19 h 00
Ma journée vient de s'achever. J'ai bien tenu, même si je pense que mes clients ont du s'apercevoir de mon piteux état. Je clos mon agenda dès que j'ai fini de relire tous les nouveaux rendez-vous inscrits dedans. Je me sens vidé, incapable de faire du bon boulot, de séparer le privé du professionnel. Tout est insurmontable.
Je me rends à l'accueil pour y déposer mon agenda sur le comptoir. C'est alors qu'en m'apprêtant à partir, je relève la tête et croise les yeux de Kaya. Un malaise palpable plane entre nous. On se fixe bêtement tels de véritables zombies. Son expression est indescriptible avec ses lèvres légèrement pincées, comme si elle se sentait honteuse, ses perles bleues deviennent une véritable panoplie d'émotions : inquiétude, compassion, tristesse, gêne et autres. Pire qu'un gribouillage.
Finalement, cela m'agace, me contrarie. Je suis égaré en perte de contrôle total, de mes sentiments comme de ma vie, donc des perles bien salées et amers dévalent sur mes joues, ne pouvant plus les contenir. Mon ancienne alliée accoure vers moi souhaitant me réconforter, mais je refuse catégoriquement et je recule en titubant comme un alcoolique, alcoolique de souffrance en ce moment. De suite, je fuis vers la sortie, laissant mon corps courir sur quelques mètres avant de m'arrêter. Je suis dans état minable, un véritable pleurnichard. Les gens me regardent bizarrement, ce qui me fous encore plus mal, car j'ai horreur d'être vu dans cet état ou d'attirer l'attention comme ça. Soudain, une bonne vielle habitude se réveille et s'empare de moi, ne sachant plus quoi faire pour m'apaiser, j'attrape alors mon tel et appel mon meilleur ami, exactement comme je faisais lorsque tout avait dégénéré, lorsque je parasitais sa vie, de jour comme de nuit. Il avait tout su géré et cela malgré qu'on était jeune. Il avait endossé le poids d'un rôle bien trop lourd pour une personne, et voilà que cela allait recommencé. Voilà qu'il allait sûrement devoir encore supporter mes crises, mes pleurs et mes conneries.
Enfin, il décroche. Je ne laisse aucune possibilité à mon bridé de parler en lui demandant avec précipitation :
" T'as finis ton boulot ?
- Heu oui, fin dans 5 minutes j'aurai totalement fini. Pourquoi ? Ça va pas vieux ? questionne t'il avec appréhension, pressentant sans trop de difficultés mon état.Dès que tu finis, rejoins-moi près de mon boulot s'il te plait. Je me trouve à l'angle de la rue. On sortira dans un bar, repris-je, avec toujours ce TGV sortant de ma bouche.
- D'accord. Je me grouille et je te retrouve. Tu ne bouges pas d'un poil c'est clair Dydy ? conclut-il avec une voix typique de papa poule.
- Oui, juré. Allez salut." dis-je.
Je m'apprête à raccrocher, lorsqu'il m'interpelle à nouveau :
" Dydy, pas de connerie, je t'en prie, me supplie t-il, laissant transparaître une certaine vulnérabilité chez lui.
- Hmmm.". Je lâche un son inintelligible en approbation, puis je coupe l'appel et demeure pantelant, en plein milieu du passage.Les passants m'ignorent, quelques peu soulés de devoir me contourner, tandis que le temps lui passe et me rattrape. Tout ce qui a été refoulé me rattrape, me torture et m'oppresse, tellement que je peine actuellement à garder une respiration régulière. Je décide donc de me mettre à regarder autour, cherchant une ancre dans le décor à laquelle me raccrocher, me maintenir à la surface. Il faut que je me distrais. Cependant, je n'ai pas pensé une seule seconde pouvoir l'apercevoir en face de moi, et qui plus est, que cette ancre se révèle être lui. Le blondi que je ne sais plus comment voir, croire ou encore à qui quoi dire. En fin de compte, face à lui, je suis faible, je suis incapable d'exploser, alors que j'me suis répété plusieurs fois, dans ma tête, le speech à lui cracher. Je murmurer son prénom, sans réellement le faire consciemment, plus comme quelque chose d'instinctif, de naturel, de nécessaire pour mon être : " Thomas ?". Parvenu à ses oreilles, tel un écho, il se met à s'avancer vers moi d'un pas apeuré et déterminé à la fois.
