Attente

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Wonshik était un fantôme. Depuis près de 3 semaines il n'était que l'ombre de lui-même. Il avait juste le courage de se lever, de se doucher, boire sa tasse de café, aller au travail, manger, travailler, rentrer, manger, se doucher de nouveau et dormir.

Pourquoi ?

Cela faisait 3 semaines que Leo était parti de son propre chef, 3 semaines qu'il avait infiltré le Centre, enfin infiltré, retourné plutôt. Du coup, cela faisait également 3 semaines qu'il était seul dans son appartement, bien trop grand pour sa seule présence. Et celle de Daeguni qui lui en voulait, encore une fois, d'avoir laisser échapper son maître.

Aujourd'hui, comme les 20 derniers jours il prenait le chemin du vieux quartier de la ville, il s'arrêtait devant la porte branlante, l'ouvrant avec la clé rouillé qu'il sortait de la poche de son manteau noir. Il entrait dans le hall poussiéreux, posant ses vieilles baskets sur le tapis rouge sale et de s'engager dans l'escalier jusqu'au dernier étage de l'immeuble. A cet étage il n'y avait qu'une porte, une vieille porte verte à la peinture écaillée d'où filtrait une fine lumière.

Il tapait trois coups rapides dessus et rapidement la porte s'ouvrait sur Gook Du, mal rasé, des cernes sous les yeux, une box de ramyeon dans les mains. Quand Gook Du posait les yeux sur son ami, son regard changeait, passant de la fatigue à l'ennui, Wonshik lui souriait timidement en levant le sac en plastique qu'il avait dans les mains. Gook Du soupirait et s'écartait pour le laisser entrer. "Salut..." "Qu'es-ce que tu fais encore là ?!" "La même chose que les 20 derniers jours..." "C'est bien le problème Shik' !" "Je... Je sais, je sais que je peux te faire confiance, que tu vas le protéger mais c'est plus fort que moi... Il me manque... Et j'ai peur pour lui..."

Gook Du s'était assis de nouveau dans le fauteuil, face à l'ordinateur qui retransmettait en continu la vidéo surveillance du bâtiment du centre. Leo avait réussi à poser des caméras il y a une semaine dans toute la propriété située à une centaine de mètre de l'appartement loué et occupé par la police. Wonshik se laissait tomber dans le fauteuil en face et sortait le café froid du sac plastique pour le donner à son ami qui repoussait son bol de nouilles. "Tiens ça sera toujours mieux que tes nouilles froides, comment tu peux manger ça à 8 heures du mat' ?" "Parce que je n'ai pas dormi de la nuit et que pour mon estomac il est 20 heures. Merci." "Alors ?" "Pas plus qu'hier et toujours moins que demain. Arrête de passer ton temps à venir ici, tu ne peux rien faire pour nous aider ou l'aider, alors arrête de te morfondre, ressors tes fringues sexy, pas tes vieilles fripes dégueulasses, refais ta couleur, rase-toi, retourne au boulot, sors avec les potes, vis tout simplement ! Tu ne peux pas rester ainsi, et Leo ne le veut pas non plus, tu ne l'aides pas à être ainsi !" "Il te l'a dit ?! Tu as eu de ses nouvelles ?!" Wonshik ! Évidemment que j'ai des nouvelles ! Mais pour l'enquête !" "Pourquoi tu ne me l'as pas dit que tu le voyais, pourquoi tu ne me dis pas s'il va bien ou non ?! S'il est blessé, s'ils l'ont touché encore une fois ?!! J'ai besoin de savoir ! C'est mon petit-ami, il est toute ma vie désormais..." Sa voix s'était brisée sur la fin, les larmes voulant couler. "Écoute Shik' je comprends parfaitement ton inquiétude, et moi aussi je ne veux pas qu'il lui arrive quelque chose mais c'était son choix, et je comprends parfaitement ses raisons. Comme je comprends ses raisons de ne pas vouloir te donner de nouvelles." "Alors comment je suis sensé faire ? Hein ! Dis-moi !! Comment je dois faire pour vivre normalement alors que je sais que mon petit-ami, la personne la plus précieuse à mes yeux est là dehors, avec ces salops qui l'ont torturé, frappé et violé toute sa misérable vie ?!! COMMENT ??!!!! Dis-moi !" Wonshik s'était relevé et avait saisi Gook Du au collet, crachant au visage de son ami sous la colère. "Et vous vous êtes là à envoyer un gosse que vous devriez protéger dans les griffes des lions, prêt à se faire violer et violenter de nouveau juste pour votre putain d'enquête à la con, alors que vous savez très bien ce qu'ils font depuis des années, vous êtes juste trop peureux pour agir, trop flemmard ! Vous devriez avoir honte de laisser des enfants, des personnes qui n'ont rien demandé entre les mains de ces monstres, ils ne le méritent pas !!"

