Chapitre 21 - Main dans la main

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6 Avril 1665 – suite et fin !

– Et bien, vous l'avez échappé belle ! a-t-elle dit. Mais quelle imprudence d'aller faire cette opération de sauvetage en plein jour ! C'est du suicide !

      Nous étions tous muets, comme des enfants se faisant réprimander par leur mère. Nous devions probablement la vie à cette jeune fille.

– En tout cas, vous ne ressortirez pas d'ici avant la nuit ! a-t-elle ajouté.

      Elle nous a menés dans une pièce sombre, à l'arrière de la maison. Elle nous a apporté de grosses miches de pain chaud sur lesquelles les anciens prisonniers se sont jetés. Puis, Léanna a demandé à deux hommes de porter Will à l'étage. Je les ai suivis. Ils l'ont étendu sur un lit, sur le ventre. Puis, ils nous ont laissées seules. Léanna a pris une bassine d'eau froide et a commencé à nettoyer les blessures de Will. Je n'ai pas pu tenir ma langue plus longtemps.

– Pourquoi ? ai-je demandé.

      La jeune femme n'a pas bronché.

– Pourquoi nous avoir aidés ? ai-je répété. Je croyais que tu n'aimais pas les pirates.

      Léanna a soupiré avant de répondre.

– Je ne les aime pas particulièrement, non. La plupart sont violents et cupides, a-t-elle dit. Mais j'aime encore moins le gouverneur. Il affame ses sujets, enferme des innocents et les torture. Il est injuste et profite de son pouvoir. Alors, les ennemis du gouverneur et de sa clique de nobles sont mes amis.

      Elle semblait fière de désobéir, fière de s'opposer frontalement au pouvoir autoritaire en place.

– Dès que je t'ai vue, j'ai su que tu n'étais pas d'ici, a-t-elle ajouté à mon intention. Et ne crois pas que je n'ai pas vu tes hommes se cacher parmi mes vaches.

      Ainsi elle savait tout. Cela rendait la chose plus facile. Nous avions une alliée dans la place. Elle a continué de soigner Will, en me demandant de lui apporter baumes et bandages. Finalement, elle a revêtu le jeune homme, encore inconscient, d'une chemise ayant appartenu à son père et l'a laissé se reposer dans la chambre.

      Nous sommes redescendues pour mettre au point notre plan d'évasion.

      Quelques heures plus tard, nous nous glissions dans les rues de la ville endormie. Léanna connaissait un passage qui était rarement gardé. Nous l'avons donc suivie, avançant à pas de loups dans la pénombre. Seul Edward soufflait parfois un peu fort mais je ne pouvais pas l'en blâmer : il portait à nouveau Will sur son dos, ce qu'aucun autre homme ne pouvait faire.

      Nous sommes arrivés non loin d'une petite porte qui donnait sur la forêt. Léanna m'avait confié qu'il s'agissait d'un passage secret, permettant à la population, et surtout aux personnes d'importance, de fuir la ville si celle-ci était attaquée. Elle m'avait fait promettre de ne jamais utiliser ce chemin pour rentrer dans la ville, plus tard, et la mettre à sac.

      Cependant, cette petite ouverture dans les fortifications de la ville était gardée. Léanna jura. Notre entreprise malencontreuse de la veille avait dû provoquer ce renforcement de la garde.

      J'ai rassuré notre guide. Deux soldats n'allaient pas empêcher une vingtaine de pirates de sortir de la ville. J'ai donné des ordres brefs. Il s'agissait d'être rapides et silencieux. J'ai demandé à Léanna de rester en arrière. Pas question qu'elle soit mêlée outre mesure à nos affaires.

Le Journal d'Ariana [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant