chapitre 27-2

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— Je ne dois pas être si mal en point que ça, si vous m'avez reconnu à la première seconde, lui dis-je en réprimant un gémissement de douleur lorsqu'il effleura mon épaule de sa main gantée.

— Même aux trente sixièmes dessous, vous seriez parfaitement reconnaissable, me répondit-il avec un sourire franc et contagieux, mais qui se fana presque aussitôt. Le problème, c'est que d'autres ne vont pas tarder à faire le rapprochement et croyez-moi, vous ne voulez pas que certaines personnes ici vous reconnaisse, du moins pas en ce moment ! Venez, ne restons pas là, je vais vous emmener dans une salle d'examen où nous serons plus tranquilles.

Il se releva, ôta ses gants à présent tachés de sang qu'il glissa dans la poche de sa blouse et, débloquant les roues du fauteuil d'un geste expert, nous entraina vers le couloir qu'il venait de quitter.

— Cooper ! Qu'est-ce que vous faites ? le héla soudain une voix autoritaire et énervée, derrière notre dos.

— Je gère une urgence Docteur Mayer. Cette jeune femme est gravement blessée. Faites semblant d'être évanouie, me chuchota-t-il précipitamment, alors que l'homme s'approchait de nous.

— Vous n'êtes qu'un interne Monsieur Cooper. Un interne récemment réintégrer en plus ! Vous êtes là pour palier une urgence et donner un coup main, certainement pas pour prendre des décisions !

Je perçus la montée du pouvoir de Cooper avant même que celle-ci ne m'atteigne en vague brulante sentant le musc et le sous-bois. Un loup, et sacrément puissant avec ça ! Je pouvais presque gouter son pouvoir sur mes lèvres et ce dernier avait le gout de la colère. S'il ne se maitrisait pas mieux que ça, nous allions avoir un problème supplémentaire sur les bras.

— Vous devez en référer à un médecin titulaire avant...

— C'est de ma faute Docteur, intervint Worth, volant à notre rescousse. Ma coéquipière est inconsciente et gravement blessée. J'ai interpellé le premier médecin que j'ai croisé.

— Vous êtes flics tous les deux ?

— Oui, Lieutenant Gabriel Worth, se présenta-t-il d'une voix contenue mais à la limite de l'agressivité en sortant une nouvelle fois sa plaque. Écoutez, ma coéquipière est blessée, deux de mes hommes ont disparus, sans compter que votre hôpital est un vrai cirque ! Si ces foutus animaux voulaient faire une seconde vague d'attaque pour faire encore plus de dégâts, ils pourraient entrer ici comme dans un moulin ! Je crois que nous avons plus important à régler dans l'immédiat que des petits problèmes de hiérarchie.

Le visage rond de Mayer, se ferma comme une huitre tandis qu'il avançait encore d'un pas dans notre direction, toisant Cooper qui me dérobait toujours partiellement à sa vue. Son regard passa de nous à Gabriel, puis la lassitude remplaça subitement l'arrogance sur son visage.

— Très bien, Cooper occupez-vous de cette jeune femme et n'hésitez pas à biper un titulaire si vous avez besoin d'aide. Inspecteur, cette nuit est un véritable cauchemar. Le gouvernement à déjà donné l'ordre d'interdire l'accés des hôpitaux et centres de soins à tous les métamorphes mais nous n'avons pas de personnels pour filtrer les entrés et...

— Écoutez, je dois d'abord m'assurer que ma coéquipière va s'en tirer et ensuite je reviens vers vous ! le coupa Worth d'un ton précipité tandis qu'il emboitait le pas à Cooper déjà en train de m'entrainer dans le couloir en courant.

En plus de la douleur qui commençait vraiment à devenir préoccupante, accentuée par les soubresauts du fauteuil, une peur sourde et insidieuse s'insinua en moi à l'entente des paroles du médecin. Ce que nous cherchions à tout prix à éviter depuis la révélation de l'existence des métamorphes était sur le point de se produire. Était-il encore possible d'éviter la guerre entre nos deux espèces, ou celle-ci avait-elle déjà débuter ?

Cooper fit un demi-tour contrôlé devant la salle d'examen numéro 3Ter, sur la porte de laquelle un panneau jaune et noir stipulait sans aucune ambiguïté : « HORS SERVICE ». Il ouvrit néanmoins cette dernière en la poussant avec son dos tandis qu'il y entrait à reculons. La pièce sans fenêtre était plongée dans l'obscurité qui fit place à une intense et dérangeante lumière artificielle dès que Cooper appuya sur l'interrupteur à droite de la porte. Je clignai furieusement des yeux pour retrouver une vision normale et ouvrit ces derniers sur un véritable... bordel !

La pièce, déjà petite à la base, était encombré de tout un tas de cartons et de matériel médical entreposés pêle-mêle. La table d'examen disparaissait presque entièrement sous un fatras indéterminé, tandis que poussières et toiles d'araignées se disputaient le reste de l'espace disponible.

— Vous ne vous êtes pas trompé de porte ? demanda Gabriel perplexe, alors qu'un brusque accès de faiblesse que je fus la seule à remarquer, l'obligea à se rattraper au chambranle de la porte.

— C'est une métamorphe, elle ne craint donc pas les infections ! lui répondit brusquement Cooper tandis qu'une nouvelle décharge de pouvoir déferlait sur nous.

— Vous ne savez pas vous contrôler mieux que ça ! s'exclama Worth d'une voix grondante, alors que ses iris viraient momentanément au rouge.

Merde ! Il était stressé, épuisé et puisait dans ses dernières forces pour m'aider, les fuites de pouvoir de Cooper ne devait pas l'aider à garder le contrôle.

— Je suis comme vous, lui rétorqua-t-il en virant tout le bazar recouvrant la table d'examen d'un grand geste du bras. Je suis stressé, crevé et j'ai peur, avoua-t-il en revenant vers moi. Cela ne m'aide pas à me maîtriser.

Il se pencha vers moi et sans aucun effort me souleva pour m'allonger doucement sur le matelas recouvert d'une alèze en plastique. Mon épaule m'envoya une décharge électrique dans tout le corps qui arracha une plainte à Worth de l'autre côté de la pièce.

— Vous êtes blessé ? lui demanda l'interne, visiblement surpris de sa réaction.

— Rien de grave, lui répondit-il pour temporiser à l'instant où une infirmière passait la tête dans l'entrebâillement de la porte.

— Qu'est-ce que vous faites là ? Cette salle est condamnée !

— Trop de monde, pas assez de place ! Le docteur Mayer m'a donné la permission. Allez plutôt me chercher des poches de sangs, un kit de perfusion et un autre d'extraction. Maintenant ! aboya-t-il à la jeune femme, qui tourna les talons, un air peu amène sur le visage. Je dois aller chercher une nouvelle paire de gants et m'assurer qu'elle fait bien ce que je lui demande, je reviens tout de suite, nous dit-il en sortant à son tour.

Worth s'approcha de moi d'une démarche heurtée et avisant un gros carton, se laissa tomber dessus avec un profond soupir.

— Mon dieu Hannah, qu'est-il en train de se passer ?

— Ce que nous redoutions depuis le début. Aucun ambassadeur ou discours rassurant ne pourra rattraper ça. Kane à gagner.

— Tu crois que c'était son plan depuis le début ?

— J'ai peur qu'on ne lui ait forcé la main... à moins que... je ne sais pas, finis-je par lui avouer, alors qu'un brusque accès de faiblesse cherchait à m'entrainer vers un sommeil réparateur.

— Lâche prise Hannah, endors-toi, ton corps en a besoin.

— Je ne peux pas me le permettre et tu le sais. Une transfusion me boostera assez pour que nous puissions partir d'ici et trouver un endroit sûr le temps de récupérer. De ton côté, arrête de me protéger, tu sapes tes forces pour rien.

— C'est déjà partiellement le cas, m'avoua-t-il avec un petit sourire contrit.

— Je me disais bien, que ça faisait un peu plus mal, lui rétorquai-je alors que sa main cherchait la mienne.

Cooper choisit ce moment pour entrer en trombe dans la pièce, un carton de fournitures médicales dans les bras et un air catastrophé sur le visage.

— Inspecteur ! Une nouvelle attaque à eu lieu. Des métamorphes sont blessés et ils refusent de les laisser entrer !


Elémental - Transfiguration Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant