Fall For Lucifer

11.

Lucifer

Ce corps, il a toujours été impressionnant. Que ce soit auprès des humains lors de mes ballades sur Terre ou auprès de mes créations, mes abominations. Cet hôte a toujours attisé la convoitise, la jalousie et bien évidemment le respect. Les démons m'obéissent au doigt et à l'œil, ils ont peur de moi, me craignent et j'attise surtout les regards et les envies les plus profondes de chaque créature, humains confondus... C'est si jouissif !

Depuis 1944 nous ne faisons qu'un. Depuis cette date j'ai élu domicile dans ce vaisseau ; l'autre était en mauvais état, complètement dégradé. Celui-ci me convient parfaitement.

Comment je l'ai maintenu intact ? C'est simple, un sortilège l'a rendu résistant à tout ; il est devenu indestructible depuis. Il y a bien longtemps que Dave Luzbel est mort et que son âme a trouvé la paix. Sauf que moi je lui ai piqué son enveloppe corporelle. Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour obtenir ce que l'on veut... !

Comment tout a commencé ? Je m'en souviens comme si c'était hier...

New York, mars 1944. Les sombres ruelles de la ville étaient froides et inhospitalières et de gros rats se faufilaient entre les détritus qui jonchaient les petites rues étroites et malodorantes. Comme chaque soir on pouvait entendre la même mélodie, ces mêmes sirènes venant des voitures du New York Police Department. Chaque nuit se produisaient les mêmes scénarios, ces mêmes histoires que les enquêteurs essayaient de démêler au petit matin. Les histoires de drogues, d'alcool, de contrebande et de meurtres contrôlaient la ville et l'enveloppaient comme le manteau de neige qui recouvrait les toits new-yorkais en hiver.

Un soir, alors que le froid régnait et que les affaires illégales s'épanouissaient et fleurissaient de plus en plus, un enquêteur, nommé Dave Luzbel, courait à en perdre haleine, une arme à feu entre les mains. Il appuyait sur la détente plusieurs fois et des coups de pistolet résonnèrent encore à travers les bâtisses. Le criminel qu'il poursuivait était très rapide et agile, il menait une course effrénée à travers les rues et ruelles de la métropole ; Dave s'épuisait mais redoublait d'effort, déterminé à mettre la main sur ce bandit. Il n'était pas le seul à posséder une arme, celui qui tentait de lui échapper en avait aussi une et s'en servait de temps en temps, visant derrière lui pour atteindre l'investigateur.

Les deux hommes déboulèrent d'une venelle et débarquèrent sur un boulevard agité. L'assaillant visa la foule pour se frayer un chemin pendant que des cris se diffusaient et que la panique régnait. Le grand homme qui le pourchassait était vêtu d'un chapeau en feutre, d'un long manteau beige ainsi que d'un costume très sophistiqué pour l'époque et il essayait tant bien que mal d'éviter les nombreux véhicules. Pourtant ce n'était pas une mince affaire...

Criii !! Un crissement de pneu, un freinage d'urgence. Ouf ! C'était moins une ! Un peu plus et la voiture le renversait ! Ses deux mains posées sur le capot, l'enquêteur reprit son souffle en un millième de seconde, remercia le conducteur d'avoir freiné et sous ses insultes il partit de plus belle attraper ce bandit. Quelques secondes plus tard, le coupable, habillé tel un gangster des années 20, se faufilait avec une facilité déconcertante dans d'autres ruelles ; les tirs de son poursuivant ne l'atteignaient même pas. Dave sembla rager, déjà qu'il était épuisé, il ne pouvait même pas l'avoir... Celui qui mena la danse se retourna, porta son arme près de son iris et tira sans réfléchir plus longtemps ; Dave s'écroula. La balle venait de traverser ses vêtements et se logeait dans le poumon droit. Tandis que le meurtrier fuyait sans prêter attention à l'homme brun à terre, le blessé suffoquait et perdait beaucoup de sang. Il passa la main à l'endroit où il venait d'être touché et constata l'étendue des dégâts. Il jura et fit tomber sa tête en arrière, tout était perdu. Soudain, un bruit d'ailes se fit entendre dans la ruelle. Dave leva sa tête et ouvrit ses paupières lourdes vers le bruit.