Repliée dans ma chambre, je pense. Je pense au clown. Même enfermé, ce monstre continue à me jouer des tours. Ce qui est assez drôle avec les gens qui vous marquent négativement, c'est que même passé le moment où vous les voyez, leurs actions influent encore sur comment vous êtes ou ce que vous faîtes... D'une certaine manière en tout cas. Je repose ma tête sur mon matelas, perdue dans mes pensées.
Quand j'y repense, la première chose qui me vient à l'esprit, n'est ni son masque, ni sa voix mal trafiquée, ni ses coups, ni ce qu'il faisait endurer à mon corps, ni ses menaces... Non, quand j'y repense, la première chose qui me vient en tête, c'est les ballons. Ses ballons. Rouge, bleus, verts, un enfant normal adore les ballons, quand il en voit, il court vers eux, cela leur évoque la joie, la bonne humeur. Pour moi, il en fût autrement. Je ne voulais pas aller vers les ballons. Mais si je ne le faisais pas, maman souffrirait et papa aussi, le clown les tuerait dans leur sommeil. Je ne devais pas en parler, jamais. Sinon, le clown les tuerait dans leur sommeil. je devais me laisser faire, toujours. Sinon, le clown les tuerait dans leur sommeil. Est-ce que je veux un ballon ? Certainement pas... Finalement, pourquoi pas... Oui, bien sûr que j'accepte de monter dans le van. Sinon, vous tuerez papa et maman dans leur sommeil. Ne t'inquiète pas, tu vas aimer.
Quand je me remémore cette phrase, j'ai un haut le coeur. Comme je le disais, l'emprise est toujours présente, même des années après. J'ai eu maintenant le loisir d'en parler un peu. Pas à mes parents, surement pas, mais à un proche. Jacob. Je lui ai raconté, passant les détails horribles. C'est d'ailleurs ce qui a mit fin à notre relation. Quand j'ai voulu expliquer une partie de la vérité à Jacob, quand nous étions ensemble, lui expliquant qu'il ne devait pas en parler. Il a accepté facilement mais ne supportait pas l'idée de rester en couple avec moi, même si il m'aimait de tout son coeur, j'en suis certaine.
Le problème, c'est que je désire de tout mon être que le clown cesse d'influer sur mon état. Je dois y arriver. Je reste plusieurs minutes à essayer de me convaincre, de me raisonner. J'en sors avec la conclusion qu'essayer est la meilleure chose à faire. De loin. Je suppose que Marc a tout ce qu'il faut pour gérer ça. Je me sens prête comme je ne l'ai jamais été. Je peux, enfin, me dire qu'avoir une relation plus intime avec le garçon que j'aime est une bonne chose. Je ne sais pas si j'essaye ou non de me convaincre moi même de ça, mais dans tous les cas, ça marche, mes pieds me portent légèrement, jusqu'à la porte de la chambre de Marc. Je suis presque euphorique. Quelque part, le clown est toujours dans ma tête, mais je l'imagine dans une cage, lui, ses ballons, et son masque. Il m'avait dit qu'il serait le seul qui m'aimerait un jour. C'est le moment de lui prouver le contraire. C'est alors que je les entends.
Leurs respirations bruyantes. Je n'ai pas de mal à deviner qui est l'identité de la personne avec Marc. Je m'adosse au mur contre la porte, me laissant glisser jusqu'au sol. Jamais je ne me suis senti aussi trahi. "Suce". C'est les mots que j'entends marque prononcer. Le clown avait raison, personne ne m'aimera jamais plus. Pas après lui, pas après Jacob non plus. C'est alors que j'entends Marc émettre un son de douleur. Faible, mais qui se voulait fort... Contenu. Ils se cachent, donc.
Je n'arrive pas bien à savoir par lequel des deux je me sens la plus trahie... Par Marc, sans doutes, puisque j'étais prête à me donner à lui. Putain, j'en ais les larmes aux yeux. Je mets mes mains sur mes joues. Trempées. Bon, d'accord, peut être un peu plus que les larmes aux yeux. C'est alors que j'entends un objet lourd chuter, mais être amortie, sans doutes par le lit, et quelqu'un se précipite d'un pas lourd vers la porte. Merde ! Je me relève en quatrième vitesse et court me cacher derrière le mur. La clefs tourne dans la porte au même moment et quelqu'un sort de la pièce. Je me penche légèrement pour apercevoir Sophia nue au milieu du couloir. Cela me paraît très étrange, jamais, dans sa situation, elle ne prendrait autant de risques. Je me penche un peu plus et ais le temps d'apercevoir ses joues baignées de larmes, à l'instar des miennes, et son mascara qui a coulé, avant de faire tomber un verre ancien, qui trônait sur une petite étagère. Je me cache. Un blanc suit, puis, j'entends Sophia qui se sauve, sans doutes pour regagner sa chambre. Je trouve je ne sais où la force de rigoler bêtement en repensant à la tête sérieuse qu'avait prit Anthony en nous disant de ne "surtout rien casser dans la maison, ça coûte une blinde !".
Je jette un oeil dans le couloir, désert. Je passe devant la chambre de Marc, et je le vois, recroquevillé sur son lit. C'est tout ce qu'il mérite, je ferme tout de même la porte pour lui offrir un minimum de pudeur vis à vis des autres. Je me dirige ensuite dans ma chambre.
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|Le Choix|
Mystery / Thriller5 amis partent quelques jours en vacances dans une maison à la campagne, loin de tout. Ce qu'ils vont vivre et le choix qu'ils vont devoir faire va défier tout ce qu'ils ont pu croire jusque là.