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[Aujourd'hui on avait maths. J'aime bien les maths, j'ai toujours eu des facilités, j'ai de la chance. J'ai des facilités un peu partout, sûrement parce que je travaille beaucoup. Enfin bref, on était en maths, et j'ai levé la main pour faire un exercice au tableau. J'y suis allée, j'y arrivais bien mais j'ai entendu un mec de ma classe dire que j'avais un bon cul. Ça m'a déconcentrée, j'ai pas réussi à finir l'exercice et le prof à commencer à m'engueuler parce que je lui faisais perdre du temps de cours à fixer le tableau. Je suis partie me rassoir sans finir mon exercice et sans savoir qui avait dit que j'avais un bon cul. J'ai plus osé lever la main de toute la journée. Parce qu'en plus j'ai pas un bon cul. J'ai un corps de base. Un corps pour marcher, manger, dormir, c'est tout. Ça me dérangeait pas quand j'étais petite, mais maintenant j'arrive presque plus à me changer dans les vestiaires quand on a sport. En plus je suis super nulle en sport. Je me tape la honte à chaque fois, mais c'est pas de ma faute si je suis pas sportive. Enfin peut-être que si, je sais pas. Mais à chaque fois qu'on doit courir, je suis pas bien. Le prof me fait tout le temps des remarques sur le fait que je suis essoufflée trop vite, fatiguée trop vite, trop lente, trop molle... Je le sais déjà tout ça, et pourtant ça me fait du mal à chaque fois que je l'entends. Et après m'être faite engueulée parce que je cours mal, il faut que j'aille me changer dans les vestiaires. Et on s'étonne que j'aime pas le sport, ça regroupe juste tous mes complexes. Bref, sinon eux ne sont pas encore rentrés, ils vont rentrer tard ce soir. Ils m'ont demandé de faire à dîner pour eux. Je leur ai fait leur plat préféré, j'espère qu'ils seront contents. Bref, bisous.]

Lauren fit une petite pause, sa lecture l'avait énervée. Bien qu'elle n'entretienne pas une relation particulièrement amicale avec Camila, le comportement de l'élève et du professeur la tendait. Elle tourna la page et continua la lecture.

[Bonne nouvelle : Il fait super beau aujourd'hui. Mauvaise nouvelle : Je suis enfermée dans ma chambre. L'entrecôte d'hier était trop grillée. J'aurais dû mieux surveiller la cuisson, je suis stupide. Il faut que j'apprenne à bien cuisiner, sinon je ne trouverais jamais quelqu'un, c'est ce qu'elle me répète sans arrêt. J'ai du mal à y croire dans le fond, mais je ne veux pas le décevoir. Il est d'accord avec elle. « Elle a raison Karla, il faut bien que tu saches faire quelque chose ». Peut-être qu'ils ont raison. Je sais pas. Il faut que j'écoute de la musique, je suis tendue. Et triste. Bref, musique.]

Lauren tourna la page, de plus en plus intéressée par sa lecture.

[Je vais peut-être écrire moins pendant quelques temps et dessiner un peu. J'ai eu un cours d'art et tout ce que les artistes peuvent faire passer par un simple coup de crayons est fascinant. Moins fascinant que la musique, mais fascinant quand même. Enfin bon, je verrais bien. Cette journée était bizarre. Je me suis sentie très étrange, un mélange entre le bonheur, la tristesse absolue et le vide d'émotion. Bref, bisous.]

Elle continua de tourner les pages suivantes qui étaient rempli de dessins. Elle les regarda un par un, en détail, s'attardant sur leur signification, qu'elle ignorait. Camila avait un beau coup de crayon, elle devait l'admettre. Elle avait l'impression que plus elle avançait, plus les dessins se remplissait de noir. Lauren arrêta sa lecture, bien qu'elle ne soit qu'au tout début du carnet. Il lui restait beaucoup à découvrir de la jeune brunette, et ça commençait vraiment à l'intéresser. Elle se leva et sortit dans la cour. Elle se dirigea vers le lac, s'arrêta devant et le fixa pendant de longues secondes. Les images de Camila en train de vomir d'épuisement lui revinrent en tête en même temps que ce qu'elle avait écrit dans son journal à propos du sport. Elle observa la surface du lac qui ondulait légèrement à cause du vent. « Peut-être que je me suis trompée » pensa-t-elle, « peut-être que Camila n'est pas un ouragan, c'est peut-être juste un lac sur lequel on a soufflé trop fort. » Elle resta de longues minutes devant ce lac. Elle verrait bien la suite. Elle verrait bien si Camila était une mer déchaînée ou un lac, ou un mélange des deux. Il ne fallait pas faire de conclusion hâtive juste parce qu'elle avait lu quelques pages de son carnet. Mais Camila avait raison, il fallait qu'elle apprenne à la connaître. Elle se leva et retourna aider le personnel jusqu'à la fin de la journée pour se changer les idées. En rangeant la vaisselle du dîner, elle tomba sur la cuisinière qui lui affirma qu'elle avait donné son dîner à Camila, ce qui la rassura. Elle partit se coucher et s'endormit avec l'espoir que demain serait une journée plus simple.

All I Need - CAMRENOù les histoires vivent. Découvrez maintenant