Chapître 9

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Que dois-je faire maintenant. Je n'arrête pas de me passer nerveusement les mains dans les cheveux et de faire les cents pas dans le salon. Fauve sort de la salle de bains, elle a entendu nos éclats de voix.

- Yannis, c'est euh  enfin... Camille. Hurlait ? Qui ?? Elle ne parvient pas à faire une phrase cohérente.

- J'ai merdé, je l'ai poussé à bout.

- QU'EST CE QUE TU LUI AS FAIT ?

Je ne réponds pas, je me sens si oppressé que je dois prendre l'air avant l'incendie. Je le sens arriver. Je sors vite de chez nous et me voilà qui erre dans les rues sans but précis. Mes pérégrinations m'amènent jusqu'à une aire de jeux. A cette heure-ci il y a peu de gamins à jouer, la nuit ne va plus tarder à tomber. Je m'allonge sur un des bancs et regarde le ciel s'obscurcir.Je vais pouvoir décompresser dans le calme. J'ai conscience d'avoir été insistant mais s'il avait été à ma place lui aussi aurait certainement voulu savoir ce qu'il en était. Je tourne et retourne tout ça dans ma tête. Ça me fait chier d'être en froid avec Camille.
Maintenant que la nuit s'est installée l'air s'est rafraîchi et pourtant je ne veux toujours pas rentrer. L'idée me vient d'aller jusque chez Hugo, je me trouve à deux minutes de son logement. Il réside à la cité universitaire. Comme j'ai oublié mon portable, je ne peux pas le prévenir de ma visite. Je n'ai qu'à espérer qu'il soit chez lui.

Je grimpe les escaliers. Après avoir frappé à plusieurs reprises je dois me rendre à l'évidence, il est absent. Tant pis je vais patienter un peu. Je me pose devant sa porte. Je suis assis, mes bras entourent mes jambes repliées et ma tête est posée sur mes genoux. J'ai tout du mec désespéré. Ceci dit c'est un peu le cas. J'ai l'impression que ma vie part en vrille, que tout ce que je fais va de travers. J'ai perdu ma joie de vivre. Ça craint à même pas 22 ans.
J'entends du bruit dans les escaliers, je ne relève pas la tête pour autant.
- Hey mec ça va ? T'as besoin d'aide ?

- Non merci ! dis-je en relevant la tête pour répondre.

- Yannis ?! Qu'est ce que tu fais ici ?

- J'attends Hugo.

- Viens l'attendre chez moi, tu vas chopper la mort avec ce froid, me dit Adam. Tu verras plus tard s'il est de retour. Putain je suis maudit ! Je tombe sur le seul mec que je n'ai pas envie de croiser, quelle poisse.
Néanmoins je peux difficilement refuser sans me montrer impoli, alors je me résous à le suivre. Il me propose une bière que j'accepte volontiers, davantage pour occuper mes mains que pour le besoin de boire. Je suis mal à l'aise.

- Je me suis embrouillé avec Camille en fin d'après-midi. Je lui dis comme pour me soulager.

- Avec Camille ?! Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Faut quand même y aller pour l'énerver.

- Je lui ai poser des questions sur toi. Il blêmit.

- Pour... pourquoi sur moi ? Tu voulais quoi ?

- J'ai l'image de ton corps qui passe et repasse dans la tête. J'ai bombardé Camille de questions et il n'a rien voulu me dire. Son attitude ne ressemble en rien à d'habitude.

- C'est... c'est un accident. Juste un accident.

- Ne te fous pas de moi ! Si tu préfères garder tes secrets c'est ton droit mais ne me mens pas... Je m'en vais, Camille m'a déjà reproché ma curiosité malsaine, pour aujourd'hui j'ai eu ma dose. J'ai la main sur la poignée de la porte et avant que je ne puisse ouvrir il commence à confesser sa mésaventure.

- Ouais ce n'est pas la vérité mais c'est compliqué pour moi.... ses yeux se remplissent de larmes. Je vois bien qu'il fait des efforts pour ne pas qu'elles coulent. Purée qu'est ce que j'ai encore fait !

Il essaie de se reprendre et continue
- Il y a trois semaines, je sortais d'un bar accompagné d'un gars. Puis des mecs nous ont sautés dessus sans que l'on s'y attende. Ils étaient plusieurs et on s'est vite retrouvé à terre, les coups ont commencé à pleuvoir. J'ai cru que ça ne s'arrêtait jamais. Une personne du voisinage a vu la scène et a alerté les flics. Heureusement pour nous il y a un commissariat à quelques rues, ils sont intervenus rapidement et nos agresseurs ont pris la fuite. Les secours ont pris le relais et nous ont emmenés aux urgences. Je m'en sors bien au final, le mec avec qui j'étais est resté trois jours dans le coma. Sa tête a pris pas mal de coup. Il est toujours hospitalisé, on ne sait pas encore s'il va lui rester des séquelles.

- Vous savez de qui il s'agit ? Vous avez un contentieux avec ces mecs ?

- Non Yannis, j'ai porté plainte mais je ne me fais pas d'illusions cette bande ne se fera jamais arrêter. On n'a même pas vu leur visage. C'est un acte gratuit. On sortait d'un bar gay. JE SUIS GAY ! C'est ça le problème !

A présent il pleure vraiment. Je me sens mal pour lui, je ne trouve rien à dire qui pourrait le réconforter. Bien entendu j'ai connaissance de faits homophobes mais jamais je n'aurais pu penser que cela puisse se produire dans mon entourage. Son regard triste, son retrait hier à notre soirée, je me sens très con de l'avoir jugé de coincé.

- Je suis sincèrement désolé. Je te souhaite de te remettre au plus vite de cet acte horrible.

- Tu n'y es pour rien. Les premiers jours j'étais totalement flippé pour la santé du mec qui était avec moi. En fait on venait juste de se rencontrer. Je ne le connais même pas. Je pensais plus à ce qu'il revienne dans le monde des vivants qu'à moi. Et puis dès qu'il est sorti du coma, le reste m'a rattrapé. Pour ne rien te cacher je suis resté deux semaines à l'hôpital, j'étais anéanti. Je n'ai pas de famille qui pouvait veiller sur moi. Les médecins ont préféré jouer la sécurité et me garder. Ça fait une semaine que suis sorti et dès que je vais quelque part je vis dans l'angoisse que ça se reproduise.

Après cet échange je suis de retour à l'appart un quart d'heure plus tard.

Sauve-moi des flammes (MxM).                            Tome 1 (à corriger)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant