Mortal Venom

12-Kid's behaviour

Mon rêve m'a mis en rogne de bon matin. Je sors de chez Grayer de mauvaise humeur, sûrement pas d'attaque pour cette journée, même si le ciel m'annonce qu'elle sera splendide.

Que voulez-vous, je suis ingrat.

J'arrive chez les Goldshard vers onze heures, pas forcément en avance.

Je tape à la porte, et une Colleen tout excitée vient m'ouvrir, affublée d'une casquette rose un poil trop grand pour elle.

-Aidan ! T'es venu ! Brenna, il est venu ! s'exclame--t-elle en direction des escaliers.

Je suis surpris moi-même de ne pas m'être défilé à la dernière minute. C'est plutôt mon genre.

-Ouais, c'est génial. Mais dis-moi un peu, qu'est ce que tu transportes dans ce sac à dos ?

Elle le retire et me le tend. Je fais glisser la fermeture éclair et y trouve, frappé de stupeur, des liasses de billet. De vingt. De cinquante. De cent.
-Heu...D'où ça vient tout ça ? blêmis-je.
-Ce sont des faux, précise Colleen en tirant la langue.

Bon sang, j'ai dû avoir l'air tellement con. Bien sûr que ce sont des faux. En les examinant mieux, je reconnais les billets du jeu de société qui traînait dans le placard avant. Je dois vraiment être fauché de nature pour en arriver à confondre la vraie monnaie avec ce truc.

-La tête que tu as fait ! se moque Colleen en me pointant du doigt.
-OK, moque-toi de moi, mais si on t'abandonne dans le train fantôme, faudra pas venir pleurer.
-Tu es méchant, dit-elle en me donnant un coup de poing dans le ventre.

Heureusement qu'elle a une force de marmotte sinon j'aurais vomi des restes du dîner d'hier.

-Pas faux.
-C'est bon, je suis prête, annonce Brenna en apparaissant dans la cage d'escaliers.
Elle porte une mini-jupe en jean avec un décolleté. En plein mois d'octobre.
-Ha ! ricané-je méchamment. Remonte tout de suite te changer.

Elle s'arrête en plein mouvement.

-Mais pourquoi ?
-Tu oses demander en plus ? Ça ne te parait pas assez évident peut-être ? me moqué-je en m'appuyant sur la porte d'entrée toujours ouverte.

-Mais tu vis à quelle époque ? s'offusque-t-elle. La femme du XXIe s n'est plus obligée de suivre les standards vestimentaires des machos !

Je hausse les épaules.

-Peut-être, mais tu n'es pas une femme, tu as seize ans, et j'ai sauvé ta vie la semaine dernière. Donc c'est moi qui ai le dernier mot.

-Va te faire voir, râle-t-elle en remontant.

Je souris puis me tourne vers la deuxième Goldshard. Loin de moi l'idée de poursuivre une tradition protectrice complètement dépassée, mais tant qu'il y' aura des prédateurs dehors, je ne vois pas d'autres solutions pour les préserver. À part bien sûr me transformer en messager de la mort.

-Tu vois Colleen, Brenna n'est pas un bon exemple à suivre, il ne faut pas t'habiller comme elle, rajouté-je.
-Je t'entends ! s'écrie Brenna depuis sa chambre.
-Mais je fais quoi alors ? demande Colleen en refermant son sac. Je m'habille comme toi ?

Je baisse les yeux sur mon tee-shirt Black Pyramid. S'il y'a un exemple à ne pas suivre, c'est bien évidemment Chris Brown. Et je n'ai pas non plus envie qu'elle se mette aux jeans militaires.

-Contente-toi de mettre des gros pulls jusqu'à tes trente-huit ans.
-Trente-huit ? C'est beaucoup !
-Mais non, tu verras, ça passe vite.
-Moi aussi, je trouve que c'est beaucoup, ajoute une troisième voix.
Je me retourne si vite que c'est un miracle que ma nuque n'ait pas craqué et détaché de ma colonne vertébrale.

-Henry ! s'émerveille Colleen en accourant vers lui.
Ce dernier la prend dans ses bras avant de lui tourner sa casquette à l'envers.
-Alors, on fête quoi aujourd'hui ? lui demande-t-il en souriant.
-On fête...réfléchit-elle. On fête...que Aidan vienne !

Je me raidis, pas certain de savoir comment réagir.

-C'est vrai que ça se fête, confirme Henry en hochant la tête. T'es prête ?
-Oui, mais Brenna met des jours à se préparer, boude-t-elle.
-Tu n'as qu'à lui dire que si elle ne se dépêche pas, c'est elle qui paye l'entrée, OK ?

Et comme par magie, Brenna surgit, dans un trench à manches courtes et cette fois-ci et, on peut enfin sortir de cette situation gênante.

Une fois dans la voiture, nous trouvons une nouvelle raison de nous chamailler. Je ne veux pas que Brenna conduise, et elle ne veut pas qu'on utilise sa caisse à sa place.

-Pourquoi Aidan ne conduit pas ? s'enquiert innocemment Colleen.

-Parce que c'est un con qui n'a toujours pas le permis de conduire à vingt ans, s'agace Brenna.

Henry me regarde en levant un sourcil. Oui, il n'est pas au courant de mes exploits. J'ai échoué trois fois à l'examen.

Pour ma défense, c'est la faute des priorités. Je n'aime pas avoir à laisser passer des gens.

Brenna cherche vraiment la bagarre. Je lui envoie une tape sur le crâne, conscient d'être en position de faiblesse.

-Bon, bah j'imagine que c'est moi qui vais conduire, tranche Henry.

Il nous faut une bonne minute pour nous redispatcher les places, et je me retrouve, bien sûr, à l'avant, avec Henry.

Comme par hasard.
En plus, il faut qu'on aille chercher les copines de Colleen chez elle.

-Putain, ils font chier à nous prendre pour leur taxi, grogné-je à même pas cinq minutes de trajet.
-Je te signale que toi aussi tu profites de ce taxi alors boucle-là, fait remarquer Brenna.
-Oh...Il a dit putain, Brenna. Et chier. Tu m'as dit que c'était pas bien, se rappelle Colleen.

Henry ne doit vraiment rien comprendre à cette famille. Je le plains.

Trois maisons plus tard, les copines de Brenna sont toutes à bord, et se mettent à parler toutes les quatre en même temps. Fort.

Je ne sais pas à quoi je m'attendais en l'embarquant dans cette histoire, mais elle est en train de tourner au désastre complet.