Gook Du restait calme, attendant patiemment que la tempête Kim Wonshik passe. Il savait que ces mots il ne les pensait pas, enfin pas tout à fait, Gook Du était tout à fait d'accord avec lui mais il ne pouvait rien faire, enfin rien de plus qu'il n'avait déjà tenté, après tout il n'était qu'un petit inspecteur à qui on avait déjà accepté bien trop de choses et de libertés sur cette enquête. Il aimerait faire plus, il aurait aimé trouver une autre solution que de faire appel à Leo qui avait réussi à se reconstruire dans les bras de son ami, ou à Hui et E'Dawn qui méritaient de se faire oublier jusqu'à la fin de leurs vies et qu'on les laisse être ensemble pour toujours. Qu'est-ce qu'il aimerait... Mais il ne pouvait pas. Et il devait vivre avec cela, continuer de faire son travail et trouver une solution pour rendre la tâche plus vivable pour Leo qui se sacrifiait, encore et encore.

Wonshik finissait par se calmer, se laissant tomber dans le canapé en prenant sa tête dans ses mains, ses épaules tremblants alors que le silence de l'appartement crasseux étaient brisé par les sanglots de Wonshik. "Je ne peux pas le perdre... Pas encore..." "Je le sais Shik', mais toi comme moi on sait qu'on ne peut pas l'arrêter, il n'est plus le jeune homme fragile que tu as rencontré." "Il n'a jamais été fragile, pas comme on l'entend du moins. Certes physiquement il l'était mais mentalement il était déjà borné et sûr de lui, j'ai mis un peu de temps avant de pouvoir lui parler sans qu'il ne m'envoie paître." Il rigolait légèrement, repensant à leurs rencontres, leurs premiers échanges et comme tout était aller vite entre eux après, ils se connaissaient déjà depuis plus de trois ans. Mais une larme coulait de nouveau sur ses joues alors qu'il pensait également à toutes les fois où il l'avait perdu pour des bêtises, le plus souvent de sa faute. "Arrête de pleurer tu veux ?! Tu vas finir par me donner le bourdon alors que je me fais déjà chier comme tout ici. Rentre chez toi, j'ai à faire !" "Mais..." "Il n'y a pas de mais."

Gook Du le poussait dehors et Wonshik finissait par céder, grommelant après son ami alors qu'il reprenait le chemin poussiéreux et de se retrouver dans la rue, à prendre le chemin vers son appartement de l'autre côté de la ville. Il trainait des pieds, jouant avec son téléphone dans sa poche, et cela jusqu'à son appartement où il se laissait tomber dans le canapé, repoussant sur le côté des bouteilles de bière, vides. Il regardait le plafond, vide de tout jusqu'à ce que la colère le reprenne et qu'il se décide à prendre la bouteille de whisky sur la table pour boire directement au goulot, avalant d'une traite la moitié de la bouteille pour s'endormir l'esprit et essayer, encore une fois, d'oublier son petit-ami. Et il espérait que cela marcherait cette fois, pas comme ces vingt dernières tentatives infructueuses, les larmes dévalant ses joues, encore et encore.

ProxénétismeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant