repense à toutes ces fois où il m'a fait passer avant sa carrière et tout le reste. Quand il m'amenait en randonnée, juché sur ses épaules, quand il m'a inscrit au judo, pour que je puisse me défouler sur des gens de manière non gratuite, quand il a intercédé en ma faveur pour m'inscrire à Saltwood, pour que je ne finisse pas ma vie terré dans un trou miteux avec mon coloc moisi.

Tous ces efforts, gâchés en une seule parole. Il a trompé Scarlett.

Mais bon sang, putain, qui suis-je pour le juger ? J'ai tellement de choses à me reprocher que je n'arrive même pas à les énumérer. Je suis un égoïste de première, un lâche.

  Il a carrément raison.

  Mais pour cette fois, je mets ma haine et ma rancœur de côté, pour m'obliger à écouter, plutôt qu'à tirer des conclusions hâtives.
  Je rentre dans la chambre, avec réticence, indécis quant à la raison de ma présence ici.

  Martin a l'air tellement mal en point, allongé sur ce lit d'hôpital, que j'en oublie un instant mon problème actuel.

  Je m'assois sur la chaise qui se trouve juste à côté, en reprenant mes esprits.

  La colère, si familière, ne revient toujours pas.

  Je n'ai aucun droit d'en vouloir à Martin. Pas tant que je serais l'idiot qui fait du mal aux personnes autour de lui.