Chapitre 19 - Partie 2

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Quelques secondes plus tard, il leva son poignard au niveau du visage de l'homme qui continuait à sangloter silencieusement, son propre visage exprimant une profonde haine et une légère excitation. Il attendit quelques secondes, fixant d'un air dément le pillard tremblant et abattit la lame dans son œil, le tuant sur le coup.

Il sentit la main d'Ariane trembler violemment dans la sienne et la serra un peu plus fort.

Troy retira la lame du crâne de l'homme d'un coup sec, et l'essuya sur la manche de sa veste déjà largement parsemée de traces sanglantes.
Il semblait égal à lui même, ne ressentant aucun remord pour ce qu'ils venaient de faire. Ariane, elle, toujours assise aux côtés de Troy et du corps maintenant sans vie du pillard, suivait chacun de ses gestes, le regard éteint.

Il se leva doucement et rangea son couteau dans son étui, puis tendit sa main à Ariane pour l'aider à se relever à son tour.

Au moment où il avait enfoncé la lame de son couteau dans le visage de cet homme, la jeune femme avait ressenti quelque chose qui l'avait bouleversée. Elle était surtout profondément dégoutée de l'acte dont elle se rendait complice, mais elle avait aussi ressenti une fascination morbide, en voyant Troy ôter la vie de l'homme. Pendant quelques micro secondes, elle s'était sentie envahie d'une étrange sensation. Comme si pour la première fois de sa vie, elle maîtrisait tout ce qui l'entourait. Comme si elle n'était plus cette femme faible et apeurée.

Mais maintenant, tout ces sentiments avaient disparu et elle se sentait étrangement vide, sans aucune émotion. Comme si les petites étincelles d'humanité en elle étaient en train de s'éteindre une à une. Emportant dans leur mort, un peu plus de son âme à chaque fois.

Soudain, elle sursauta. La main de Troy venait de toucher son visage. Il la regardait avec une expression qu'elle n'aurait jamais crû voir un jour sur le visage si dur et cruel du jeune homme. Il la regardait avec un étrange mélange entre une profonde tendresse et un désir intense.

Elle ne bougea pas, laissant Troy tracer sur son visage de fins cercles du bout de ses doigts. Elle aurait dû le repousser, c'était ce qu'elle aurait d'ailleurs fait en temps normal. Mais les temps n'étaient plus normaux justement, et sa relation avec le jeune homme venait ce soir de prendre une tournure inattendue. Elle venait de s'abandonner elle-même à ses côtés, et cet acte odieux l'avait liée à lui d'une manière qu'eux seuls pouvaient comprendre.

Il rapprocha lentement son visage du sien jusqu'à ce qu'elle puisse sentir son souffle. Elle frémit involontairement à ce contact bien trop intime, mais se laissa tout de même faire sans le repousser, toujours sous le choc.

— Je te l'avais dit tu te rappelles ? Tu es comme moi, tu es une vraie survivante capable de s'adapter à ce monde. Les autres ne font qu'attendre, attendre que la mort les fauche. Mais nous, on se fiche de la mort, on ne se laisse pas dicter notre conduite par elle ou par les autres, chuchota-t-il la voix tremblante d'excitation dans son oreille.

Elle frissonna, le discours de Troy venait de la sortir violemment de sa léthargie.

— Non ! Je ... Je ne ferai plus jamais une chose pareille ! Si je l'ai fait, c'est uniquement pour éviter qu'il n'alerte ses amis et mette en danger la vie d'Éric. Et pour éviter qu'ils ne s'en prennent à d'autres innocentes. Pas pour mon plaisir ou pour me prouver quelque chose !

Ariane tremblait maintenant de tout ses membres, passant et repassant la scène du meurtre dans son esprit. Essayant de se rappeler précisément ce qu'elle avait ressenti à ce moment-là. Cherchant à se prouver qu'elle n'était pas assez cruelle pour penser une seule seconde comme lui.

La voyant lutter contre elle-même, il reprit la parole :

— Tu mens. Tu l'as peut-être fait pour Éric et ces femmes, c'est vrai, mais c'est pas les seule raison. Tu n'as pas détourné le regard, tu as regardé la vie s'éteindre dans les yeux de ce type sans ciller. Et je peux te l'assurer, c'est quelque chose qu'on ne fait pas si on est pas un minimum fasciné par ce qu'on voit. Tu n'as pas à en avoir honte.

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