Le coeur à L'ouvrage

Prise de Conscience

Coucou ^^ sur ce chapitre, il y aura des d'alternances entre Kalem et Serena ^^

PDV SERENA :

Je souriais amicalement mais faussement à ceux qui me souhaitaient le bon appétit. Cela faisait très exactement quatre jours depuis le karaoké, et mon état se dégradait jours après jours. Kalem ne m'avait plus reparlé depuis ce jour là. Ne m'avait plus approché. J'en étais venu à la conclusion que Trovato avait raison : il ne m'appréciait pas. Pas même un peu. J'étais profondément vexée qu'il ne me l'eut pas dit en face. Submergée d'un sentiment profond de regrets et d'autre chose, que je ne pouvais identifier, je m'arrêtais de sourire pour tenter désespérément de dessiner, quitte à même sauter le repas.
Les dessins de Kalem étaient magnifiques. J'aurais bien aimé qu'il m'apprenne...

PDV KALEM :

Trovato : C'est quoi ce truc ? Immonde.
- Lâche-ça. J'y tiens.
Trovato : Tu parles, toi ? Pour un vulgaire dessin ?
- Lâche-le.
Trovato : Un dessin de Serena ? Endormie ? Ooooh, c'était quand vous étiez dans le garage... t'es un psychopathe en fait !

Je tendis le bras pour le récupérer, mais dans la peur de le déchirer, je le rabattis immédiatement.
Pourquoi, comme il disait ? Ce n'était qu'un dessin, je pouvais en refaire un...
oui mais... pas un de son visage endormi... c'était mon souvenir que j'avais dessiné...
Trovato : Tu t'es approché d'elle pendant que je n'étais pas là ?
- ...
Trovato : Ah, oui, j'avais oublié... je t'ai bien trop occupé. Quel dommage !

Ce n'était pas faute d'avoir essayé, pourtant. Mais chaque fois que j'essayais de lui parler, pris d'une soudaine envie, Trovato ne m'en laissait pas l'occasion : il la tirait pas le bras, lui parlait, et quand il ne pouvait pas, me frappait. Cette situation me rendait malade.
Ce qui était incompréhensible, c'était pourquoi j'étais le seul à ne pas pouvoir. Tous lui souriaient, la touchaient, mais moi, elle m'était inaccessible. Chaque fois que je la voyais entourée, j'avais moi aussi envie de les rejoindre et l'approcher à ma guise.
Nous étions opposés. Pourquoi ? J'avais vu de moi-même ce que l'amour avait causé au dénommé Hugh. Je n'avais pas envie de vivre la même chose...
Trovato : Réponds quand je te parle.
- Mmm ?
Trovato : Tu n'as pas écouté ? Tant pis pour toi.

Il prit ma feuille entre ses doigts, et déchira celle-ci miettes par miettes sous mon regard figé. Les morceaux tombaient lentement sur le sol sec poussiéreux. En même temps qu'il déchirait mon souvenir, j'avais l'impression que c'était moi que l'on tranchait.
- Non...

À genoux, je ramassais tout ce que je pouvais pendant que le rouquin fit demi-tour, sûrement dans l'espoir de retrouver celle qui dorénavant était à des lumières de moi. J'avais beau essayer, il était impossible de réparer ce qui venait d'être perdu.
Ce n'était qu'un dessin. Ce n'était pas important. Alors pourquoi? Pourquoi essayer de le recomposer ? Pourquoi... pourquoi est-ce que je pleurais ?
Les gouttelettes venaient s'ajouter au désastre. J'appuyai sur ma casquette que j'avais exceptionnellement mise pour cacher mon visage.
C'était la première fois que je craquais, me semblait-il. Je pensais sérieusement à sécher le prochain cours, je ne voulais surtout pas qu'on me voie. Pas elle, plus précisément.

PDV SERENA :

Il n'est pas là... il sèche ?
Le poing sous mon menton, jambes croisées, je fixais sans interruption la table et la chaise vide de Kalem, sur laquelle se trouvait son sac de sport qu'il avait sûrement oublié. Monsieur Lysandre faisait un monologue en reprenant les phrases de grands poètes, comme à son habitude, et seul changement, Gloria s'installait désormais à côté de Mei, Touko, ou encore Flora. Moi aussi, de temps en temps. Elle n'était plus seule, mais passait le plus clair de son temps avec le sosie masculinisé de Sally, qui depuis l'incident au karaoké semblait au meilleur de sa forme.
Contrairement à moi, en tout cas.
Kalem... j'aimerais m'excuser, mais c'est impossible.
Trovato : On rentre ensemble ?
- Hein ?
Trovato : Tu es dans la Lune ? Désolé d'interrompre tes réflexions, je te demandais juste si...
- Non, je vais rester là plus longtemps.
Trovato : Ah ?
- Désolée.

Il partit, comme tous les autres, me laissant seule dans cette pièce vide. Dans cette pièce dans laquelle, inconsciemment, j'avais choisie pour craquer.
Il n'était pas revenu...
Je commençais à désespérer. Après tout, ma présence n'avait jamais gêné personne. Pourquoi lui ferait-il exception ? Et pourquoi s'accrocher ?
Aaaah, j'ai compris. Je suis bête. C'était cliché, quand même, les filles qui tombaient amoureuses de l'inaccessible. J'étais une idiote aussi, alors.
Moi qui avait toujours détesté ce genre de personnages, j'étais là, à dorénavant pouvoir me mettre à leur place.
Je me penchai vers la table de Kalem, avant de voir quelques gribouillages sur sa table.
- Quel imbécile. S'il se fait attraper, il est cuit...

Un peu partout se trouvaient des dessins de visages des gens de la classe au crayon à papier. Ils étaient très bien faits, mais ceux qui allaient nettoyer allaient s'arracher les cheveux.
Un imbécile, certes, mais il était fort...

PDV KALEM :

Je me décidais enfin à revenir en classe récupérer mes affaires en séchant mes yeux larmoyants et en reniflant.
Mes parents allaient me tuer en rentrant vu finalement toutes les heures de l'après-midi que j'avais raté intentionnellement. Bon, tant pis. Je refusais de montrer ce spectacle pathétique à quelqu'un, ça se comprenait... je croyais .
J'ouvris la porte coulissante de notre salle de classe, retirant ma casquette... mais j'entendis alors des sanglots étouffés.
Mince... il y a quelqu'un.
J'avançais silencieusement en calmant ma respiration toute aussi saccadée que celle de la fillette, avant de me rendre compte de la personne que j'avais en face de moi.
- Serena...

Son nom avait été difficile à prononcer, comme si je ne le méritais pas. Ce n'était qu'un murmure, elle ne m'avait pas entendue. Mais en même temps, du point de vue de l'Ange, il rimait avec une note juste et pure.
Va la voir... il n'y a pas Trovato...
Mais non... je ne pouvais pas. J'allais perdre mes moyens... mais j'en avais envie... pourquoi pleurait-elle ? Était-ce ma faute ? Non, ce serait prétentieux de penser ça. Je n'étais personne, rien de plus qu'un jouet pour elle, un jouet jetable mais réutilisable à souhait. Nous étions opposés. Elle était sociable. Souriante. Belle. Qu'étais-je à côté ? Si ce n'est qu'un tas microscopique de feuilles colorées de noir et de blanc, je ne voyais pas.
Je tendis mes bras avec hésitation vers son épaule, mais comme tout à l'heure, je le rabattis. J'avais beau essayer, mon corps bougeait, mais ma conscience me faisait stopper tout geste.
Je voulais... essayer. Même si elle faisait ça à tous... je voulais...
je voulais l'aimer, moi aussi.
Cette fois, sans que rien n'interrompe ma lancée, mes bras s'enroulèrent par eux-mêmes avant même que je ne m'en rende compte autour de ses fines épaules. Je la rapprochais de moi, avant de poser ma tête contre son cou.
Pardon, Serena.
Serena : Ka... lem...?
- Mmm ?
Serena : Pourquoi ?
- ...

Je ne pouvais pas répondre à cette question soudaine, du moins physiquement. Parce que mentalement, la réponse m'avait été imposée, elle avait été gravée sur ma peau, mes os, en moi tout simplement.
Parce que je t'aime, Serena.
Serena : Tu ne veux pas me répondre, alors va-t-en.

Elle me poussa délibérément, mais je la rattrapai aussitôt.
- Ton état... c'est...
Serena : Entièrement ta faute.

Mes yeux s'agrandirent sous le choc.
Pourquoi... est-ce ma faute ?
Les mots me brûlaient la gorge, mais rien n'osait sortir pour le moment. J'étais figé dans mes propres mouvements.
Serena : Réponds au moins à cette question. Et sois honnête. Tu me détestes, non ?
- ...

Non. Je ne te déteste pas.
Pourquoi ces mots refusaient de sortir ? Parce que comme tout à l'heure, ça revenait à déjà me déclarer ?
Serena : Bien. Je comprends. Je suis désolée de t'avoir imposé ma présence...
- Serena... attends...

Elle tourna les talons avant de sortir en pressant le pas.
- SERENA !