Prologue

341 15 2
                                    

Une grille blanche me fait face. La peinture s'écaillant par endroit laisse apercevoir la rouille des barreaux ici et là. J'attends patiemment dans le froid que l'on vienne m'ouvrir. Un homme, que je soupçonne être le concierge, s'approche à pas lents en ma direction. Une tasse à café fumante qu'il porte par moment à ses lèvres siège dans sa main. Je souffle; un nuage de buée sort de ma bouche. Le concierge ouvre la grille et m'invite à entrer. Je me faufile lentement. L'homme referme la barrière derrière moi. J'avance tranquillement dans la cour, où les élèves parlent et rient regroupés entre eux. La cour est grande, des bancs sont dispersés ici et là. Des arbres se dressent aux quatre coins de l'espace. Les bâtiments entourent ce dernier.

Je suis seul mais cela m'importe peu. Continuant d'avancer et j'entre dans le premier bâtiment. Le couloir auquel je fait face est emplit de lycéens. Des casiers colorés meublent le corridor. Je me fraie ensuite un chemin entre les élèves et atteins le bureau du principal. J'attends quelques secondes avant d'abattre mon poing contre la surface de bois sombre. Je toque et le proviseur m'accueille froidement. D'un geste de la main il m'invite à m'asseoir dans le fauteuil qui fait face à son bureau. Je m'exécute en laissant tomber mon sac au sol. L'homme me regarde sans rien dire. Il me toise, m'observe. Il sait ce que j'ai fait, qui je suis. Je ne bouge pas et je soutiens son regard. Chaque nouveau lycée c'est la même chose, le même cirque. Mais aujourd'hui, j'y suis habitué. Je bâille faisant comprendre au principal qu'il est long. Il me lance un regard noir et déclare :

« – Aaron, j'ai lu dans votre dossier que vous avez fréquenté de nombreux établissements avant celui-ci...

– Oui et alors, rétorquai-je.

– Nous ne voulons pas d'un adolescent à problèmes ici, vous comprenez ?

– Ouais, génial, je m'en branle. C'est quoi ma classe ? »

L'homme serre les dents et soupire. Il me tend un dossier sans dire un mot. Je saisi ce dernier, me lève, attrape mon sac et pars sans politesses. J'entends le principal jurer derrière la porte. Je souris, fier de moi. Toujours dans le couloir, j'ouvre le dossier. La sonnerie n'a pas encore retenti. Des élèves marchent ou courent en riant devant moi. Ceux qui m'observent étrangement reçoivent un regard noir de ma part. Je commence à avancer avant d'être percuter par un garçon qui court. Je m'écarte trop tard et nous nous percutons. Je manque de tomber mais reprends mon équilibre in extremis. Le jeune homme qui m'a bousculé, se tourne vers moi. Ses cheveux noirs sont en bataille et ses yeux verts pétillent d'excitation. Il sourit.

« – Déso mec, j'tavais pas vu ! »

La sonnerie se fait entendre. Le garçon se redresse et me tend la main vers moi.

« – J'm'appelle Jules et toi ?

– Aaron, répondis-je froidement en ignorant sa main tendue. »

Jules me fixe pendant un instant avant de s'exclamer :

« – Ben dis donc toi tu rigole pas... »

Je hausse les épaules.

« – Tu m'ennuie en fait... Je vais être en retard à cause de toi. »

Son sourire disparaît, sa main retombe.

« – Pousse-toi »

Il s'écarte et je passe devant lui sans lui dire un mot. Je m'engage dans les escaliers sans me retourner. Son air familier avec moi m'énerve. Je trace dans les couloirs et atteins la porte de ma classe. Je toque et entre dans la salle sans l'autorisation de la professeure. Tous les regards sont tournés vers moi mais je m'en contrefiche. Je dépasse les élèves et m'installe au fond sans un mot pour l'instit.

Je ne fais pas plus d'un mois dans ce lycée avant d'être renvoyé. Et je m'endors comme une masse.


SeulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant