— Quel est ton plan ? me demanda-t-il alors que les lumières clignotantes des premières ambulances nous indiquaient que nous n'étions plus loin de notre but.
— Tu devrais répondre, me contentai-je de lui dire, alors que son portable se mettait à vibrer pour la troisième fois en moins de cinq minutes.
— J'ai toujours préféré prendre mes engueulades en face, plutôt que par téléphone ! grogna-t-il alors que nous tournions le coin d'une rue et nous arrêtions net, choqués par le spectacle.
Le commissariat, qui avait toujours été un peu pouilleux, coincé entre le parking défoncé d'un pressing désaffecté et les entrepôts décrépits d'une entreprise quelconque, avait à présent l'air... à l'agonie. Plusieurs patrouilleuses cabossées gisaient sur le côté du petit parking, poussées là par trois camions de pompier, dont les soldats du feu s'échinaient à tenter de circonscrire l'incendie résultant d'une explosion qui avait pulvérisé une bonne partie du côté gauche du bâtiment. Certainement dû à un caprice du vent, les relents acres et étouffant de la fumée noire qui s'échappait en nuage épais du toit éventré et aurais dû nous parvenir depuis au moins deux kilomètres, ne nous atteignirent que lorsque nous reprîmes notre marche.
Baissant la tête et portant instinctivement nos mains devant nos bouches, nous pressâmes le pas, slalomant entre les ambulances, les pompiers et les journalistes, sans que personne ne tente de nous intercepter. Malgré le brouhaha des moteurs, des cris et des voix, l'ambiance était lourde et paraissait presque feutré, plombée par l'horreur et le désespoir qu'irradiaient tous les gens que nous croisions.
Nous n'eûmes aucun à mal à repérer le PC de crise, établi le long du mur de droite, à l'abris des fumées et des reliquats d'eau des lances à incendie. Le commissaire nous aperçu à la seconde où nous pénétrâmes dans son champ de vision, à croire qu'il nous guettait. Son allure avait sensiblement changé depuis que nous nous étions vus, à peine quelques heures auparavant. Son costume noir était à présent taché et déchiré, tout comme sa chemise à présent plus grise que blanche, et sa veste avait disparu. Ses cheveux couverts de cendres le vieillissaient, ainsi que les rides d'anxiété et les cernes qui lui mangeaient le visage et n'étaient pas loin de pouvoir rivaliser avec les miennes ! analysai-je alors qu'il se portait à notre rencontre. Ses coups de fils à répétitions étaient peut-être bien ce qu'ils étaient au final, du désespoir.
La fragrance de ce dernier, acre et douceâtre, m'enveloppa dès que nous fûmes assez près de lui, confirmant mon hypothèse et ôtant une appréhension sourde qui me nouait les épaules, sans que je n'en aie eu conscience.
— Worth, enfin ! s'exclama-t-il d'une voix épuisée et lasse. Les pompiers et les secours trépignent pour entrer à l'intérieur, mais je le leur ai interdit, depuis que la dernière équipe n'est pas revenue.
— Ils sont partis depuis combien de temps ? demandai-je aussitôt.
— Plus de deux heures.
Le regard consterné et inquiet que nous échangeâmes, valait tous les discours et ne fut pas assez discret pour ne pas être aperçut par le commissaire Baker.
— Nous avons appelé l'armée, mais ils ne seront pas là avant plusieurs heures. Nous pensions tous les avoir eus, mais à l'évidence, on se trompait.
— Nous n'avons entendu aucune explosion, ni aucun coup de feu ! Je persiste à dire qu'il faut tenter le coup, intervint un homme d'une quarantaine d'année, qui au vu de son uniforme, devait être le capitaine des pompiers.
— Les métamorphes n'ont pas besoin d'arme, surtout pour s'attaquer à une poignée de secouriste ! leur dit Worth d'une voix impatiente. Pourquoi les avez-vous laisser entrer en sachant à qui vous aviez à faire ?
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Elémental - Transfiguration Tome 1
ParanormalDans un monde en pleine mutation où les humains viennent d'apprendre l'existence de leurs cousins métamorphes, Hannah, jeune femme froide et indépendante à été choisie malgré elle pour représenter les siens lors de cette transition difficile et risq...