Chapitre 26

29 9 2
                                    

— Alaxos ?

Le frison fit pivoter ses longues oreilles au son de son nom.

Morgal poussa la porte du box et le rejoignit pour lui flatter l'encolure, provoquant un léger hennissement au cheval.

L'elfe vérifia ensuite que sa monture soit en bonne santé et ne manquât de rien : mine de rien, Alaxos restait la seule figure connue dans cette maudite secte. La seule chose qu'il lui restait de Calca. Même ses armes lui avaient été arrachées et de toutes façons, ce n'était pas des objets de valeurs.

En fait, la seule chose qui manquait au prince fugitif demeurait une feuille et un crayon : cela faisait des semaines qu'il n'avait pas dessiné et cela lui manquait. Il verrait s'il pourrait s'en procurer au retour de sa petite escapade. Il comptait bien profiter du calme de la nuit pour oublier sa condition.

Après avoir sellé le cheval, il se hissa sur son dos et le talonna jusqu'à la sortie. Le pont de pierre ne tarda pas à se faire engloutir sous le galop de l'étalon ; un vent de liberté souffla au visage de son cavalier pendant qu'ils s'éloignaient du Manoir.

Pendant près d'une heure, ils traversèrent tous deux la forêt dense, ignorant les cris alarmants qui jaillissaient des frondaisons. Les bois s'ouvraient à eux comme un livre enchanté et la lumière de la pleine lune provoquait le réveil des plantes nocturnes, le long de leur passage. Ils finirent par s'arrêter non loin d'une petite cascade qui se précipitait dans un bassin naturel.

Là, Morgal mit pied à terre et tira la longe de sa monture pour l'abreuver. Il leva ensuite la tête pour observer le lieu emprunt d'un charme indéfinissable. Une note de nostalgie emplissait l'atmosphère et se mêlait aux vols de papillons fluorescents.

Bercé par l'écho mélodieux de la cascade, il s'assit sur un des rochers qui bordait le lac. Petit à petit, l'assoupissement le prit et sa tête retomba sur sa poitrine, vaincue par le sommeil.

Mais il rouvrit immédiatement les yeux, conscient qu'il était idiot de s'endormir dans un endroit si peu sécurisé.

À son grand étonnement, l'aurore avait remplacé la nuit. En l'espace de quelques secondes ?

— Merde !

Encore un rêve. Cela devenait lassant. Mais au moins, il savait où il se trouvait. Pourquoi ne pas suivre les préceptes de cette chère Locea et tenter de contrôler la vision ?

Il se leva de son rocher et commença le tour du lac, laissant Alaxos brouter en paix.

— Jamais vu un rêve aussi ennuyant, souffla-t-il en arpentant les bords.

Mais soudain, ses oreilles se dressèrent : quelqu'un approchait. Il se cacha derrière un tronc et attendit que l'inconnu apparaisse.

Contre toute attente, ce fut un enfant probablement âgé de huit ans, qui se manifesta. Il marchait tranquillement entre les fougères et vint s'asseoir au bord du lac. Morgal fronça les sourcils : ce n'était pas la première fois qu'il croisait un gosse durant ses visions. Peut-être le reflet de sa propre enfance, happée par la mort de Malgal ?

À ce stade, toutes les hypothèses étaient permises. Mais quitte à se trouver coincé dans un rêve, autant tenter d'en apprendre plus.

Il sortit de sa cachette et s'approcha du gamin pour mieux l'observer : pas de signe racial distinctif, vêtements de qualité, mains fines et cheveux propres. Ces derniers, coupés courts, contrastaient avec sa tunique crème par un noir de jais éclatant qui s'harmonisait à la perfection avec ses yeux d'un jade profond. Il se déchaussa et trempa ses pieds dans l'eau glaciale, un sourire naissant sur ses lèvres fines.

Gloire et Déchéance - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant