Leo ?

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Wonshik avait mal à la tête. Et il pensait connaitre la coupable. Il la tenait fermement dans ses grandes mains. Il lâchait la bouteille de whiskey désormais vide sur le tapis de son appartement, se redressant tout en grommelant à cause du marteau lui vrillant le cerveau, frottant ses yeux de ses poings alors qu'il se trainait comme un vieux clochard à la salle de bain. Il entrait habillé dans la douche, laissant l'eau un peu trop froide imbibé le tissu de ses vêtements et faire tomber ses mèches bien trop longues sur ses yeux. Il passait une main dans les cheveux aux mèches sèches malgré l'eau les gorgeant pour les retirer de ses yeux, sa main glissant le long de sa mâchoire, grattant contre sa barbe naissante et piquante.

Après s'être douché sommairement il allait au lavabo, essuyant d'un revers de main la buée s'y trouvant, lui renvoyant le reflet pitoyable de sa personne. Il avait maigri, ses os ressortant, son visage paraissait gris et malade, ses yeux vides et sombres enfoncés dans leurs orbites, ses mèches tristes encadrant son visage. Il se regardait, son reflet lui faisait honte, il ne se reconnaissait pas.

Dans le reflet du miroir il voyait Daeguni, assis sur le bord de la fenêtre le regarder, son regard le perçait, le jugeait, l'insultait. Wonshik ricanait, il se faisait juger par un stupide animal. Pas n'importe quel animal. Le chat de son amant, le chat de Taekwoon, la représentation féline de son amour. Il jetait un dernier coup d'œil au chat qui miaulait silencieusement, lui donnant le coup de fouet qu'il avait besoin pour reprendre un peu sa vie en main. Il attrapait la mousse à raser sur le coin du lavabo et entreprenait de se raser.

Quand il avait fini de redevenir la personne qu'il était censé être : un médecin d'une vingtaine d'année sexy, aux cheveux noirs, le regard sensuel, la peau imberbe et des vêtements taillés à la perfection pour mettre en valeur sa silhouette parfaite et athlétique. Il avait opté aujourd'hui pour un jean noir avec une chemise de la même couleur aux manches courtes et à peine attaché, dévoilant le haut de son torse et son tatouage sur la clavicule. Il avait mis des Doc Marten's basse noire, brillant presque autant que ses cheveux gominés ramenés en arrière, dévoilant son grand front. Il attrapait ses affaires et prenait la direction de l'appartement sous couverture où se trouvait Gook Du.

Comme tous les jours il remontait les rues jusqu'à ce quartier malfamé, les mains dans les poches de son pantalon, ses lunettes sur le bout de son nez. Aujourd'hui il regardait autour de lui, il découvrait que les rues n'étaient pas aussi abandonné, pas aussi grises qu'elles lui avaient paru jusqu'à aujourd'hui, la vie avait sa place dans ces petites rues, des enfants jouaient avec un ballon entre les voitures, se servant de poubelles pour faire les cages, des petites filles jouaient à la marelle qu'elles avaient tracés dans un cul de sac avec de la craie, des parents étaient assis sur le perron d'un vieil immeuble, surveillant des bambins jouant avec des voitures à la peinture écaillée, des personnes âgées assises sur un banc discutait du vieux temps. Un sourire germait sur ses lèvres, illuminant un peu sa journée, lui redonnant espoir en l'avenir, à son avenir avec Leo, ils allaient se revoir, ils allaient vivre leur vie ensemble, après tout ça.

Alors qu'il tournait dans une rue perpendiculaire à celle qu'il venait de remonter, à deux pâtés de maison de l'appartement où se trouvait Gook Du, alors qu'il passait près d'une ruelle sombre, il apercevait des ombres du coin de l'œil, lui faisant tourner la tête pour voir deux personnes, un adulte avec un jeune homme d'une petite vingtaine d'année. Il ne voyait pas bien leurs visages mais il reconnaissait la voix du jeune homme quand ce dernier parlait. Cette voix, il cherchait à l'entendre depuis plus de deux semaines. Il se figeait sur place, se tournant lentement comme un robot face aux deux silhouettes, avançant doucement, pas à pas dans cette ruelle sombre, le bruit de la vie s'étouffant au fur et à mesure alors que le peu de lumière qui perçait entre les grands murs des immeubles lui permettaient de découvrir les traits de son amant, il avait changé. Tellement changé.

Il avait les cheveux rasés courts, ne cachant aucunement les cicatrices sur son crane ou le bleu qui habillait la joue que l'autre homme caressait de ses grandes mains. Leo portait un t-shirt noir transparent, dévoilant son corps et d'autres blessures en cours de guérison sur lequel il avait mis un blouson en cuir, contrastant parfaitement avec son pantalon blanc déchiré. Leo était appuyé contre le mur, passant de temps en temps sa main dans ses cheveux rasés en se mordant la lèvre. En gros, il était entrain de séduire un vieux pervers dégueulasse, sûrement trader vu son costar gris anthracite et sa nervosité. Ou peut-être était-ce seulement parce qu'il se rendait compte qu'il voulait coucher avec un gosse, Wonshik ne savait plus trop, seul la rage prenait place dans son esprit.

Il continuait d'avancer, lentement mais sûrement vers les deux personnes et quand il était à moins de quelques mètres de son amant il prononçait son nom. "Taekwoon..." Ce dernier tournait le regard rapidement vers lui avant de se concentrer de nouveau sur l'homme face à lui, faisant comme s'il ne le connaissait pas. Mais Wonshik le connaissait. Et il savait qu'il l'avait reconnu, que sa présence dans cette ruelle l'avait déstabilisé, même si ce n'était que d'infimes secondes, troublant la profondeur de ses yeux. Wonshik avançait encore, redisant le nom du jeune homme pour attirer son attention mais ce dernier se redressait juste du mur et venait se coller à l'homme face à lui, murmurant à son oreille, hors de portée de Wonshik qui regardait la scène sans pouvoir intervenir. "Leo...". Ce dernier ne jetait même pas un regard en arrière alors qu'il tirait à sa suite l'homme, disparaissant de la vue de Wonshik qui entreprenait de le suivre avant de sentir son corps être projeté contre le mur de la ruelle et un bras lui bloquer la respiration. "Qu'est-ce que tu fais ici ?!"



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Pour ceux qui ne le savent pas, j'ai officiellement fini d'écrire Proxénétisme. Je passe ainsi à deux publications par semaine : le mardi et le vendredi.

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