Quand je m'éveille, les yeux collés de sommeil et la tête lourde de cauchemars, je m'aperçois que mon bras a été bandé soigneusement d'un tissu doux, embaumé d'une odeur fleurie qui apaise mon corps tout entier.Autour de moi s'élève les tapisseries familières de la tente de Lily, où je semble avoir passé la nuit. Mais cette fois, je suis dans son lit, au milieu des épaisses couvertures qui se referment sur moi, me protégeant de l'extérieur. Je remarque une natte sur le sol et saisit alors qu'elle n'a pas dormi à mes côtés, mais m'a laissé sa couche.
Je m'empresse de me lever, coupable d'avoir autant dormi et souhaitant remercier mes sauveurs. Mes habits ont disparu, et je me retrouve en sous-vêtements au milieu du grand espace, au moment où Lily franchit les tissus qui forment sa porte.
- Oups, désolée ! dit-elle sans pourtant ressortir.
Elle pose sur l'un des tabourets de bois une pile de tissu et plaisante en m'adressant un clin d'oeil :
- Je suis vraiment ta fournisseuse d'habits !
- Désolée, je grince en essayant de me retourner discrètement.
- Pas de soucis ! En échange, tu me raconteras toute cette histoire de pirates.
Mon coeur crie dans ma poitrine et je m'agite. Le plan de Crochet, mes aventures, tout me revient soudainement et j'halète :
- Lily, il faut que je parle au chef !
- Non, d'abord tu t'habilles et tu bois ceci.
Elle me tend un breuvage et son air sévère m'oblige à obéir. Elle s'adoucit en s'asseyant à mes côtés, après que je me sois habillée et prend ma main dans la sienne. Alors une chaleur envahit le creux de mes côtes et je respire calmement.
- Le Chef a rendez-vous avec Peter en ce moment. Pour discuter des Pirates.
- Crochet a un plan ! je m'écrie alors.
- Nous savons ! Viktor est revenu, bien amoché mais il a pu nous avertir et nous montrer les plans. Mais il n'était pas très concis, il s'exprimait mal et dès qu'il a terminé, il s'est écroulé de sommeil. Arrête de t'agiter !
Je suis rassurée que mon ami se porte bien et il me tarde de le revoir. Mais je me fais plus de soucis que jamais : même s'il le voilà réveillé, je crains les terribles séquelles qui le menacent, suite à son altération avec les pirates. Je le sais, on ne s'en sort jamais indemne.
Mais pour le moment, je laisse mon âme s'abîmer dans celle de Lily, alors que nous restons silencieuses, côte à côte sur le lit encore défait, les mains se frôlant entre les longs poils des couvertures. Le silence prend la couleur de l'intimité, et comme deux amantes à l'aube de l'amour, enveloppe nos corps d'une saveur divine.
Je le sais à présent, et ce sentiment surpasse tout autre, surpasse ma peur, surpasse mes traumatismes d'enfants, les insultes qu'on m'a jeté à la gueule alors que j'étais l'esclave de leurs caprices, il surpasse les regards de dégoût dont j'ai été si souvent victime, les gifles entre deux couloirs, les coups dans le creux du ventre quand je rêvais de m'échapper. Il est ancré là où moi-même ne peut le déloger ; incrusté au fond de ma poitrine, il laisse sa marque dans chacune de mes respirations, gestes et danses. C'est lui qui anime mon pouls, qui agite mon sang, qui réchauffe mes membres glacés par la terreur.
A jamais demain, puisqu'aujourd'hui je lui appartiens.- Tu veux aller faire un tour ? On a rien à faire jusqu'à l'arrivée du Chef, et hors de question que je te laisse repartir vers Peter. Il t'a eu trop longtemps déjà, plus qu'il ne le mérite, rit Lily en interrompant brutalement la magie du moment.
J'acquiesce, encore trop troublée de ces instants, trop troublée pour articuler la moindre syllabe, les joues probablement rubis, et les palpitations résonnant dans mon crâne comme mille cymbales. Elle attrape d'un geste gracieux ma main et la tient fermement dans la sienne tandis que nous quittons le Campement pour retrouver les falaises et les embruns de la mer.
