Chapitre 23 : Tu t'es crue en primaire ?

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- Alors ? Je t'ai manqué ?

Je souris en hochant la tête.

- Ton prof principal est bien ? questionne Ambre.

- On peut dire ça...

Je lui résume en deux-trois mots l'heure que nous venons de vivre.

- Sérieux ? Nous c'est l'opposé ! Elle était tellement molle que je avais envie de la secouer un bon coup pour lui remettre les idées en place, soupire-t-elle.

- Tu étais à côté de qui ? demandé-je.

- Julien.

Je déglutis.

- Pourquoi ? Ça te dérange ? s'inquiète Ambre.

- Non, pas du tout.

Son regard reste quelques secondes de plus que nécessaire posé sur moi.

- Tu es sûre ?

- Oui !

Mon ton cette fois était plus sec, plus agacé aussi.

- Ok, ok... Et toi tu étais à côté de qui ? Tu as rencontré de nouvelles personnes ? lance-t-elle pour changer de sujet.

- J'étais à côté de Romane, figure-toi, elle est dans ma classe. Et je ne risque pas de rencontrer qui que ce soit, ils me regardent tous avec des yeux... comme si j'allais me briser à tout instant.

- Ne t'inquiète pas, ça va passer, m'assure-t-elle.

- J'espère. Je vais y aller, je suis sûre que maman m'attend derrière la porte pour un compte rendu complet, dis-je.

- À demain, on se retrouve avant le début des cours !

J'acquiesce en m'éloignant.

J'avais vu juste. Je me demande même si maman n'était pas sur le palier. Ses yeux inquiets me scrutent, ses sourcils se froncent légèrement et sa bouche s'entrouvre pour parler mais je la coupe dans son élan.

- Oui, ça s'est bien passé.

Sa bouche se referme.

- Tant mieux, assure-elle.

Me voilà partie dans un nouveau récit de cette matinée particulière.

- Et ton emploi du temps ?

- Je ne l'ai même pas vraiment regardé dans les détails, dis-je. Mais ça me paraît être un emploi du temps de terminale classique, huit heures – dix-huit heures.

- Fait voir, parce qu'il faut qu'on cale tes séances de psy au milieu.

Elle ne voit pas mes yeux qui se lèvent vers le ciel. Mes soirées vont déjà être courtes et il faut que je les raccourcisse avec cinquante-cinq minutes plus ou moins utiles ? Mais je m'empêche de protester comme je l'aurais fait l'année dernière. Je pense que, plus je refuse, et plus elle pensera que j'ai besoin de voir une psychologue.

- Tu as déjà des devoirs ?

Je songe aux quarante lignes à rédiger.

- On peut dire ça, oui...

Très rapidement, la routine prend le dessus sur le reste. En quelques jours, les vacances sont effacées, remplacées par le réveil, les cours, le midi, les cours et la soirée. Une petite nuit et on est reparti pour un tour.

J'ai toujours été impressionnée de la faculté qu'ont le corps et le cerveau à s'adapter. Quelle que soit la chose, il suffit qu'on la répète plusieurs fois pour qu'elle s'intègre automatiquement à notre quotidien. Aujourd'hui, je ne trouve plus ça étonnant quand M. Benot commence le cours en nous demandant de fermer les yeux et de visualiser une scène dans notre tête, quand il nous donne un QCM et le lendemain, une copie double de réflexion autour d'un mot. Ce cours est rapidement devenu le meilleur, mais aussi le pire.

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