Chapitre 10

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Morgal marchait dans un palais désert. Des fenêtres ogivées qu'il croisait, il pouvait apercevoir le soleil se coucher dans une panoplie de couleurs orangées.

Il n'était pas en Calca, la végétation luxuriante et tropicale lui indiquait qu'il se trouvait dans les régions sud de Fanyarë.

Il s'arrêta : que faisait-il là ?

Instinctivement, il porta la main à son cou, ressentant l'atroce frottement qui lui avait arraché la vie. Était-il dans les limbes ?

Il ne sentait pas le vide que le départ de Malgal avait créé en lui.

Brusquement le son d'un cor retentit dans le lointain. Poussé par la curiosité, il monta un petit escalier recouvert de feuilles mortes et parvint sur un balcon élevé. Il se trouvait en haut d'un château en ruines, construit au fond d'une vallée. Sur le plateau, au loin, il percevait le déroulement d'une bataille. Les cris résonnaient en même temps que les sorts et l'actionnement des armes de guerre.

Il frissonna : jamais il n'avait assisté à un combat de cette ampleur, et même de sa tour, il ressentait la tension et la violence déversée. À quelques lieues, des hommes mouraient, tombaient pour ne jamais revoir les plaines de leur pays.

Morgal fut ramené à la réalité par des hurlements de douleur et de détresse. Ils venaient du château. Il redescendit les marches et s'aventura dans les longs couloirs obscurs, guidé par les gémissements.

Devant lui, une porte entrouverte laissait filtrer une faible lumière. Il se colla à l'ouverture pour observer la scène.

La pièce devait s'apparenter à une chambre abandonnée. Sur un large lit dont les draps partaient en lambeaux, une femme hurlait, les jambes écartées. Du sang imbibait sa chemise sale ainsi que le tissu grisâtre. Non seulement elle accouchait mais en plus, son épaule était démise et un liquide écarlate recouvrait son cou et le début de sa poitrine.

Morgal grimaça de répulsion devant ce spectacle. Aux côtés de la femme, un homme à l'apparence de vieillard, revêtu d'une armure rutilante, l'assistait sans vraiment savoir comment agir.

— Je vais mourir ! hurla-t-elle, le visage marqué par la douleur, débarrasse-moi de ça !

Le prince frémit, ne sachant qui étaient ces deux individus. Ce n'étaient pas des elfes, en tout cas. Peut-être des humains ou des astres. Les deux bâtons magiques qui pendaient dans un coin laissaient plutôt supposer la deuxième option.

— Handelë, murmura la femme dans un râle, tu avais raison, depuis le début... Je suis désolée...

— Ce n'est pas de votre faute, c'est lui le responsable... Il vous a menti...

Il fut interrompu par le gémissement violent de sa compagne, victime de contractions. Son enfant était sur le point de naitre mais elle perdait trop de sang. Ses longs cheveux d'encre balayaient son visage et empêchaient de distinguer les traits de sa face. Elle agrippait son ventre comme pour en chasser l'occupant, la bouche tordue d'une rage effrayante.

Guère rassuré, Morgal recula de quelques pas, ne comprenant rien à ce qu'il voyait. Mais dans sa retraite, son dos heurta un obstacle.

Il se retourna lentement avant de distinguer la grande silhouette démoniaque. Il hurla, en proie à une terreur indomptable. La créature le fit taire par une violente gifle sur la joue ; le sang gicla suite à la lacération des griffes. L'elfe tomba à la renverse, le souffle court.





Une deuxième gifle s'abattit sur son autre joue. Cette fois-ci, il ouvrit les yeux.

— Ce n'est pas trop tôt ! pesta son père, prêt à lui en remettre une.

Gloire et Déchéance - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant