Chapitre 15 : Métamorphosée

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Je pousse la porte d'entrée avec un soupir.

- Bonj ...

Je suis interrompue par des cris, ce qui n'a rien d'inhabituel.

- Mais tu n'es jamais là pour nous, ton boulot passe avant ta famille !

- Non ! Je suis simplement sur une affaire très sérieuse et importante, nous sommes en sous-effectif, je n'ai pas le choix.

En ce moment, je les entends se disputer de plus en plus régulièrement. Et chaque fois, j'évite le sujet et je fais comme si rien ne s'était déroulé. Je vois que les cernes sous les yeux de maman se dessinent de plus en plus. Moi, je joue la fille innocente qui ne se rend compte de rien.

- Tes journées au lycée se passent bien ? Tes notes sont bonnes ? me demande maman pour changer de sujet au moment du repas.

- Oui.

Oui pour la deuxième question, pour la première, c'est plus discutable, mais elle n'est pas obligée de le savoir.

- C'est bien.

Je vois qu'elle n'est pas très en forme et qu'elle semble encore remuée par les paroles de papa. Qu'est-ce qui pourrait lui remonter le moral ?

- Tu veux qu'on se fasse une soirée ? proposé-je enthousiaste.

Elle hausse un sourcil.

- On doit manger quoi ? demandé-je.

- Des restes et puis je vais décongeler un ...

- Non ! On commande des pizzas et on se met devant un petit film.

- Lisa, tu as cours demain.

- Mais j'ai aussi 16 ans maman !

Elle semble hésiter. Ce genre de folie ne nous arrive absolument jamais.

- De toute façon, je ne te laisse pas le choix ! m'exclamé-je en attrapant le téléphone pour commander.

En l'espace de quinze minutes, maman passe du stade sceptique et réticente à motivée et joyeuse. Quand le livreur sonne, elle lui ouvre immédiatement et lui laisse un généreux pourboire. Je souris en la voyant de meilleure humeur.

- C'est vrai ça ! Ce n'est pas parce que papa n'est pas là qu'on n'a pas le droit de se faire plaisir ! dit-elle en ouvrant les cartons.

J'éclate de rire.

Le film démarre. Nous sommes captivées et nous n'entendons même pas papa rentrer vers vingt-trois heures.

- Qu'est-ce que vous faites là ? demande-t-il en voyant le salon plongé dans le noir, nous deux emmitouflées dans des plaids et nos visages éclairés par la télé, sans compter les cartons de pizzas qui gisent encore sur la table basse.

Je baisse le son.

- J'ai raté un épisode ? lâche-t-il, visiblement sous le choc.

- Oui, mais regarde la fin avec nous on parlera plus tard, lui dit maman en tapotant la parce à côté d'elle.

Papa et moi échangeons un regard mi-surpris, mi-amusé, cette soirée semble l'avoir métamorphosée.

Le lendemain, je me lève plus légère que d'habitude, on peut dire que la soirée d'hier a été un succès et j'ai entendu mes parents parler calmement jusque tard le soir. Quand je suis prête, j'enfile mon manteau car nous entrons dans le mois de novembre qui apporte avec lui le vent froid et les gelées du matin puis je sors.

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