Je fais tourner la bague de Lux entre mes doigts, espérant me calmer grâce à sa froideur de métal. Je ne parviens pas à m'apaiser suffisamment pour reprendre le contrôle de moi-même. Mes pas m'ont amené dans les jardins, très beaux d'ailleurs. Moi qui voulais les voir lorsque Mirza voulait me parler, je suis désormais servie. Les plantes exotiques sont si grandes qu'elles peuvent me cacher, et les arbres aussi gros que des immeubles parisiens. C'est très impressionnant de voir des choses de si près, toute leur complexité prend soudainement forme plus concrètement. Même si ma rage ne me permet pas de savourer comme il se doit tous les détails que m'offrent ma vue, je suis assez censée pour ne pas y toucher et tout détruire sur mon passage, bien que ça ne soit pas l'envie qui manque. Tout est démesurément grand, à l'image de la colère et à la frustration en moi. Mon souffle irrégulier fait trembler mon corps remplis de rage. Je ne suis pas responsable de ce qu'a fait cet Ophiuchus, pas plus que le jour de ma naissance correspondant parfaitement à ce signe du zodiaque dont je n'ai jamais entendu parler. Ils me font payer trop cher une haine que je ne mérite pas, et ça a le don de me mettre dans une profonde hargne.
Lorsque je pense être enfin tranquille, et que mon souffle a expulsé toute la rage qui fait tambouriner mon cœur, une silhouette traverse rapidement l'espace à ma droite. Je sursaute, tellement j'étais concentrée sur le mouvement de mes doigts sur le bijou, avant de regarder entre les buissons de quoi il peut bien s'agir. Un animal ? Je n'en ai pas croisé un seul, tout est étrangement silencieux, d'un coup. Jusqu'à présent, il rôdait comme un chant argentin bourdonnant en fond sonore, et je ne me rends compte de sa présence que parce qu'il est parti. Quoi que fût ce chant, il était apaisant, car désormais le calme devient inquiétant. Il n'y a rien, à ma droite, et je ne suis pourtant pas tranquille. Les sens aux aguets, je me relève de mon coin et passe les alentours au peigne fin. Mes yeux s'habituent mal à la luminosité très étrange de l'endroit. Les planètes, deux précisément, décorent le ciel d'une lumière mauve pour l'une et verte pour l'autre, comme si elles dégageaient elles-mêmes cette énergie, comme des néons. Les deux couleurs sont d'autant plus marquées par l'énorme soleil qui lui est bleu. Ce monde regorge de mystères et de magie, et dans l'instant cette magie me semble bien dangereuse.
-Il y a quelqu'un ?
Je pose la question, mais il est évident que, si c'est une personne voulant déclamer son identité, elle l'aurait déjà fait, car je n'ai pas été très discrète. Mon cœur tape dans mes oreilles et mon souffle s'accélère. Ce n'est pas le moment de venir m'embêter avec des reproches ou quoi que ce soit d'autre. Je grogne, mets l'anneau de serpent autour de mon annulaire gauche, avant de m'avancer vers les buissons. Encore des pas, et cette fois-ci des crissements plus précisément. On marche sur les géantes feuilles tombées à terre, et d'une façon qui se veut discrète... la tonalité des pas me fait dire que ce n'est pas un animal, ou alors que, si c'en est un, il a deux jambes, ou quatre qui se déplacent très lentement. Aucun souffle particulier, pas un gémissement qui pourrait me signifier que j'ai en face de moi une bête sauvage. J'en viens à la relative conclusion que c'est une personne humaine. Si Mirza est venu ici pour me demander des comptes, je me ferais une joie de l'envoyer pâtre !
Pour prouver que je n'ai pas envie de le voir, je me jette dans un geste rageur sur la personne de l'autre côté du mur de branche, voulant la faire tomber et lui faire comprendre que ce n'était pas le moment de venir me parler. Elle tombe avec moi, et étouffe un grognement, avant de se remettre sur ses jambes dans une roulade souple. Je la regarde faire médusée. Enfin, le regarde faire. Ce n'est ni Mirza, ni Zircon, ni Azolt, ni aucun homme que je puisse reconnaître. C'est un homme, grand, à la fine musculature et aux mouvements si rapides que je les voie flous. Même en usant de ma nouvelle vision, je ne parviens pas à suivre avec précision tous ses gestes. J'en conclus que, qui que ce soit, ça ne peut être personne que je connaisse : même Zircon n'a pas des gestes aussi fluides. Il a le visage masqué, et est entièrement habillé de noir. Je ne parviens pas à voir une seule parcelle de sa peau, impossible d'autant plus de mettre un nom sur ce qu'il est. En revanche, les dagues présentent sur sa ceinture et autour de ses avant-bras et de ses jambes ne me rassurent pas, mais alors pas du tout. L'intrus me fixe quelques instants, moi qui suis toujours par terre, les cheveux empêtrés dans les branches et dans les feuilles, avant de pousser un léger rire.
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Zodiaque - Tome 1 : Le Royaume Oublié.
ParanormalUn soir où les étoiles brillent dans le ciel, une jeune fille se fait mystérieusement transplanter dans une autre dimension. Perdue dans les étoiles, contemplant ce nouvel Univers qui est tout sauf rationnel, sa raison s'effiloche et les nouvelles r...