52. 𝐼𝑛𝑣𝑎𝑠𝑖𝑜𝑛 𝑒𝑛𝑛𝑒𝑚𝑖𝑒

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En média You Can Run - Adam Jones

PDV d'Isis

C'est dans un état lamentable que j'arrive enfin à l'appartement. Encore pire que celui dans lequel je suis sortis de cette cave, si tant est que ce soit possible. En plus de la fatigue physique et musculaire, la charge émotionnelle vient alourdir le poids sur mes épaules. Cette discussion avec mon père, m'a vidé de toute énergie. Tenter de communiquer avec ce dernier, chose que je n'avais pas entrepris depuis très longtemps, s'est avéré épuisant.

L'odeur de tabac froid me suivant comme mon ombre, et les longs sillons noirs qui maculent mes joues, me donnent l'air de sortir de sous terre. Ce qui est un peu le cas si l'on y réfléchis bien. Mes cheveux humides et la senteur de terre mouillée qui s'y échappe pendent misérablement sur mes épaules. Je ressemble à une version horrifique de la belle aux bois dormant, se réveillant après cent ans de profond sommeil.

Ma peau et la teinte bleutée qu'elle est en train de prendre m'indique que je suis toujours aussi frigorifiée, et mon estomac qui gronde, que je meurs de faim. Côté cœur, c'est un maelström d'émotions que je n'ai pas l'énergie d'analyser. Je me sens lessivée. C'est tout juste si j'ai la force de monter les escaliers. Je me hisse péniblement à l'aide de mes bras grâce à la rampe, histoire d'alléger l'effort que j'exige de mes jambes en escaladant ces marches qui semblent interminables. Il faut que je mange quelque chose avant de tomber dans les pommes.

Quand j'arrive au bon étage après cette ascension périlleuse, j'hésite au sujet de la porte à aller ouvrir. Là tout de suite, je ne veux voir personne, mais je n'ai pas vraiment le choix. Il me faut récupérer cette maudite enveloppe.

M'appuyant une minute contre le mur du couloir, j'inspire un grand coup pour tenter de me calmer, avant de me résigner à aller chez les garçons. Je ne prends pas la peine de sonner et pénètre dans le petit logement dont la porte n'est pas fermé à clé. Le spectacle qui m'y attend est loin d'être celui que j'imaginais.

Mon regard tombe d'abord sur sur Nash qui ne semble pas aussi glacial que d'habitude. Mais ce n'est pas ce qui me surprend le plus, car l'ombre d'un sourire plane sur son visage. Pas l'un de ses rictus de psychopathe qui vous fille la chair de poule. Un vrai, de vrai, ou du moins son esquisse. Aiden est à ses côtés et Dylan aussi.

Tous trois ont l'air de passer un très bon moment en fixant un point que je ne vois pas. Curieuse de voir ce qui semble détendre l'ambiance générale à ce point, je m'avance alors d'un pas, distinguant à présent une jeune femme brune. Longiligne, avec des cheveux aussi raide que des baguettes chinoises, elle semble visiblement en plein explication d'un périple fascinant. Tous les regards sont tournés vers elle, et l'assistance est pendue à ses lèvres.

Je remarque ses traits fins et innocents qui me donnent d'hors et déjà envie de la gifler. À moins que ce ne soit le fait qu'elle accapare l'intérêt de tout son auditoire. Monopoliser l'attention est un sport qui m'est pourtant réservé. Les trois crétins qui la soutiennent dans son projet de rébellion ridicule ne m'ont même pas entendu, trop occupés à sourire bêtement. Bien décidé à reprendre ce qui me revient de droit, j'enlève mes chaussures et claque la porte de toute mes forces. Leurs trois têtes se tournent vers moi dans un seul mouvement.

Bingo.

Un conseil de ma part ? Si vous souhaitez faire une irruption remarquée, ce geste simple est une très bonne entrée en matière. En plus d'être facilement réalisable, il annonce tout de suite le ton de la conversation à venir. À savoir : je suis de retour et vous avez intérêt à vous écraser devant moi si vous ne voulez pas que je m'en charge à votre place. Moi qui pensais tomber sur mes coéquipiers morts de trouille après ma disparition soudaine, je les retrouve tranquillement posés sur le canapé. Et en plus de ça, hypnotisés par quelqu'un qui n'est pas moi. La seule pensée qui devrait traverser leurs esprits étriqués est de me retrouver vivante ! Je ne sais pas ce que cette potiche fiche ici mais une chose est sûre, je vais lui faire regretter d'être venue au monde. Je lui réserve d'ailleurs d'hors et déjà une place dans la liste des gens que j'aimerais vider de leur sang.

𝐋𝐚 𝐍𝐞́𝐛𝐮𝐥𝐞𝐮𝐬𝐞 𝐝𝐮 𝐂𝐨𝐞𝐮𝐫 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant