Prison de Rome.
Les murs suintaient d'humidité, ceux-ci couverts d'une étrange teinte verdâtre. Des fissures et des craquelures sillonnaient la surface en pierre, et certaines étaient si usées qu'elles s'effritaient sous le contact des doigts.
L'homme appuya sa tête sur le mur du fond de sa cellule et soupira. Cela faisait plus d'un mois qu'il était emprisonné là, entendant avec lassitude son trépas. Il savait qu'il ne serait jamais libéré, quoiqu'il fasse... Alors, autant entendre sa fin en silence, enfermé dans la cage que provoque la solitude.
Il tourna le regard à droite et vit la famille jetée au geôle quelques heures plus tôt. La fillette, depuis que la porte de la cellule fût fermée, secouait les barreaux, dans l'espoir que quelqu'un l'entende et la libère. L'homme songea avec amertume à sa fille, bien plus âgée que cette fillette, qu'il avait laissé derrière lui. Elle lui manquait... Il ignorait si elle était encore en vie, ou s'il allait tout simplement la revoir un jour. Il espérait de tout cœur qu'en se livrant, les soldats ne l'avaient pas tuée, et avec elle le village en entier...
Son fils. Au moins, il savait que lui, était vivant... Mais au service de ce meurtrier. Il le détestait du fond de son âme, autant qu'il avait aimé son père, un homme bon et juste. En plus de l'emprisonner, pourquoi devait-il asservir toute sa famille ?
— Pourquoi !? Pourquoi ?! cria le prisonnier, hors de lui, en frappant les barreaux qui délimitaient chacune des cellules de ses poings.
La petite fille, dans la cellule voisine, arrêta un moment de secouer les barres en métal de ses mains chétives. Elle contempla l'homme qui avait crié, et s'approcha.
— Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle.
Le prisonnier ne répondit pas, sa tête enfouie entre ses larges mains. Ce dernier se mit à murmurer seul, sa voix se répercutant dans la cellule vide.
— Je vais le tuer... Je vais le tuer... Je vais le... tuer... murmurait-il.
— Ce n'est pas bien de vouloir tuer quelqu'un, chuchota l'enfant.
— Même si cette personne t'a tant meurtri ? Même si cette personne est responsable de la mort de ceux que tu aimais ? répliqua l'homme.
— Eh bien, dans ces cas-là... dit la fillette en hésitant.
— Mais il reste que tuer est mal, tu as raison...
J'ai une fille et un fils, tu sais... Tu me les rappelles.
— Votre fils, quel âge a-t-il ? demanda la petite, curieuse.
— Il est bien plus vieux que toi... Il vient d'avoir vingt ans...La petite fille hocha la tête, et l'homme leva le regard vers elle. L'enfant ouvrit de grands yeux écarquillés, un air surpris sur le visage, mais resta silencieuse. Le prisonnier tourna le dos à la fillette, et se rembrunit dans la solitude et le silence.
Villa de Marc-Aurèle, Capri.
Lucilla, fixant le plafond de sa chambre, soupira d'agacement et de désespoir mêlés. Son visage ne voulait pas quitter ses pensées... Elle le voyait partout, il était impossible pour elle de se défaire de la vision de son visage charmeur... « Charmeur ! », songea-t-elle. « Voyons, Lucilla... Honorius a un visage... C'est vrai qu'il est plutôt agréable à... »
— Argh ! hurla la rousse. Lucilla, arrête ! Toi et Honorius, c'est impossible ! Moi et Honorius... Honorius déposant délicatement ses lèvres sur les miennes..
Une voix perfide résonna dans sa tête : « voyons, ma chère, tu sais autant que moi que c'est un rêve... Toi et ton demi-frère... Cette relation ne sera jamais acceptée par les Romains, encore moins par Commode... »
— Laisse-moi avoir des rêves... souffla-t-elle, des sanglots dans la voix.
Lucilla essuya rageusement ses joues humides et resta ainsi, seule, à songer à ceux qu'elle avait perdus...
Amphithéâtre Flavien, Rome.
Culpabilité. C'était le sentiment qui l'envahissait. Lestée par son mensonge... « Tu vas finir par te trahir, Rema... », lui disait sa conscience. La jeune fille fit taire cette petite voix intérieure avant de s'empresser de retourner s'entraîner, après cette brève pause, où sa conscience ne l'avait pas laissée en paix...
Palais impérial, Rome.
Il savait qu'il n'aimerait pas être dérangé. Mais cette question lui triturait l'esprit beaucoup trop pour rester sans réponse... Romulus se souviendrait toujours du regard de la petite... Sans rancœur. Elle aurait pu très bien le détester... Le jeune homme lança un bref coup d'œil dans la pièce : il était là, seul.
— Pourquoi nous as-tu ordonné de les mettre en prison ?! Ils sont innocents...
L'empereur se redressa à l'aide de son coude, et bâilla ostensiblement.
— Et toi, pourquoi veux-tu savoir ? Qu'est-ce que cela te fait, qu'ils meurent ou pas ? L'enfant a touché ton cœur ? Quelle sensibilité... se moqua-t-il.
Romulus serra les poings, furieux, mais se retint. Il se doutait que s'il répliquait, il n'aurait pas sa réponse...
*** Je sais, je suis cruelle de vous laisser en suspens comme ça... La réponse tant attendue au prochain chapitre ! ****
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La Légende de Rome - Tome I
Historical Fiction| Tome un : terminé | 180 après J.-C. Empire romain L'aiglon vient de prendre le pouvoir à Rome, Devenant maintenant un aigle, L'oiseau fier prend son envol... Le village en flammes, Le sang qui coule, Le fer qui se croise. Rema qui contemple, i...