Chapitre 11 : Soit je le hais soit je l'aime

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On marche quelques mètres côte à côte et je prends bien soin de garder mes distances.

- Lisa, il faut qu'on se parle et cette fois pour de bon, qu'on se dise tout.

Impuissante, je hoche la tête. Après tout, peut-être qu'il a raison. Nous ne pouvons pas continuer comme ça. Il est peut-être temps de mettre cartes sur table, même si ça fait mal, et même si ça finit mal.

- Explique-moi, dit-il. Mais cette fois, vraiment tout.

- On peut s'assoir avant ?

Je n'ai jamais été très à l'aise à parler debout et puis ces quelques minutes à trouver un banc, sont aussi un moyen plus ou moins subtil de gagner du temps.

Par contre, une fois ma requête faite, une fois que nous sommes installés non loin du lycée, je me retrouve au pied du mur.

- Je vais reprendre depuis la soirée.

- Quelle soirée ? Celle où tu espionnais ?

- Oui celle-ci.

Je déglutis.

- Je ne t'ai pas tout dit à propos de cette soirée, cette nuit plutôt...

- Je t'écoute.

- J'ai vu l'homme qui a posé la bombe, je l'ai reconnu. Sur le coup, je n'arrivais pas à savoir qui il était mais j'avais déjà vu son visage quelque part. Comme tu le sais, papa est allé avec moi retirer la bombe, il était bizarre, ça ne semblait pas le surprendre plus que ça... Quelques jours après, il est... mort... et il se serait battu avec Laurent Viallon.

- L'homme que tu as vu à la soirée, devine Julien.

- Justement non ! Ce n'est pas lui.

Il fronce ses sourcils.

- Je ne savais pas qui c'est. Maintenant oui. Mais... mais je ne peux pas te révéler son identité. J'ai trouvé les papiers de papa et il y figure.

Il hoche la tête.

- Et quel est le rapport avec moi ? demande Julien.

- Tu ne vois pas ? Ma vie n'est pas ordinaire, je passe mon temps à essayer de comprendre en vain. Je ne veux pas transmettre ce doute autour de moi, je fais du mal aux gens que j'approche. Je suis toxique.

Son doigt se pose sur mes lèvres pour m'interdire de continuer.

- Arrête de dire n'importe quoi.

Je baisse les yeux. Il ne faut pas que je craque ! Il ne faut pas que je le laisse revenir dans ma vie, je risque de le regretter.

- Je t'avais fait promettre de ne plus me rejeter, tu n'étais pas censée me repousser sous prétexte que c'est pour me protéger, dit-il.

Mon cœur a envie de fondre mais je lui interdis, je lui ordonne de rester de marbre.

- Je tiens à toi et... commence-t-il.

- J'en suis incapable, coupé-je.

- Incapable de quoi ?

- Incapable d'aimer, incapable de m'attacher.

Mes yeux se remplissent de larmes.

Il reste un instant silencieux.

- Et pourquoi ça ?

Je le sens se rapprocher de moi sur son banc.

- Je... j'en suis incapable.

Je crois qu'il n'y a rien d'autre à dire. Pourtant Julien ne semble pas vouloir en rester là.

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