Chapitre VIII

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"Deux grands problèmes pendent sur le monde : la guerre doit disparaître et la conquête doit continuer."

- Victor Hugo, écrivain des Landes Lavaniennes 

- " La... tête du roi ?" répétais-je, incrédule.

Il était impossible de plaisanter sur un sujet aussi sérieux que celui-ci, les Lamarquise ont vraisemblablement l'intention de prendre le pouvoir ; c'était certain.

Mes mains tremblèrent d'elle-même. Le cran qui m'animait laissait désormais place à une peur sans nom. En passant ma main sur mon front, j'essuyais une fine pellicule de sueur. Je devais tenir mon ventre et ma gorge noués d'angoisse. Je suffoquais à cause du souffle bruyant de mes poumons compressés sous ma cage thoracique.

C'est ma faute ? Encore une fois ? Vais-je encore être la responsable du mal des autres ? Lash, puis maintenant le pays ? Suis-je maudite ? Suis-je vraiment maudite ? Je refuse d'y croire ! Je refuse d'être la cause du déclin du pays ! J-Je ne veux pas...

Je perdais la raison, je n'arrivais pas à croire que je n'étais que porteuse de malheurs. Je n'étais qu'un pion. Depuis le début, avec mes caprices et mes pseudos désirs de voir le monde, je nourrissais l'ambition démesurée de ces personnes.

Qui plus est, ils pourraient parvenir à leurs fins ; en temps de guerre, la vie est dure. L'intérieur n'est plus si bien protégé, il suffit de se rappeler tous les avis de recherche qui trônaient sur le tableau de quêtes de la guilde, à côté des hôtesses d'accueil.

Je voulais m'enfuir, partir de ce salon de malheur, quitter ce pays où je ne causais que troubles et malheurs mais mes jambes se dérobaient sans cesse, je ne réussissais plus à me maintenir debout tant j'étais surprise par cet aveu. M'effrayant toujours plus, mon fiancé s'avança.

Ses pas lents comblaient le silence troublant du lieu. Arrivé devant moi, il se baissa à ma hauteur et effleura mon menton pour le relever vers lui.

Son regard perçant semblait lire en moi. J'avais l'impression d'être nue face à lui, comme si ses yeux pouvaient voir au-delà du masque et lire à même mon âme. Les prunelles d'acier me toisaient, il ne clignait plus des paupières et, à cet instant, je compris à quel point j'étais dans le faux.

Il ne me regardait pas, il ne me voyait pas. Il s'agissait d'œil de verre. J'avais déjà entendu parlé que les scientifiques de Forböm étaient parvenus à un tel résultat mais je ne pensais pas que c'était si réaliste. Même à cette distance, je les prenais encore de véritables prunelles, seul le peu de battements de paupières qu'il a eu m'avait permis d'en douter.

Depuis mon arrivée, s'il dirige toujours son regard vers moi, c'est uniquement grâce à la perception sensorielle accrue permise par ces derniers. Si autrefois, il ne s'agissait que d'ornements, désormais les pupilles sont directement reliés aux nerfs optiques et permettent de stimuler des aires du cerveau formant ainsi des images directement sur ce dernier sans passer par la rétine grâce à je ne sais quel procédé farfelu.

Je ne saisissais pas la totalité des propos que j'avais mémorisé mais, au final je comprenais que de la même façon que certaines plantes ont des effets hallucinogènes, ces "instruments" donnent au final l'illusion à leur porteur de voir ce qui se trouve devant lui. Il me voit au travers d'hallucinations identiques à la réalité, si j'ai bien compris ce qui était inscrit dans les ouvrages de médecine que j'avais emprunté à la bibliothèque de Rosran. Je souhaitais juste être prête dans des situations où je serais blessée mais je ne pensais pas que la lecture de ces notices reviendraient ici.

