Ourobouros

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Wonshik avait la tête lourde, ses paupières étaient comme collées, son cœur lui faisait mal. Il sentait les ressorts défoncés du canapé de Gook Du, enfin de celui de la planque dans laquelle il vivait pour prendre soin de Leo. Leo. Tout lui revenait en tête et il semblait sa poitrine lui faire mal alors qu'un sanglot lui échappait. "Shik ?" C'était Gook, sur sa gauche. Wonshik faisait un effort et ouvrait les yeux, tombant sur le visage inquiet de son ami qui était assis contre le mur, le surveillant. "Combien de temps ?" Sa voix était un peu enroué. "Une vingtaine de minute." Wonshik passait ses mains sur ses yeux et se redressaient, attrapant le verre d'eau sur la table basse pour le boire d'une traite. "Tu as des nouvelles ?" "Toujours pas... Je suis désolé..." "Comment ça a pu arriver ?" "Si je le savais, je te jure que je ne l'ai pas lâché une seconde, le dernier contact que j'ai eu avec lui c'était dans la nuit hier soir, il me disait qu'il était en route pour ton appartement et après plus rien. J'ai arrêté le pisteur à ce moment-là pour vous laisser de l'intimité, que vous vous retrouviez un peu, vous en aviez besoin tous les deux." "Quand il venait chez moi..." Tous les liens se créaient dans le cerveau de Wonshik, il avait disparu après avoir quitté son appartement, il avait disparu parce qu'il avait trouvé son petit-ami entrain de baiser avec une pute, dans leur lit. "C'est de ma faute..." Concluait-il à voix haute. "Quoi ? Non, tu n'y es pour rien Shik, c'est--" Mais Wonshik le coupait, relevant les yeux vers son ami. "Il est venu chez moi hier soir." "Quoi ? Mais pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt ?!" "Parce que je ne le sais que depuis ce matin..." Quoi ?" "Quand il est venu à mon appart... Notre appart, il.... Il m'a vu entrain de... Avec..." "Shik explique toi mieux j'ai pas le décodeur." "J'ai merdé Gook. J'ai merdé sur toute la ligne... Hier quand Taekwoon est venu j'étais entrain de baiser..." "Baiser ? Mais qui ?!" "Jenny...." "Excuse-moi !" Gook s'était relevé, forçant WOnshik à lever les yeux pour regarder son ami. "Mais qu'est-ce qui t'es passé par la tête ?! Mais merde Shik ! Tu as baisé avec une pute de ton passé alors que ton copain est entrain de risquer sa vie ?! Mec tu as merdé !" "Je sais que j'ai merdé ! Je le sais ! Mais j'étais bourré et je l'ai croisé et.... Je sais pas comment on en est arrivé là, je ne me souviens même plus ce qu'il s'est passé ! Tout ce que je sais c'est qu'il est venu, qu'il m'a vu prendre cette chienne dans notre lit, que ce matin j'ai trouvé son blouson dans mon appartement, celui avec lequel je l'ai vu hier et que maintenant il a disparu ! Alors oui je sais j'ai merdé j'ai pas besoin que tu me le rappelles !" Ils restaient par la suite silencieux, se regardant juste jusqu'à ce que Gook soupire fortement et prenne la parole. "Écoute, je sais que tu as du mal avec ça, mais on ne peut qu'attendre, je te promet qu'on va tout faire pour le retrouver et savoir ce qu'il s'est passé, je te promet de faire en sorte qu'il te pardonne même si je ne suis pas certain que tu le mérites mais pour cela tu dois me promettre plusieurs choses." "Je--" "Non Shik, c'est moi que tu écoutes maintenant. Pour commencer tu vas aller quelques jours dans un centre de désintoxication, il faut que tu arrêtes de boire, merde tu n'as même pas 30 ans et tu as le foie d'un alcoolo de 70 piges. Ensuite, je veux que tu retournes travailler, même si c'est pas à l'hopital bosse dans un centre de bénévole ou je sais pas mais occupe-toi, fais quelque chose d'utile comme la médecine, si tu veux je peux même me renseigner s'ils n'ont pas besoin de quelqu'un dans un de nos orphelinats. Et enfin tu me laisses gérer, je te promets de te tenir au jus mais si tu n'as pas de nouvelles de moi, tu ne m'appelles pas, tu attends que je le fasse, compris ?" "Je--" "Compris ?" "Oui...." "Parfait, maintenant rentre chez toi." Wonshik soupirait mais abdiquait tout de même, saluant son ami entre les dents alors qu'il passait la porte de la planque, remontant le couloir, descendant les escaliers, retournant dans la rue glacée, et prenant la direction de son appartement dans la nuit froide de Séoul. Il ne pouvait faire qu'une chose désormais, attendre. Même si ça le bouffait intérieurement.

