~XXXIII~

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Lorsque nous sommes devant sa porte, je stress énormément et je crois que Jules aussi. Sa main tremble dans la mienne et sa respiration est saccadée. Et ce n'est pas seulement à cause de notre course. Je vois bien qu'il a peur.

« – Hé, tenté-je pour le rassurer, ça va aller... »

Il hoche la tête timidement. Puis il sonne en détachant sa main de la mienne et sa mère vient lui ouvrir. Elle nous fait entrer sans le moindre petit sourire et je comprends pourquoi Jules stresse autant. Nous arrivons dans le salon et ce qui me saute aux yeux c'est la canapé. Enfin c'est surtout sa couleur. Qui choisirait vert pomme pour un canapé ? Les parents de Jules manifestement. Sa mère part chercher son mari et nous laisse ainsi seuls.

« – Je le sens pas là, murmure Jules.

– Mais si, ça va aller... »

Je n'ai pas le temps d'ajouter quoi que ce soit car le couple revient dans le salon. Ils ne sourient pas, ce qui est un peu déstabilisant.

« – Papa, maman... Je sais que c'est difficile en ce moment et... Sarah... (Les parents se crispent en entendant le prénom, Jules cherche ses mots.) me manque beaucoup aussi... Mais... Je voulais vous annoncer que... Je sors avec un garçon... Et c'est Aaron... Qui est juste à côté de moi. »

Pendant une minute, personne ne dit rien. Puis la mère prend la parole :

« – Tu es sûr que tu l'aimes ?... »

Mais avant que l'adolescent ne puisse répondre quoi que ce soit, son père s'exclame :

« – C'est n'importe quoi ! Je refuse que mon fils soit une tapette ! »

L'intéressé ne répond rien, abasourdi. Je n'ose pas intervenir. Soudain l'homme s'avance vers Jules et je comprends immédiatement ce qu'il va faire. Ce dernier lève son bras mais je pousse le garçon sur le côté et prend sa place. La gifle que je me prends est si forte qu'elle m'en fait perdre l'équilibre. Je tombe et les larmes me montent aux yeux. Non pas à cause de la douleur, mais ce sont les souvenirs qui resurgissent au mauvais moment qui me font perdre mes moyens. La colère monte en moi et je me relève, fou de rage. Jules essaie de me calmer et réussi. Je le regarde un instant et lui attrape le poignet en disant rapidement :

« – On s'casse ! »

Les parents n'esquissent pas le moindre geste et j'en profite pour partir en courant, suivi de mon copain. Nous courons pendant quelques minutes sans vraiment regarder où nous allons puis nous nous arrêtons dans une ruelle.

« – Bah j'ai rêvé mieux comme coming-out, articule Jules d'un ton sarcastique encore essoufflé. »

Je ris un peu.

« – ... Comme anniversaire aussi, ajoute-t-il. »

Je lui attrape la main.

« – Ça, dis-je en l'entraînant vers le conservatoire, j'sais comment régler ça !... »

SeulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant