Envie VS Raison

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PDV N :

J'étais assis dans ma voiture, sans toutefois allumer le moteur et démarrer. Je venais de finir mon travail, alors je me préparais à rentrer, mais... j'avais une envie plus profonde.
Celle de revoir Touko.
Malgré moi, j'en avais terriblement envie. Alors, me voilà à attendre comme un idiot devant son lycée, pendant que les gouttes de pluie tombaient sur mon véhicule.
J'avais une bonne excuse pour la ramener, au moins.
Je regardais par ma fenêtre pour guetter son arrivée, dans un silence affreux dans lequel je pensais à son potentiel refus. Me faire rembarrer n'était pas vraiment dans mes plans, et pourtant je le redoutais.
Ray aurait enragé s'il savait. J'étais désolé, mais la tentation était trop forte. La culpabilité venait malgré tout s'installer en moi, comme si l'âme perdue de mon grand frère se tenait à mes côtés, fulminant de colère en me voyant ainsi attendre la fille qu'il aimait. Pourtant... je ne bougeais pas. Je me savais égoïste, mais pas à ce point.
Mon regard se perdait dans la glace transparente qu'était la vitre, et l'eau tombait doucement, alors que chacune de mes expirations faisaient une petite buée dans l'air, preuve de la différence de température entre dehors et... moi. J'avais un rythme cardiaque lent, démontrant à quel point j'étais calme. Mes cheveux verts me tombaient devant les yeux, et je remis en place ma casquette noire et blanche en appuyant dessus.
Une sonnerie forte retentit dans tout son bahut : la fin des cours. Malgré la pluie, je sortis de ma voiture en claquant doucement sa portière, avant de vérifier tout autour de moi. J'entendais des conversations, vis les élèves sortir un par un, les professeurs soupirer, les imbéciles rire du malheur des autres, les pestes se moquer du maquillage ou des vêtements de filles qu'elles jugeaient inférieures. Mais parmi tous... se trouvaient la jeune fille aux beaux cheveux bruns attachés en une queue de cheval, casquette sur la tête, toujours vêtue de cette veste sur ses hanches fines en sablier. Elle souriait et riait aux éclats, ce qui la rendait bien plus rayonnante que lorsqu'elle pleurait. Je vis la fille également de l'autre jour, mais elle se dirigea vers une direction autre : je reconnus l'espace professeurs.
Son père ou sa mère devaient exercer ce métier ici.
C'était ce que je supposais, alors je n'y fis pas attention. Touko était accompagnée à présent de la dénommée Mei, que je reconnaissais aussi, et...
Une actrice ? Qu'est-ce qu'elle fout avec une star ?
Je fronçais les sourcils, décontenancé, et fis un petit sourire quand elle m'aperçut. Elle se dirigea vers moi, méfiante, pendant que la tête aux chignons allait vers son bus. Serena partit quant-à elle avec des grands pas, et j'hésitais à la remercier de nous laisser seuls. Elle allait retrouver un garçon qui avait l'air complètement blasé et qui avait son visage neutre, sûrement pour dissimuler sa nervosité, alors qu'elle passait son bras sur ses épaules larges. Il soupira, avant de s'éloigner de plusieurs mètres. Je replaçais alors mon attention vers la tête brune en face de moi.
- Salut.
Touko : Salut. Mais... qu'est-ce que tu fais ici...?
- Je te ramène ?
Touko : Je peux prendre le bus, tu sais ? Alors pourquoi...?
- Parce que j'avais envie, Touko.

Elle me regardait, mal à l'aise.
Je crois que ça veut dire non.
Je pensais qu'elle allait partir, mais elle pouffa de rire, pendant que je sentais mes cheveux incroyablement mouillés et mes vêtements complètement foutus.
Touko : Merci. Je veux bien.

Je grimpais dans ma voiture, attendis qu'elle s'installe, puis démarra. Le trajet fut incroyablement silencieux, mais j'avais l'agréable sensation d'être épié. Peut-être étais-je un psychopathe pour trouver cela agréable, car n'importe quelle personne normalement constituée aurait été gênée.
Je m'arrêtai devant chez elle, coupa le moteur avant de la laisser sortir, déçu que ce soit déjà terminé.
Touko : Viens, il reste du gâteau de Flora et ma mère n'est pas fane du chocolat, je finirai jamais tout ça toute seule. Pour... te remercier.
- Ben... merci ?

Elle tourna les talons alors que je la suivais.
Là par contre, la situation est gênante.
Je rentrai alors pour la deuxième fois dans sa maison : je revis alors ces tapisseries japonaises sur les murs, ces meubles vieillots mais élégants, ces décorations simples mais bien choisies.
J'hésitais à rester sur le seuil de la porte, vu mon état : j'étais trempé de la tête aux pieds.
Voyant ceci, Touko leva la main en direction d'une porte.
Touko : Tu peux aller te doucher, si tu veux. Je serais mal si je te laissais comme ça, et ma mère m'aurait tuée.

Je souris et la remercia timidement avant de retirer les chaussures de mes grands pieds ( je faisais du quarante quatre ) et les déposer soigneusement sur le côté. Je retirai également ma casquette, pendant qu'elle me tendait une serviette et des vêtements larges dans lesquels j'allais sûrement paraître énorme car ils devaient appartenir à son paternel. Je filai me laver, et me rendis compte d'une chose : le savon que j'allais utiliser était le même que le sien, donc en bref...
J'allais avoir la même odeur qu'elle.
Mes joues chauffaient, et je finis par sortir de ce confort qu'était l'eau brûlante. Un parfum sucré, qui semblait être de la fleur d'orangé, était dans la pièce et désormais sur moi.
J'enfilais les vêtements avant de la rejoindre au salon. Elle, elle n'était plus mouillée depuis.
Elle me présenta une chaise sur laquelle je m'installai doucement, le corps encore plein de courbatures douloureuses. Elle sortit ensuite une assiette, avant de me mettre une part de gâteau, puis fis ensuite de même pour celle-ci.
Nous mangions en silence, jusqu'à ce que je le rompe.
- Tu vas mieux, au fait ?
Touko : Depuis que tu es venu, oui. Je te remercie de m'avoir consolée, au fait.
- Le plaisir était pour moi.
Touko : Alors, tu ne me détestes pas ? Alors que c'est... comme si c'était moi qui l'avais tué ?

Je la dévisageai, elle et son air triste. Elle était tellement jolie quand elle souriait, alors cela me déprima. J'avais l'impression de faire ressurgir que des mauvais souvenirs en elle, et que je ne pourrai jamais la faire rire.
C'est ton châtiment... N.
- La ferme, Ray. Tu n'es plus là. Arrête.
Tu me l'as bien volée, non ?
- Tu es mort. Si ce n'est pas moi, un autre le fera.
Et bien je préfère que ce soit un autre. Tu m'as trahi, N.
Je menais un combat intérieur. Il était vrai que tenter de flirter avec elle n'était pas quelque chose que j'aurais dû faire. Pour grand-frère. Mais entre raison et envie, qui allait gagner ?
Je tirais les joues de la fille des deux côtés.
- Non. Je ne te déteste pas, Touko.

Elle ouvrit des yeux surpris, avant de tirer ses lèvres en, finalement, un sourire.
Touko : Merci, N.
- C'est la première fois que tu dis mon prénom.

Ces mots, qui m'avaient moi même étonné, étaient sortis tout seuls. Je détournais les yeux.
Touko : C'est vrai, maintenant que j'y pense !

Elle s'étouffait de rire avec son gâteau dans la bouche avant de tousser bruyamment, devant mon regard jugeur.
- Apprends à manger, Touko, tu en mets partout...

Elle regarda autour d'elle, prit en une gorgée le contenu de son verre pour se réhydrater et s'affola en voyant toutes ces miettes par terre. Je soupirais, avant de prendre un balai et rassembler ses bêtises éparpillées.
Touko : Désolée.
- Remercie-moi, ne t'excuse pas.
Touko : Alors merci.

J'admets que j'étais particulièrement fier de ma réplique que j'avais faite sans vraiment réfléchir : son visage rayonnait.
Ouais, elle sourit, mais qui sait si elle pense pas à moi là maintenant en te regardant ?
- La ferme, Ray.
Tu le sais très bien pourtant... ce n'est pas toi qu'elle voit.
Mon visage s'assombrit. C'était vrai, ce que me disait ma conscience... elle ne faisait que voir Ray en moi. Nous nous ressemblions fortement physiquement malgré nos caractères différents. Malgré nos personnes différentes.
- Il faut que j'y aille. Merci pour le gâteau.
Touko : Hé. Je voulais te demander.
- Oui ?
Touko : J'ai deux places pour un parc d'attraction. Le jour du karaoké de classe. Mais vu que c'est pas mon truc et que les filles y vont, est-ce que tu veux... bien venir avec moi ?

Je réfléchissais. L'idée me plaisait bien , mais mon conflit interne se poursuivait. Aller, accepter, l'envie, ou renoncer, la raison ?
- Volontiers.

Désolé...

L'envie remporte la première manche.

Coucou ! Voici mon chapitre sur Touko et N, du point de vue exclusivement de N.
Bisouuus

Le coeur à L'ouvrage Où les histoires vivent. Découvrez maintenant