La médecine était véritablement stupéfiante dans ces contrées, pour se procurer pareille chose, il lui a sans doute fallut bien des efforts. Je me devais, au moins, saluer son dévouement. J'allais me perdre plus dans mes pensées mais Klaus m'interrompit :

- " Tu comprends, maintenant ? Ils m'ont tout pris. Des années, des années déjà que je suis plongé dans le noir complet. Mais grâce à ces fous de Forböm, me voilà enfin de nouveau accueilli dans ce monde ! Je vais me venger ! Je vais me venger de ce roi qui nous a abandonné ! Ce roi qui m'a abandonné à la merci des criminels de ce pays ! Qui m'a laissé me morfondre dans le noir total ! Il se fiche de nous, il ne s'occupe que des frontières attaquées par les autres pays ! Ce roi est indigne de sa couronne !"

Mettant à part sa fâcheuse manie de répéter deux fois la même chose, je ressentis un brin de pitié pour cet homme. Au final, il n'en est pas moins victime que coupable. Il avait raison, depuis le début de la guerre, les soldats du pays ont désertés des villes ; on en trouve désormais uniquement dans la capitale et au front. Les bandits et les crimes se multiplient ; après tout, les guildes qui manquaient déjà de personnels ont vu leur effectif se réduire considérablement en envoyant des hommes sur le champ de bataille.

Selon Seth, déjà plus de la moitié des hommes recrutés depuis la première bataille ont péris, soit près de 5 millions de victimes militaires sur les 7 millions interpellés. Ce n'est rien face aux anciennes grandes guerres qui ont dessinés les cartes de nos pays mais, à notre époque c'est un véritable massacre.

Mais, je doute fortement que cet homme devienne un roi meilleur avec de telles projets. Il est hors de question qu'il s'en sorte !

J'avais enfin trouvé la force de me relever, nous nous retrouvions de nouveau face à face.

- " Je vous en empêcherai ! J'ignore comment mais j'y arriverai !" avais-je proclamé avec conviction.

Cependant je ne reçus pas l'effet escompté ; il rit bruyamment, de manière exagérée, en se tenant l'estomac et se tordant de ce rire forcé. Puis, il se reprit posture brutalement pour, d'un regard qui se voulait provocateur me refroidir d'une phrase :

- " Dis adieu à ta famille, alors. Les riches entrepreneurs n'ont pas que des amis, tu le sais ? Tu n'as pas idée du nombre inestimable de personnes qui se feraient un plaisir de se moquer de vous ! Non, de vous tuer, une fois que vous auriez perdu tout crédit après l'annonce de ta misérable fugue d'enfant gâté ! Ils ne savent même pas tenir leur enfant et l'élever ! Comment des personnes aussi pitoyables pourraient s'élever à un tel rang ? se diraient-ils ! Tes parents connaissent mes plans ! Ils se sont déjà résignés à périr par ta faute ! Tu ne pourras rien faire ! Vous et votre argent ne pourront rien faire, cette fois !"

Alors, je suis... impuissante ? Je ne peux vraiment rien faire ? Je vais laisser cet homme assassiner le roi ? Condamner notre nation ? 

Il fallait en effet croire que je l'étais puisque finalement, quelques jours plus tard, le mariage fut annoncé. Je m'étais bel et bien révélée impuissante. Je n'ai rien su faire. La vérité n'était pas que je n'eus rien pu faire, si j'aurais cherché, si j'aurais trouvé une solution, si seulement j'avais su. Si j'y serais parvenue, j'aurais pu empêcher cette véritable catastrophe imminente.

Au lieu de ça, je me marierais dans le courant des mois suivants, le temps que la cérémonie soit fin prête.

Coucou ! L'histoire vous plaît toujours ? Dans le prochain chapitre, nous serons de retour dans le présent ! J'espère que la transition n'est pas trop "violente" ou décevante, si vous avez des choses que vous souhaitez me dire, allez-y !

Et surtout, merci de prendre le temps de lire mon histoire, ça me fait très plaisir ! : ) Je suis vraiment heureuse ! Un peu plus de 500 vues ! Je sais que ça ne veut pas dire grand chose mais je suis quand même heureuse ! Sur ce, bonne lecture ! ; p


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