Chapitre XIX

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                                                        Le sentinelle d'argent

Sasha et l'autre femme se jaugeaient du regard. Un inexorable silence pesait sur l'ensemble des combattants. Lash faiblissait à vue d'œil, il soupirait d'épuisement, sa joute ayant interrompu son repos. Le Maître se contentait de regarder la scène la mine maussade. J'étais vraiment surprise que cela fut la plus calme et posée du groupe ; Sasha, qui intervienne et non pas Keith, qui d'ordinaire ne se contenait pas.

La jeune femme aux boucles cendrées allait rouvrir la bouche mais fut coupée brutalement :

- " Cela suffit Alecto. Nous ne sommes pas ici pour nous donner en spectacle" sermonna une voix masculine assez posée.

La personne visait sans doute la masse de passants intrigués par l'agitation devant le cabinet médical. Il avait raison. Les civils murmuraient tous dans l'oreille des inquiétudes quant au fait que des brutes, violentes et cruelles soient leurs défenseurs. Ils se devaient de montrer l'exemple.

La dénommée Alecto tenta de se justifier mais dès lors que la silhouette du propriétaire de la voix apparut dans notre champ de vision elle se tut, se réduisant à de simples plaintes proférées dans sa cape.

Je fus d'autant plus tendue devant l'homme qui apparaissait depuis la caravane militaire.

Une magnifique armure de plates richement décorée recouvrait parfaitement sa carrure similaire à celle de notre Vice-Maître. De splendides gravures ornaient le métal d'argent pur et une splendide carpe turquoise ondoyait dans son dos. Sur l'une de ses épaules se prolongeait la tête d'un aigle doré, bec ouvert. Sa démarche semblait si légère qu'on oubliait le poids du métal précieux de sa magnifique protection. Sur sa hanche gauche retombait le fourreau d'une élégante rapière finement ciselée, dans les mêmes teintes argentées, dorées et turquoises que le reste de son armure reluisante.

Son visage à découvert arracha à toutes les femmes, moi compris, un profond soupir d'extase. Ses longs cheveux clairs soigneusement coiffés retombaient sur ses larges épaules. Il arborait une douce expression, malgré l'air sévère qui persistait dans ses traits. Il semblait assez jeune, dans la même tranche d'âge que sa collègue, dans la vingtaine d'années. Ses lèvres aussi claires que son teint perlé semblaient avoir été taillées à même la roche tant elles étaient fermement scellées. Une sorte de noblesse exhalait de son allure princière ; tel un chevalier de conte reposant sur son cheval blanc.

A chacun de ses pas, un cliquetis métallique sonnait harmonieusement puis, rompant le rythme de la cadence, il s'arrêta, prenant la parole :

- " Nous vous présentons nos plus plates excuses pour le comportement inadapté et totalement impoli de ma consœur à votre égard. Je suis Celian Thaddaeus Percy, Saint commandant du très estimé ordre des Paladins, défenseurs de notre magnifique pays. J'espère sincèrement que vous ne tiendrez pas rigueur pour autant des propos désobligeants de nos soldats et que nous garderons de bonnes relations avec votre office." énonça-t-il avec une éloquence telle que nous aurions pu nous laisser bercer par son timbre.

Il accompagna son discours d'une petite révérence, baissant la tête, inclinant le dos et ramenant sa main gantelée à son torse dans un geste élégant et princier, provoquant la sympathie de tous les passants qui avaient visiblement oublié le chahut provoqué par les gardes.

A ces mots, Sasha souffla que la guilde acceptait les remords de l'homme mais détourna malgré tout les yeux ; elle ne pouvait décemment  refuser sans risquer d'attirer l'animosité de la capitale, la ville en aurait elle-même était impliquée.

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