Chapitre 4 - Une visite inopinée

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Trois coups sourds contre la porte.

– Nicolas ! Il est l'heure de se lever ! Tu vas être en retard pour le petit déjeuner.

Le jeune garçon grommela.

– J'arrive !

Il se leva et s'habilla avant de descendre. Dans la salle à manger, il retrouva son père. Une table immense occupait le centre de la pièce. Lors de chaque repas, Nicolas prenait place à un bout, son père à l'autre. Il trouvait cela ridicule. Pourquoi tant de place pour deux personnes ? Il lui vint une idée.

– Père ? Que donne-t-on à manger aux prisonniers ?

– Ce ne sont pas tes affaires Nicolas.

– J'espère qu'ils sont bien nourris. Il me semble que c'est une pauvre jeune fille de 16 ans que nous tenons enfermée.

– Peu importe qui occupe nos cellules. La pitié ne doit pas affecter ton jugement mon fils. Tu te dois d'obéir aux ordres du roi, même si ce qu'il demande est contraire à tes principes.

– Pourquoi ? C'est ridicule !

– Mais c'est comme ça. Chacun à sa place. La tienne est de te conformer à ce que je te dis. La mienne est d'effectuer les ordres du roi Soleil.

– C'est injuste. Pourquoi devrions-nous faire aveuglément ce que le roi demande ? Nous sommes des hommes. Nous savons réfléchir par nous mêmes.

–Écoute Nicolas, le temps n'est pas à la réflexion. On exécute les ordres. C'est tout. Tiens-tu à perdre tes privilèges ?

– Si c'est pour faire ce qui est juste, oui. Je n'hésiterai pas.

– Et bien tu as tort. Je préfère faire ce qu'on demande de moi et vivre confortablement plutôt que faire ce que je désire et vivre dans la misère.

– Chacun son choix.

– Tu ne connais rien du monde extérieur Nicolas, tu ne survivrais pas un seul jour.

– C'est bien le problème. Pourquoi n'ai-je pas le droit de sortir ? De voir comment les gens vivent en dehors du fort ?

– Je fais ça pour ton bien. Alors maintenant, arrête de discuter et mange.

– Je n'ai plus faim.

Pendant la discussion, Nicolas avait fait en sorte de détourner l'attention de son père pour mettre dans ses poches l'essentiel de son petit déjeuner. Il sortit de table et se dirigea vers l'escalier.

– Nicolas, reprit son père, s'il-te-plaît, ne me désobéis pas. Ne vas pas voir notre prisonnière. C'est pour toi que je dis ça.

– Ne vous inquiétez pas père.

Mais le jeune homme en avait assez de suivre les injonctions de son père. Il sortit de la pièce puis pris le chemin des cachots. Il avait pris le soin de prendre une cape avant de descendre et en rabattit la capuche sur ses yeux. Arrivé devant le garde, il dit d'une voix assurée :

– Nourriture pour la prisonnière.

Le garde le laissa passer sans poser de questions. Une fois de plus, il prit une torche et descendit l'étroit escalier qui semblait mener vers le centre de la Terre.

– Qu'est-ce que vous me voulez ? Impossible de faire la grasse matinée dans ce cachot ! Dit la voix d'Ariana. La lumière l'avait réveillée.

– C'est moi, Nicolas, dit le jeune homme. Je t'ai apporté un petit supplément de nourriture.

Il posa la torche et sortit de ces poches ce qu'il avait discrètement subtilisé : une pomme, un petit pain, des gâteaux secs, des morceaux de saucisson, du fromage et une banane. Ariana écarquilla les yeux devant ce que lui tendait le garçon.

– Ce n'est pas grand chose, dit Nicolas, mais je me suis dit que ça pourrait te faire plaisir.

– C'est un vrai trésor ! Je n'ai jamais vu autant de bonnes choses rassemblées !

Ariana prit tout ce qu'on lui donnait et commença à croquer la pomme avec avidité.

– Merchi, dit-elle, la bouche pleine.

– Qu'est-ce qu'on te donne ? demanda Nicolas.

– Un croûton de pain rassis, de l'eau croupie et quelque fois une ou deux pommes de terre.

– Pour la journée ?

– Oui.

– J'ai bien fait de voler ces petite choses alors. Je reviendrai t'en apporter d'autres.

Il s'apprêta à partir quand Ariana le rappela, avec un air inquiet :

– Nicolas ? Tu as fini mon journal ?

– Non, pas encore, je vais m'y remettre.

– D'accord.

Ariana retourna dans l'ombre de sa cellule et Nicolas remonta vers la lumière, hanté par les paroles de la jeune fille. Il n'avait manqué de remarquer qu'elle était plus blanche et plus maigre que la première fois qu'il l'avait aperçue. Il faudrait qu'elle sorte rapidement de sa prison où elle allait finir par se transformer en squelette...

Le Journal d'Ariana [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant