Ken dormit pratiquement tout le reste de la journée. Il se réveilla l'esprit désorienté. Le temps d'un instant, il cru être revenu dix années plus tôt quand Alicia était tout pour lui. Il crut qu'à tout instant la belle blonde passerait la porte mais ce n'était que fantasme. Il passa une main sur son visage pour effacer ce mirage. La chambre de Jane le troublait et était trompeuse. Il faisait très sombre, il était déjà tard. Il jeta un œil au vieux réveil sur le chevet qui affichait 21:53. Le brun repoussa le plaid posé sur lui et se leva. Il ouvrit la porte et s'avança dans le couloir. Il y avait encore de la lumière en bas et on percevait des voix et des rires. Ken descendit les escaliers et se dirigea vers le salon.
Jane qui riait aux éclats aperçut Ken dans son champ de vision. Il avait l'air d'un enfant, timide sous le chambranle de la porte, les cheveux ébouriffés. Elle quitta sa mère et son fiancé fraîchement arrivé pour le rejoindre et aller avec lui dans la cuisine.
- On t'a laissé une assiette de côté, si tu as faim, fit-elle.
- Je veux bien, merci.Jane sortit alors une assiette du frigo et telle une cuisinière hors pair, la mit dans le micro-onde puis tourna le bouton.
- Sans vouloir être indiscret, qui est l'homme dans le salon ? demanda Ken et sa curiosité qui venait de se réveiller.
- Josh, le fiancé de ma mère.
- Oh, alors un mariage en prévision ?
- Oui, au printemps.
Avant même qu'un blanc ne s'installe, le ding du micro-onde retentit. Elle posa l'assiette devant Ken tout en lui donnant des couverts. Il se mit à manger tandis que la brune prit place en face de lui.
- Je vois que le décalage horaire ne te réussit pas, fit Jane.
Ken aurait pu être surpris que Jane poursuive la discussion d'elle-même mais ses sens n'étaient pas encore tous bien réveillé pour le remarquer.
- Nan, en général, il me faut deux trois jours pour prendre mes repères. Toi, tu sembles bien gérer le jetlag.
- Oui, j'ai pris l'habitude avec le temps.
Il enfourna une fourchette de purée dans sa bouche.
- Tu vas rester quelques temps ici alors ? Boston a l'air de te faire du bien, dit-il.
- Oui, deux semaines tout au plus.
- Oh, je pensais que tu allais rester beaucoup plus longtemps.
Jane était à deux doigts de lui dire la réelle raison de son futur retour en France mais elle se contint. Ken avait cette faculté à ce qu'on lui accorde aisément sa confiance tant sa gentillesse transcendait ses prunelles. Elle lui mentit alors :
- T'as pensé à Albert ?
- T'inquiètes, ma sœur s'en occupe mais pas sûr qu'il survive à la furie qu'est mon neveu, rit-il.
Jane leva les yeux au ciel en émettant un petit rire. Ken finit son assiette et Jane lui proposa de passer au salon, rejoindre le couple. Juste avant d'entrer dans la pièce, la brune le stoppa et se tourna vers lui. Elle replaça du mieux qu'elle pût les cheveux emmêlés de Ken. Une fois satisfaite de son œuvre, elle sourit et entra dans le salon, suivi de près par le brun.
On avait donné à Ken la chambre qu'occupait le frère de Jane lorsqu'il venait ici. On voyait clairement la différence entre celle de Jane et celle de son aîné. La brune avait vraiment vécu ici alors que son grand frère ne faisait qu'être de passage. Ken, dans la précipitation du départ, en faisant son sac, n'avait pas emporté le livre qu'il lisait ces derniers temps. Il n'avait donc rien pour s'occuper l'esprit. Il avait dormi toute la journée et le sommeil était alors impossible à retrouver. Il avait beau se retourner encore et encore dans le lit, il savait qu'il n'allait pas réussir à s'endormir. Il finit par attraper son cellulaire et plissa les yeux lorsque la luminosité vînt agresser ses iris. Il cliqua sur le petit oiseau et le réseau social s'ouvrit. Il s'enquit de regarder les tendances, histoire de voir si on parlait toujours de Jane. C'était le cas. C'était dingue comme une simple apparition de sa part pouvait faire parler. Il cliqua sur le hashtag et lut quelques tweets. Ils étaient plus absurdes les uns que les autres. Une fille espérait qu'elle sorte bientôt son nouvel album tandis qu'un gars disait qu'elle était magnifique quand elle était triste. Ken ne put s'empêcher de lever inlassablement les yeux au ciel en faisant défiler les postes. Il retomba sur les photos sur lesquelles il était tombé, vingt-quatre heures plus tôt. On pouvait d'abord voir Jane dans le hall de l'aéroport, à la sortie de celui-ci, à la gare, en train de manger un sandwich et endormie dans le train. Ken se plaignait souvent de sa notoriété mais lorsqu'il voyageait, il retrouvait sa tranquillité. Jane, partout où elle allait, était victime de son succès. Le brun finit par fermer l'application en soupirant mais cela continuait de trotter dans sa tête. Comment faisait-elle pour vivre ainsi ? Ce n'était pas une vie des plus horribles mais les flashs qui l'assaillaient sans répit ne devaient pas lui rendre la vie facile. Ken se souvenait encore de la surprise qu'il avait eu en apprenant que son ancienne binôme d'exposés en langues mortes était devenue, avec son groupe, l'une des chanteuses les plus en vogue. Ce n'était pas tant qu'elle soit connu qui l'avait le plus frappé mais qu'elle chante. Elle n'était même pas dans la chorale de leur petit lycée. Et si elle chantait et écrivait, il l'aurait su. Léo lui aurait proposé son nom quand Ken avait demandé s'il ne connaissait pas une fille avec une belle voix pour faire des vibes sur un son de l'un de ses groupes. C'est avec cette étrange pensée que Ken ferma les yeux alors que l'aube naissait dehors.

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Fissure
FanfictionUn monde s'écroule si vite sans son pilier. Ce qui soutenait celui de Jane Quiffird, c'était son Léo. Sans lui elle ne serait rien, répétait-elle souvent lors de ses discours de remerciements, et aujourd'hui, elle n'est plus rien. L'histoire contien...