La porte s'ouvrit dans un désagréable grincement. Hervan modela une boule de lumière qu'il laissa planer au-dessus de leur tête et tous deux s'avancèrent dans la longue salle recouverte de dalles poussiéreuses.
Le regard de Morgal se posa au fond, là où Locea, toujours drapée dans ses vêtements fluides, toisait un prisonnier ligoté à une chaise. En s'approchant davantage, il nota qu'il s'agissait plutôt d'une détenue mais son visage demeurait caché sous un sac de toile.
— « Mon Dieu, pourvu que ce ne soit pas Liza... »
De son côté, Hervan le scrutait de ses billes ternes, dénuées d'émotion. Quant au mage, il saisit la main de l'elfe dans la sienne et le guida jusque devant l'inconnue.
— Vous allez me demander de l'achever ? demanda-t-il en cherchant à élucider la situation.
Sur sa chaise, la femme frissonna et tenta de sortir quelques mots mais un bâillon semblait l'entraver.
— La tuer ? ricana le chef de la Confrérie, il se pourrait bien. Mais vois-tu, je préfèrerais que tu comprennes avant la démarche.
D'un signe de tête, il ordonna à Locea d'ôter le sac afin de dévoiler l'identité de la prisonnière.
— Lalith ?! lâcha Morgal.
Il n'en revenait pas : son amie se trouvait là, dans cette cave insalubre. L'envie de la prendre dans ses bras et de lui témoigner toute son affection lui prit mais il se ressaisit, conscient qu'il était toujours face à Hervan.
— Nous l'avons capturée non loin d'ici, expliqua ce dernier, une elfe en Fanyarë, ce n'est pas anodin, n'est-ce pas ? Locea m'a confirmé que cette personne faisait partie de ton passé, est-ce la cas, Chérubin ?
— Non... J'ignore l'identité de cette jeune femme.
— Ah oui ? Enlève-lui son bâillon.
Morgal s'avança maladroitement jusqu'à Lalith. Celle-ci paraissait frigorifiée et terrifiée. Du sang coulait de son front et ses vêtements de voyages s'empourpraient à certains endroits. Une grimace de tristesse parcourut son regard à l'instar de Morgal.
Mais pour lui, la colère transparaissait clairement : comment Locea avait-elle osé divulguer une partie de son passé ?! Ils auraient tous deux une petite conversation par la suite et marqué ou pas, le prince tenait bien à réclamer ses droits.
D'un geste lent, il dénoua le tissu et aussitôt, Lalith s'écria pleine d'espérance :
— Morgal !
Il écarquilla les yeux de panique : Hervan serait bientôt au courant de sa véritable identité.
— Oh Morgal, nous t'avons tellement cherché. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureuse de te retrouver enfin. Mais tu sembles blessé, tout va bien ?
— Lalith, je t'en prie...
— Tu dois rentrer, Morgal. Ta place est en Calca comme ton rang...
Il lui coupa la parole :
— Tais-toi !
Les yeux de son amie s'emplirent de larmes : la déception imprégnait les traits harmonieux de son visage.
— Regarde-là, Chérubin, souffla Hervan derrière son épaule, tu as devant toi ton passé. Toute ta vie, il tentera de te ronger, de t'entraver, de t'empêcher d'atteindre ton but. Tu tiens à cette fille, n'est-ce pas ?
Morgal garda le silence. Le moindre mot pouvait jouer en sa défaveur. Son supérieur posa la main sur son bras et murmura :
— Connais-tu la devise de notre organisation, Chérubin ? Le pouvoir ne s'obtient qu'au prix du plus grand sacrifice... Tes émotions ne sont que barrières face à l'accomplissement de tes ambitions. Et sur ton chemin, tu ne laisseras que désolation ; il n'y pas d'autre voie pour atteindre la puissance.
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Gloire et Déchéance - Tome 1
FantasyMorgal a jusqu'ici vécu dans un luxe débridé sans réellement se soucier des responsabilités qui incombaient à son rang. Issu de la plus haute maison elfique de Calca, il voit sa vie basculer lorsqu'il est envoyé avec son frère jumeau dans une école...