Je me permets de le scruter, lui qui est simplement vêtu d'un débardeur et d'un jean accompagnés d'un gros gilet en tricot noir, tombant sur ses épaules. Ses cheveux sont décoiffés, sa bouche légèrement entrouverte, son torse se soulève rapidement, comme le mien, sauf que lui parait être essoufflé. Vient-il de courir ?
Nous sommes à quelques centimètres l'un de l'autre, s'enfermant dans un dimension à part. Moi avec le " malade psychopathe", responsable de mes malheurs. Du moins, tout pointe dans sa direction en le désignant comme tel, tout en semblant, dans un même temps, le déculpabiliser. En vrai, à cet instant, en me perdant dans ses perles de marbres, je doute. Mon coeur me hurle, presque à la mort, que ce n'est pas lui. Thomas n'est pas celui qui fait tout ça : ni ces lettres, ni ces appels.Je me sens déchiré intérieurement, une guerre s'engage en moi.
Exaspéré et frustré, je soupire de manière rageuse, passant ma main dans mes cheveux, tandis que je réfléchis à un moyen e lancer la conversation pour éclaircir la situation. Or, en voyant de multiples marques violacées sur son cou, ses épaules , ainsi que quelques égratignures sur son visage, j'abandonne toutes réflexions le saisissant violemment. Je le force à me laisser voir, le retournant presque dans tout les sens pour l'inspecter, alors qu'il se débat pour s'écarter de moi. Il me hurle de le lâcher, à s'en déchirer les cordes vocales, jusqu'à ce que je saisisse son visage entre mes mains, ce qui aussitôt le paralyse. Il se tait, laissant couler une larme symbolique sur sa joue, celle qui me confirme que la thèse d'un Thomas innocent est possible. Mes pouces se mettent à caresser délicatement ses joues, et enfin, je me lance, lui parlant d'une voix prise entre douceur et rage :
" Thomas, dis moi la vérité. Je comprends rien, je suis paumé là. Qui t'as fait ça putain ? Les hommes, dont tu parlais la dernières fois, ils sont revenus ?
- Me déteste pas s'il te plait. Dylan, ne me déteste pas, je t'en prie.". J'essaie de la calmer du mieux que je puisse, lui redemandant encore et encore qui lui avait fait ça, mais il ne fait que répéter en retour cette même phrase. Toujours plus enfermé dans notre bulle, je ne capte rien et me laisse contaminer par sa détresse, qui s'ajoute à la mienne. Je perds rapidement tous mes moyens et l'enlace, ne sachant plus du tout quoi faire. Étonnamment, il m'entoure de ses bras, qui tremblotent, me serrant fort comme si sa vie en dépend. Il ose même nicher sa tête dans mon cou.On reste ainsi, ne voulant plus se lâcher. Je m'aperçois qu'il m'a sincèrement manqué, pas en tant que patient, non en tant que personne à part entière de ma vie, en tant que Thomas.
Or, tout à coup, toute cette scène s'achève dès que Ki Hong arrive. Il braille mon prénom, ce qui fait sursauter le blondinet dans mes bras, qui se tourne en sa direction. C'est alors que les deux, se voyant distinctement, se statufient et font les gros yeux comme. Je les observe, plongé dans une énième incompréhension qui rallonge la liste de ces derniers jours. Aucune tension ne règne, aucune hostilité entre eux, juste de la surprise. Mon ami s'apprête à lui adresser la parole, quand mon patient quitte mes bras et s'enfuie, si vite qu'on ne peut le retenir. Nous le regardons disparaître au loin, parmi les gens. Même si je suis secoué de ce qui s'est passé depuis les dernières 72 h, j'use le reste d'énergie que je possède pour lui demander :
" Tu le connais ?
- Heu ouais. Pas énormément, mais ouais, répond t-il encore stupéfait de cette rencontre.- Explique toi, putain, dis-je, agacé de cette phrase vide de contenu
- Ce mec, je l'ai sauvé il y a de cela plusieurs années d'une agression et ..., il s'arrête comme foudroyé par une illumination avant de reprendre, Putain ! Je sais d'où je connais Bryan !"
Quand est-ce que toute ces révélations vont s'arrête ?
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Dementia
FanfictionDylan n'a plus d'autre choix que de se trouver un nouvel emploi dans un nouveau cabinet de psychologie, étant donne que sont stage vient de s'achever. Mais deux restrictions obligatoires se présentent a lui : - La première, disant que le cabinet doi...