ORCAM - Tome 1 : Automne (2ème partie)

Chapitre 6.7

(...)

Et pour cause... songea Doran. Le silence qui régnait était assourdissant et le spectacle qu'elle venait de découvrir était tout bonnement ahurissant.

Fahran retenait l'un des frère Ruadhan – le plus jeune – le fil de son épée posé sur sa gorge. Quant à Kaïs, il maintenait – grâce à sa magie de l'Air – les trois autres Ruadhan plaqués contre le plafond du tunnel. Doran savait que la pression que mettait le géant dans son attaque était forte et les trois amis de la jeune fille grimaçaient de douleur. Si Kaïs n'arrêtait pas, il pourrait aisément les tuer. Seuls Iain, Morgane et la mère des triplés n'étaient pas à la merci des Os'Tra. Les deux femmes avaient sans doute compris qu'il ne valait mieux pas jeter de l'huile sur le feu et elles tentaient tant bien que mal de retenir Iain qui semblait vouloir se ruer sur Kaïs.

— Par les Quatre... s'exclama Lihanna en découvrant la scène. Arrêtez !

Elle foudroya Fahran et Kaïs du regard. Ces derniers lui retournèrent un regard froid.

— Mais relâchez-les, bordel ! Qu'est-ce qui vous prend ?

Elle allait se précipiter vers eux, mais elle se figea quand elle vit Fahran commencer à entailler la peau du jeune homme qu'il retenait.

Alors elle se retourna vers Doran et lui jeta un regard suppliant.

— Doran... commença-t-elle.

— Iitlaqoileadh iad ! ordonna Doran dans la langue de son peuple, sans la regarder.

— HajamIonsaì Sì Doran ! répliqua froidement Fahran en maintenant la pression sur son prisonnier.

Oui, oui... Elle l'avait attaqué. Mais ce qui gênait surtout son ami – Doran en aurait mis sa main à couper – c'était que son amour propre en avait pris un sacré coup. Le grand Fahran n'en revenait pas d'avoir été désarmé par une gamine. Il était même carrément vexé.

— Oui, c'est vrai, répondit Doran quand il fut sûr que le fou rire qui le guettait était passé. Mais elle n'était pas vraiment elle-même. An Evan MasirCinniùint.

En entendant parler du sort mythique lancé par leur ancêtre sur ses descendants en ligne directe, Fahran et Kaïs lui lancèrent un regard médusé.

— Euh... tu en es sûr ? demanda le géant en fronçant ses épais sourcils bruns.

— Certain, acquiesça Doran. AistayquazDhùisigh Sè.

Oui. Il était sûr. Quelque chose avait fait s'éveiller le sort dans le cœur de Lihanna. Il avait vu la noirceur dans son regard et son comportement déroutant était une preuve supplémentaire. Mais il n'était pas trop tard pour elle. Même si – apparemment – les bracelets inhibiteurs de magie qu'elle portait commençaient tout de même à avoir des difficultés pour contenir la puissance du mal qui la rongeait. Mais quoi qu'il en soit, la jeune fille avait néanmoins découvert toute seule une façon de le contrer et Doran ne pouvait être qu'admiratif. Et un peu jaloux aussi... Elle devait être sacrément amoureuse ! Et être aimée aussi follement en retour ! Car seul l'amour pouvait combattre le sort qu'Evan avait lancé sur ses descendants. À l'inverse, la haine et la colère lui servaient de carburant.

Pour le moment, vu la réaction de Lihanna, il était persuadé que les triplés ignoraient tout de ce sort et c'était mieux ainsi. En plus, il n'en connaissait pas assez sur le sujet et il préférait laisser Talek – ou un autre ancien – leur expliquer le plan machiavélique que leur taré d'ancêtre avait imaginé.

Tout ce qu'il savait, c'était que Lihanna devait continuer à aimer et être aimée, et il n'y aurait aucune raison de s'inquiéter ! Simple, non ?

— Je peux savoir qui est le mec que tu as autant dans la peau ? ne put-il s'empêcher de lui demander en chuchotant.