La Légende de Rome - Tome I

Chapitre 20 : Épiées

Maison des Vestales, Rome.

Rema contempla un moment la façade arrière du bâtiment. Elle plissa les yeux à la vue d'une fenêtre, et la franchit.

La chambre d'Hélène était vide. Rema soupira et s'étendit dans le lit, attendant avec impatience l'arrivée de son amie.

– Mais qu'est-ce que tu fais ici ?! s'exclama Hélène en entrant soudainement dans la pièce.
– Tu ne sais pas à quel point s'entraîner tout les jours peut être ennuyant...
– Et s'ils remarquent ton absence ?
– Je serais rentrée avant la fin de la pause du midi.... Ne t'inquiète pas. Et, au pire, je bricolerai un mensonge...
– J'ai songé un peu ces temps-ci à qui pourrait bien avoir détruit ton village... dit Hélène, songeuse.
– Donc ? la pressa Rema.
– Je pense qu'il ne s'agit pas de pérégrins, en raison de l'épée trouvée avec les inscriptions en latin... Ceux qui ont attaqué savaient forcément lire et écrire. Ils ne venaient donc pas d'un village voisin.
– Peut-être qu'ils l'ont volée... hasarda-t-elle.
– Cela m'étonnerait... En plus, ils l'ont volontairement laissée sur le perron de la maison. J'imagine qu'ils savaient donc ce qui y étaient inscrit.
– Doit-on en comprendre que leur geste avait été planifié ?
– D'une certaine manière, oui. Ils avaient sûrement reçu des instructions ou des ordres de quelqu'un.
– Mais de qui ?

Voilà la question qui la tourmentait depuis ce jour funeste, où elle a assisté, impuissante, à la mort de ceux qui lui étaient chers. Elle avait juré de se venger. Elle le ferait. Elle le ferait pour tout ceux qui étaient mort injustement cette journée-là... Dans un désir de justice. Tout simplement.

Près du mur arrière de la maison des Vestales, Rome.

Honorius, tapi dans l'ombre, écoutait leur conversation depuis un bon moment. Il avait suivi la vestale jusqu'à ce qu'elle arrive ici, et il s'était alors caché pour écouter. Le rideau de la fenêtre n'était pas tiré, ce qui lui permettait, s'il s'éloignait un peu, de voir les occupants de la chambre, ou plutôt, les occupantes. Les deux interlocutrices avaient des voix aiguës, ce qui ne laissait pas de place au doute: c'étaient des femmes. Il se demandait comment la personne avec qui la prêtresse parlait avait fait pour entrer; cette dernière était entrée seule. Techniquement, elle était donc déjà là à l'arrivée de la vestale.

Honorius fronça les sourcils. Il savait que les entrées du lieu de résidence des vestales étaient protégées... Une visiteuse impromptue aurait paru suspect...

Maison des Vestales, Rome.

Rema n'écoutait désormais Hélène que d'une oreille. Celle-ci avait terminé d'exposer à son amie ses observations, et elle étalait désormais les commérages de la cité. Telle personne avait marié telle autre, telle femme avait trompé son mari, tel autre homme avait...

La jeune fille se sentait épiée. Écoutée. Observée. Rema fit signe à la vestale de se taire, et se dirigea vers la fenêtre. Elle se pencha pour voir au-delà et plissa les yeux en baissant le regard vers le sol. Elle aperçut indistinctement quelqu'un, tapi dans la pénombre.

– Quelqu'un nous espionne, glissa Rema à Hélène d'une voix basse, pour que l'inconnu ne les entende pas.
– Tu en es sûre ? demanda la prêtresse en s'approchant de la fenêtre.
– Regarde, il y a quelqu'un, juste en-dessous de nous...

Dans les rues de Rome.

Rema accélera le pas pour rattraper Octave, qui marchait d'un pas rapide devant elle. À peine une vingtaine de minutes plus tôt, à la tombée de la nuit, il était arrivé en trombe dans sa cellule, demandant à la jeune fille de le suivre. Elle avait cru un instant que son mensonge avait été découvert, que sa couverture était tombée; cependant, Octave s'était empressé d'ajouter qu'une certaine connaissance avait besoin de son aide. « De mon aide ? » avait songé Rema. « En quoi pourrais-je être utile ? »