Je ne sais pas comment je suis arrivée là. Sur ce banc devant ma résidence. Il fait nuit et le parking est désert. Seuls quelques lampadaires ici et là me permettent d'observer les alentours. Je suis seule ici. Ma peau frissonne alors qu'il n'y a pas une goutte de vent. D'habitude, le silence m'est apaisant et bénéfique. Ici, il m'angoisse plus qu'autre chose. J'ai l'impression que quelque chose cloche. J'ai un mauvais pressentiment. Je le ressens jusqu'à dans mes tripes.
Mes appréhensions se confirment lorsque je vois des silhouettes approcher au loin. Je crois en apercevoir quatre. Oui, ils sont quatre. Ce sont des hommes. Leurs démarches me paraissent trop agressives pour que je puisse me sentir en sécurité. Ils rigolent et se charrient tout en avançant vers moi. J'essaie de me lever pour m'enfuir et foncer dans ma chambre mais c'est comme si mes fesses étaient scotchées au banc. Mes mouvements sont au ralentis tandis que le groupe de garçons approche encore et encore.
Soudain, je vois l'un d'eux me désigner du doigt. Les autres s'esclaffent d'un rire tonitruants. On dirait presque des hyènes. Le plus petit sautille dans tous les sens alors que celui qui semble être le chef de meute marche avec assurance. Ils sont arrogants et sûrs d'eux. Je suis terrifiée à l'idée qu'ils puissent m'attraper.
Au fond de moi, je sais que c'est ce qui va finir arriver. Je ne parviens pas à bouger. Je suis figée et prisonnière alors que la menace gagne du terrain. Je tremble de tous mes membres et des larmes commencent à couler à flots sur mes joues. Je gémis et grogne en essayant de partir mais rien y fait. Je suis bloquée ici, sans défense ni autre moyen d'échapper à mes ravisseurs.
Et là, je la vois.
Ma mère.
Elle se tient à quelques mètres de moi. Elle me sourit. Elle a vu les hommes mais elle ne fait rien. Elle ne me quitte pas des yeux mais ne me vient pas en aide. Mais que fait-elle ? Elle devrait courir à mon secours. Je suis sur le point de me faire agresser et ma propre mère ne bouge même pas le petit doigt. Elle se contente de sourire en me laissant là.
Mes pleurs redoublent d'intensité au fur et à mesure que le groupe réduit la distance qui nous sépare. Je m'agite dans tous le sens comme une furie dans l'espoir d'échapper à cette soudaine paralysie. Je remue tel un poisson hors de l'eau. Malheureusement, mon corps ne quitte pas ce foutu banc. J'essaie d'appeler ma mère à l'aide mais aucun son ne franchit la barrière de mes lèvres. Elle lit pourtant la détresse sur mon visage mais elle n'agit toujours pas. Son sourire parfait ne quitte pas son visage de poupée.
Elle ne compte pas me sauver. Elle se fiche de mon sort. Il pourrait m'arriver n'importe quoi sans qu'elle ne dise un mot. Je ne compte pas assez à ses yeux pour qu'elle s'intéresse à moi. Le danger qui me guette la laisse indifférente. Elle ne m'aime pas. Voilà pourquoi elle me regarde me débattre sans rien faire. Elle se fout de ce qui pourrait m'arriver. Je pourrais être frappée ou même pire...violée. Ça lui est égal.
Les quatre garçons se tiennent maintenant devant moi. Ils étirent leurs lèvres en un sourire carnassier et là, je découvre des dents rougis par des litres de sang. Leurs regards sont acérés et leurs dents prêtes à déchirer ma peau comme de la charpie.
Cette fois-ci, je parviens à délier mes cordes vocales. Je hurle de toutes mes forces.
-Emery ! Emery, réveille-toi.
On me bouscule frénétiquement.
J'ouvre les yeux et me redresse brusquement en bondissant alors que mon souffle est si court que j'en suis essoufflée.
-Qu'est-ce que...
-Tu faisais un cauchemar, entends-je à ma droite.
Je me tourne vers cette voix enrouée par le sommeil et tombe nez-à-nez avec Cameron.
-Tu vas bien ? me demande-t-il.
Malgré l'obscurité qui règne, je vois l'inquiétude se refléter dans le fond de ses yeux.
-Euh...je...
-Tu n'arrêtais pas de t'agiter en gémissant. Tu m'as fait peur.
-Désolé. Je ne voulais pas...
Un profond soupir sort directement du plus profond de ma cage thoracique. Je passe une main sur mon front trempé de sueur. Mes muscles sont douloureux. Ils me font mal d'avoir sûrement été trop crispés. J'ai besoin de quelques minutes pour reprendre mes esprits et retrouver un rythme cardiaque normal. Je ne fais que réaliser que tout ça n'était qu'un cauchemar.
-Ça avait l'air si réel, murmure-je presque pour moi-même.
-Tu me veux me raconter ?
Je plante mon regard dans le sien bien que l'obscurité m'empêche de voir distinctement son beau visage. Je perçois néanmoins toujours cette lueur inquiète dans son regard. Ce n'est qu'une sensation furtive mais je l'ai bien vu. Ça, c'était bien réel.
-N...non, réponds-je dans un souffle. Pas maintenant. Je veux juste oublier et me rendormir.
-Très bien, comme tu veux. Ça peut attendre demain.
-Merci.
-Allez, viens-là.
Cameron m'ouvre ses bras dans une invitation à m'y blottir. Je fonce me réfugier contre lui. Il m'entoure et me presse contre son torse. Ses mains tracent des cercles imaginaires dans mon dos alors que nous nous allongeons confortablement sans nous détacher l'un de l'autre. Ses caresses me rassurent. Son parfum m'enivre d'un seul coup. Je me sens chez moi. Il parvient à me réconforter sans dire un mot. Les battements de mon cœur retrouvent finalement un rythme correct. Je me détends grâce à cette étreinte au pouvoir apaisant.
C'est à cet instant que je réalise que cette place est la mienne. Je ne voudrais être nul part ailleurs. Cameron est comme l'ancre qui me tient dans le monde réel. Je me sens complète à ses côtés. Et la façon dont il s'inquiète pour moi et se charge avec tant de douceur de me consoler me prouve que j'avais raison. Il ressent quelque chose pour moi, c'est indéniable. Il ne serait pas aussi tendre et préoccupé de mon état si ce n'était pas le cas. Il n'a pas prit la fuite comme il l'a déjà fait tant de fois.
Cette fois-ci, il me montre que je peux compter sur lui et prendre appuie sur son épaule quand ça ne va pas. Je suis sûre de moi, à présent. Nous pouvons construire quelque chose de vrai et de solide ensemble. Nous en avons le pouvoir entre nos mains. Il suffit juste d'avoir confiance en nous et d'exploiter ses sentiments qui grandissent en nous.
Blottie au creux de son épaule pendant qu'il me transmet sa chaleur, je pose ma main sur son torse là où son cœur bat. L'entendre résonner contre mon oreille est particulièrement apaisant. Je me concentre sur ces boums qui me procurent la sérénité qui me manquait.
-Merci, chuchote-je.
-De quoi ?
-D'être là.
Son étreinte se resserre et sa bouche baise mon front.
-Je n'irai nulle part.
C'est grâce à lui que j'arrive à retrouver le sommeil malgré cet affreux cauchemar qui en dit long sur ce que je pense de ma mère. Heureusement, Cameron est là pour faire taire les questions que je me pose irrémédiablement. Son contact me plonge de nouveau dans les bras de Morphée.
Je m'endors paisiblement et, cette fois-ci, je rêve de lui. De nous. De cette nouvelle aventure, risquée mais terriblement excitante, dans laquelle nous venons de nous lancer.
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THE WAY - LA RENCONTRE
RomanceEmery Carlson a toujours tout planifié dans sa vie. Tout est organisé au millimètre près. Elle respecte scrupuleusement toutes les règles qu'elle se fixe et n'abuse jamais des vices de la vie étudiante. Bienveillante, amicale et toujours soignée, el...