Esméralda Dia et la symphonie des Immortels

*Giovanni Da Punte*

Partie 1

          

Le jour où on lui a dit qu'elle était morte, Giovanni ne l'avait pas cru. Anatole n'avait jamais eu cette aura de mort perceptible à tous les enfants d'Hadès, elle resplendissait de joie et de fraicheur. Mais il avait vu celle de Valérie, de Ted et d'Agnès. Et il voyait encore celle de Morgan et d'Esméralda scintiller entre les flammes du bucher funéraire.

Toutes les lumières de la colonie avaient été éteinte, pour plonger le secteur dans les ténèbres totales avec pour seul éclairage le feu d'Hestia. Les chefs des bungalows y prenaient une flamme et la ramenait jusqu'à la plage où attendaient les corps. Il n'y avait ni musique, ni discours, on avait laissé parler le silence et les dieux. Il ne les voyait pas mais Giovanni savait qu'ils étaient présents. Parfois certains se manifestaient de manière singulière quand c'était à leur progéniture d'être touché par la flamme du flambeau. Ce dernier prenait une couleur significative ou alors un animal symbolique leur apparaissait vaguement.

Giovanni n'avait jamais assisté à une célébration funéraire avant l'enterrement de sa mère, et ce qui se déroulait devant ses yeux n'avait rien de commun. Les mortels semblaient oublier dans leur procession que la mort n'était pas un état mais une étape. Chose qui n'avait pas échappé aux demi-dieux.

Il observait la scène à travers une paire de jumelle. Depuis que son horrible secret avait été exposé au grand jour il évitait de se montrer dans le coin. Il ne doutait pas que Morgan le tue s'il venait à croiser son chemin. Il craignait le regard de Chiron et encore plus celui d'Aryanna. Teedra et Jimmy semblaient l'avoir railler de la liste des vivants et de celle des morts à pleurer. Et Esméralda, que dire, elle savait pour sa mère et Anatole, elle savait également qu'il n'avait pas voulu la mort de Ted. Mais comprendra-t-elle pourquoi  il ne lui avait pas fait confiance ? Pourquoi avait-il refusé son aide ? Certainement pas, elle serait aussi furieuse que Ted l'avait été. Heureusement il n'avait pas à penser à tout cela ce soir, il était là pour une raison particulière. En vérité, il attendait une personne spéciale.

D'ailleurs il arrivait à l'instant, et accompagné. Giovanni n'allait pas s'en plaindre, les choses allaient en s'arrangeant. Il n'avait plus de soucis à se faire pour Montgomery car Jason Grace l'avait attrapé à l'un des points qui balisaient le champ de bataille. Il s'était pointé avec un groupe de monstre allié pensant l'éliminer. Mais il s'était fait avoir. Et ce soir, il comptait bien finir ce qu'il avait commencé.

Il descendit de la plus basse branche du Pin de Thalia et atterrit sans bruit dans l'herbe humide. Il faisait si noir qu'il distinguait à peine l'entrée de la colonie, les écritures gravées dans la pierre s'effaçaient et rendait au lieu son apparence de bois sauvage. Les branches du pin tressaillirent quand une brise les traversa, le bas de son pantalon dansa autour de ses chevilles et ses mèches s'ôtèrent de son front avec violence. Il jeta alors son corps en avant pour lutter contre le vent qui l'éloignait de l'arche mais l'humidité de l'herbe fit glisser ses semelles ; il planta un genou dans le sol en protégeant comme il le pouvait sa nuque éraflée par la fraîcheur du courant d'air. Un vrombissement émana de la terre et retenti dans le cœur de Giovanni ; ses dents s'entrechoquèrent les unes contre les autres. La vibration avait exercé une telle pression sur sa cage thoracique qu'il avait craint qu'elle ne se brise sous sa tension. Il pressa sa main tremblante sur sa poitrine, et fut surpris de n'y entendre raisonner aucun battement, il passa ses doigts glacées sur sa tempe mouillée de sieur. Rien.

Je suis en train de mourir ? Dit-il à lui-même.

Il enfonçait ses ongles dans sa chair en fermant ses poings mais ils ne laissèrent aucunes traces, sa paume scintillait tristement d'un blanc transfigurant et annihilateur.

Le vent finit par se calmer et il se redressa.

    ''Da Punte ?!''

Avant de tourner son visage il obligea ses traits à masquer l'effroi qui l'avait saisi.

    ''Bacchir...et Xylia'' Marmonna-t-il essouffler. ''Où allez-vous..''

    Bachir fit un geste vers l'endroit où devait se trouver l'arche. ''J'ai des adieux à faire.''

    ''Non, je ne crois pas.''

    ''J'ignore ce que tu essaie de faire mais Montgomery a été arrêter, et c'est une affaire de jours avant qu'ils nous retrouvent.'' L'oracle jeta un œil à son compagnon avant de poursuivre. ''Et si tu le veux tu peux te joindre à nous.'' 

    ''Pourquoi ?''

Bachir ne parlait toujours pas.

    Xylia transperça de son regard perspicace le brouillard qui se formait, ''Qu'importe, maintenant que nos identités et nos motivations sont révélés ; nous pouvons tous accomplir,.''

    ''Moi j'ai obtenu ce que je voulais.'' Menti Giovanni.

Xylia se crispa.

    ''Comment ? Qu'est-ce-que tu avais demandé ?'' S'écria-t-elle. ''Nos récompenses se sont évaporés lorsqu'il a été mis derrière les barreaux, notre seule chance de les obtenir est de le faire évadé ; aide-nous !''

    ''Tu parles trop.'' Coupa sèchement Bachir. ''C'est un égoïste finit, il ne nous aidera pas.''

    ''Exact.''

    Bachir étira son regard démentiel par-dessus l'épaule de Giovanni. ''Rien que d'imaginer leur mines réjouis me retourne l'estomac...''

    ''Ils ne sont pas heureux.'' Dit Giovanni. ''Ils ont vécu un véritable massacre aujourd'hui, nous avons tous perdu quelqu'un d'important.''

    ''Il n'est pas perdu, ni parti ; il est mort.'' Des larmes quittèrent ses yeux sans pudeur et sans que son ton ne perde en conviction.

    ''Tu pleures alors que tu es celui qui lui as retiré la vie. Je ne te comprend pas.''

    Bachir  inclina sa tête sur le côté, ''Rassures-moi, tu sais que c'est toi qui l'a tué ?''

    ''Bachir...'' Commença Xylia.

    ''C'est ton poison que je lui ai servi Giovanni.'' Continua-t-il.

    ''C'est toi qui l'a exécuté.''

    ''Grace à toi.''

La température chuta, derrière lui, les branches du pin gelèrent. Giovanni baissa son regard vers le dragon qui d'habitude indifférent à toutes activités, suivait la scène d'un œil alerte.

    ''Tu sais, ce soir je pense que tu ne retourneras pas chez ta mère.''

    Xylia fit apparaître son pilum. ''Encore un mort sur la conscience ?''

    ''Celui-là ne me gêneras pas, t'en fais pas pour moi.'' Répliqua Giovanni.

Dans un vol d'ombre il traversa l'oracle. Elle se pétrifia et tomba raide sur le sol.

    Bachir se précipita sur elle. ''Xylia !'' S'écria-t-il.

Il la secoua par les épaules mais les étoiles continuaient à réfléchir dans ses yeux vides.

    Il redressa sa tête, ''Qu'est-ce que t'as fait, démon !!''

Le fils d'Hadès fit apparaître une lame et fondit à nouveau dans les ténèbres. Il apparut derrière Bachir et pressa sa lame dans la chair de son cou. Il lui suffisait d'appuyer son index pour lui trancher la gorge. 

Bachir s'essoufflait.

    ''Passe le bonjour à mon père.'' Dit-il en resserrant sa prise sur lui.