Deux semaines. Deux semaines qu'il n'avait plus de nouvelles de Leo, même Gook Du n'en n'avait pas. Wonshik ne voulait pas se l'avouer mais au fond de lui il sentait comme s'il l'avait définitivement perdu, il ne supportait pas de ne pas savoir s'il était vivant ou mort et le peu d'information que lui donnait Gook Du n'aidait pas à le rassurer. Il avait pris l'habitude tous les jours de regarder les journées, surtout la rubrique nécrologique, cherchant une trace d'un corps non identifié, mais pour le moment nada. Il avait écouté son ami qui lui avait trouvé un poste dans un des orphelinats de la police, il aimait y travailler, surtout qu'il voyait tous les jours Hui et E'Dawn qui étaient ici désormais, il aimait passer du temps avec les deux garçons, les observer alors qu'ils échangeaient des moments de tendresse tous les deux. Il était devenu un peu comme leur grand-frère, leur guide, et il aimait ça. Il s'était même fait la promesse silencieuse que si un jour Taekwoon revenait et qu'il lui pardonnait son incartade, il l'emmènerait lui et les deux garçons loin de la Corée, loin de l'Asie, qu'il leur offrirait la vie qu'ils n'avaient jamais pu avoir. Il avait même discuté avec les garçons de l'idée de les adopter, de devenir leur tuteur légal, ce qu'ils avaient accepté, ravis. Finalement, lassé de vivre seul dans son grand appartement maintenant que Hyuk avait emménagé avec Hongbin, il avait proposé aux garçons de vivre avec lui, ce que l'orphelinat et les garçons avaient acceptés. Wonshik trouvait un certain réconfort dans la présence de Hui et de E'Dawn avec lui, il aimait prendre soin d'eux, veiller à ce qu'ils soient heureux, qu'ils ne soient plus jamais inquiété par la rue.

2 mois. 2 mois sans nouvelles, Wonshik ne voulait pas le montrer mais il avait presque totalement perdu espoir. Si Leo était encore en vie, il n'était pas là, il n'avait pas donné de nouvelles, peut-être qu'il ne voulait vraiment plus de lui... Wonshik pleurait tous les soirs, silencieusement pour ne pas alerter les garçons, le huidawn comme il les appelait mais il n'en figurait pas moins qu'il souffrait intérieurement, qu'il était comme mort. Il avait perdu sa raison d'être, il ne lui restait plus que les jeunes pour qui Leo avait tant fait, il ne lui restait qu'eux pour ne pas totalement abandonné et mettre fin à sa vie, dans l'espoir de rejoindre Leo où qu'il soit.

Cette nuit encore il n'arrivait pas à dormir, trop perturbé par les souvenirs de Leo qui résidaient partout dans son appartement, à commencer par Daeguni qui ne le repoussait pas comme il avait l'habitude de le faire les autres fois où Leo n'était plus là, non même le chat aimait se coller au médecin et chercher des caresses, de la chaleur, ils se consolaient l'un l'autre. Et cette nuit ne faisait pas abstraction. Wonshik était à moitié allongé sur le canapé, un plaid en travers des jambes, le chat allongé sur sa poitrine qu'il caressait distraitement derrière les oreilles, la tv allumé sur un programme de la nuit qu'il ne suivait pas vraiment, le son au plus bas pour ne pas déranger le sommeil du huidawn de l'autre côté de l'appartement. L'écran devenait noir quelques secondes avant qu'une publicité commence à la tv quand trois coups résonnaient contre la porte de l'appartement, attirant son attention et celui de Daeguni qui ouvrait les yeux. Wonshik se redressait, posant doucement le chat sur le canapé qui entreprenait de se lécher les poils avant de prendre la direction de la porte en allumant la lumière de l'entrée. Il jetait un coup d'œil dans l'œilleton mais il faisait trop sombre dans le couloir pour qu'il reconnaisse les traits de la personne sur le pas de sa porte. Il débarrait sa porte, ne l'ouvrant pas en entier alors qu'il se tenait de toute sa hauteur et de sa largeur d'épaule dans l'embrasure. La personne qui se tenait devant lui était un peu plus petite que lui, la constitution faible. Il portait un simple jean noir avec un large sweat bleu marine dont la capuche était rabattu sur son visage et ne lui permettait pas de l'identifier. L'homme, à priori même si son corps était frêle, avait les mains plongées dans la poche ventrale de son sweat. "Bonsoir..." Disait Wonshik. "..." "Je peux vous aider ?" "..." "Monsieur ?" "Je..." La voix du jeune homme était rauque, comme si elle n'avait pas servi depuis des mois. "Monsieur ?" "Shik... Je... Suis... Désolé..."

ProxénétismeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant