Zodiaque - Tome 1 : Le Royaume Oublié.

Chapitre Vingt-Six : royal sang-froid.

Je suis, je crois, la seule à apprécier le voyage. Nous ne volons pas dans la région du dangereux système Exa, mais partons dans la direction du soleil bleu que j'ai déjà eu le loisir d'observer depuis le jardin surdimensionné. Mirza écarte ses doigts de ses paumes dans les boules lumineuses, puis les avancent d'un coup, nous propulsant à pleine vitesse dans l'espace. Prise par surprise, je trébuche sur mon siège, manquant de me manger le sol, puis suis rattrapé in extremis par Azolt. Un léger sourire sur les lèvres, il me questionne du regard en haussant un sourcil.

-Bah alors ?

-Je n'y étais pas préparée, avoué-je en mordant ma lèvre.

Il rit et m'aide à me caler à nouveau sur mon dossier, n'ayant aucun mal à rester debout malgré notre flagrant changement de vitesse. Je regarde la voûte étoilée s'étirer et finalement se stabiliser autour de nous, effaçant les lignes lumineuses dorées pour laisser place à des étoiles scintillantes dans le ciel. Le décor a complètement changé. Habituellement si calme, l'espace est devenu une seconde route de la Soie. Des vaisseaux tous plus rutilants les uns que les autres passent et repassent sous mes yeux, cependant que Mirza arrive à se caler dans une file pour ne pas risquer d'entrer en collision avec un autre de ces bolides interstellaires. La planète devant nous est tout aussi belle que les vaisseaux qui nous entoure. Je regarde d'abord les différents engins blancs et scintillant qui nous entourent, avant de remarquer que Wana grogne sur son siège. Ses ongles manucurés rouges sont enfoncés dans la chaire de sa paume et ses sourcils orange fortement froncés. Elle tape du pied par terre. Mirza lui lance un regard compatissant. Je me demande pourquoi... Wana n'a pas l'air d'être heureuse de retrouver sa famille, pourtant il me semble qu'elle devrait l'être. Moi je serais très heureuse de retrouver mes proches, même si j'essaye de ne pas y penser, ils me manquent. Sauf si cette dite famille la traite comme une poule-pondeuse, comme elle l'a dit elle-même, je ne vois pas pourquoi elle ne serait pas enthousiaste à l'idée de les retrouver. Je me demande quand même ce qu'elle va faire, ou ce qu'elle risque de dire lorsqu'elle les verra, je n'ai jamais vu la Balance aussi anxieuse et agacée qu'en ce moment. Les autres chevaliers n'ont pas l'air non plus heureux de cette mission, Mirah par exemple ne cesse de faire taper son marteau par terre, les lèvres pincées. Elle me semble nerveuse, mais pour d'autres raisons.

La planète devant nous est un mélange harmonieux de blanc, de bleu et de vert très clair. Plus nous approchons de la surface, plus je perçois distinctement les constructions d'une civilisation très raffinée. Les différentes habitations semblent être de marbre tellement elles sont blanches et scintillent, les rivières ont la belle couleur précieuse de l'opale, les forêts sont luisantes de vivacité. Le plus petit brin d'herbe est correctement emprisonné dans un carré blanc, brossé, ciré, on dirait que cet endroit a été minutieusement préparé pour notre venue. Je reste un instant époustouflée devant une vue pareille, et quelques autres de mes compagnons ne cachent pas non plus leur fascination. Azolt, particulièrement. Je crois que tout comme moi, il est le premier à venir ici. D'autre comme Yahim, ne laissent rien transparaître. Enfin, ce dernier est sans doute une exception, comme il ne laisse jamais aucune expression passer sur son visage. Ses yeux émeraudes se plissent légèrement en voyant les maisons et les structures trop blancs, sans doute parce qu'il est dérangé dans le fond de sa rétine par quelque chose d'aussi agressif pour les yeux. Le soleil est tout aussi jaune que sur ma Terre, dans mon Univers, mais il semble radier d'encore plus de vie et de splendeur. Comme tout sur cette planète, il diffuse une lumière parfaite aux yeux de tous.

-Poses-toi sur l'avenue du palais, dit sèchement Wana.

Mirza acquiesce, n'osant pas contrarier la rousse qui semble de plus en plus nerveuse. Elle ne fait que taper du pied de plus en plus fort par terre, alors que le reste de la cavalerie est étrangement calme. Soupirant plusieurs fois, elle jette un regard angoissé vers ledit palais qui se dessine devant nous. Moi, je suis subjugué par la beauté des lieux. Le palais est un entrechat de colonne et de tour, avec des ponts les reliant. Les fenêtres sont parsemées de vitraux d'une couleur bleu pâle, les murs sont tout aussi scintillant, si ce n'est plus, que le reste des constructions sur cette planète, et une grande avenue, tout en pavé de marbre et traversé d'une large rivière d'eau, profonde de quelques millimètres, est devant nous. Le tissu liquide tout en longueur est décorée de fleurs et de pétales d'une couleur saillante rouge. Je ne connais peut-être pas les usages de cette planète, ni ses traditions ni rien du tout, hormis le fait qu'elle est la terre natale de Wana, mais je sais que c'est magnifique. Je regarde ébahie les lieux sans pouvoir empêcher ma bouche de s'ouvrir de fascination. Devant le spectacle que moi je représente, Azolt s'esclaffe discrètement. Je reprends mes esprits en papillonnant des yeux, aveuglée par tant de beauté.