Celle-ci est plutôt agitée aujourd'hui, imitant le caractère de l'Île. On se prépare à la bataille, je l'espère, car sinon nous sommes perdus. Le vent souffle nos cheveux, qui se mêlent et s'entremêlent en une danse sans fin, attirant nos visages et nos âme encore plus proche. Lily me désigne un coin d'herbe proche du précipice et nous nous y couchons, le nez dans le ciel gris où se reflètent l'atmosphère lourde de cette journée.
- Je ne t'ai jamais demandé ce que tu faisais, avant. Je ne sais rien, ni de toi, ni de ta famille, souffle Lily, sans me regarder.
- J'aime pas trop en parler.
- Je sais. C'est pour ça que ça me fait mal. Tu ne m'en parles même pas à moi. Ça doit te ronger.Un silence crie notre inconfort, et c'est la première fois que je veux fuir l'odeur de liberté qu'elle dégage.
- Tu sais, je crois que tu l'as ressenti aussi, continue la jeune femme, les yeux fixés dans l'immensité des cieux.
- De ? je demande naïvement, le coeur commençant à comprendre, à s'accélérer.
- Le Lien, la Connection. On parle d' « Anwed », Lien de Fer, car seule l'épée peut le briser.Je sais de quoi elle parle. Deux regards qui se croisent et deux âmes qui se lient pour l'éternité.
- Je savais que cela m'arriverait, je ne pensais simplement pas que cela arriverait avec...
Elle hésite, bafouille et je la soulage du mot en complétant :- Avec une fille.
Elle tourne la tête, plonge ses iris noisettes dans les miens et l'incompréhension la plus totale est dans chacun de ses traits.
- Oh non ! C'est ici normal de tomber pour une fille ou pour un homme ! La Loi Naturelle l'autorise, pourquoi devrions-nous le rejeter ? s'étonne-t-elle.
- Vraiment ? Chez moi, enfin dans mon ancien monde, c'est mal vu. Parfois condamnable. Enfin, on en meurt.
- Comment ça ? Les Hommes sont-ils assez bête pour cracher sur l'Amour ? Mais alors, les Enfants sans Parents, où vont-ils ?Je devine, et mon coeur affolé se réchauffe, que les couples incapables d'enfanter prennent les orphelins. Quel est donc ce monde si parfait dans lequel je me suis retrouvée et pourquoi ne sommes-nous pas capable de l'imiter sur Terre ?
Je ne réponds que d'un signe d'épaules dépité et soupire. L'herbe autour de nous s'agite et caresse notre peau nue. Le vent m'amène les saveurs de l'Océan et celle sucrée de Lily. Les mouettes crient et mon ventre en fait tout autant ; il ne crie pas de faim, ni de panique, mais d'émerveillement alors que ce que je désirai le plus au monde est en train de se poser entre mes mains ouvertes.Je crains la tempête, celle qui balayera tout, Nous, mais aussi les Autres, Viktor, Peter, la petite Tami et son ami aux boucles rousses Tilio. Mais cet instant, je le retiens car jamais je ne voudrais qu'il cesse. Et si je dois verser mon sang, si je dois mourir pour elle, je le sais que je n'hésiterai pas.
- Non, ce que je voulais dire, c'est que je ne m'attendais pas à être liée à une étrangère. Mais je comprends que tu m'es plus familière que toutes coutumes de mon peuple, que chaque visage qui m'a éduqué. Et je sais que tu ressens la même chose, car c'est ainsi que cela marche. Je ne te retiendrai pas si tu désires garder la Liberté d'être seule, si tu préfères devenir un Enfant Perdu, plutôt que ma Moitié ici, mais saches qu'à jamais je t'attendrais.
Mes veines, mes artères, mon coeur explosent ensemble et dans ma gorge s'étouffe mon souffle. Je la connais depuis moins d'une semaine, mais depuis mille ans déjà. Toute ma vie, ce qu'il reste de mon enfance, je l'ai cherchée, et je l'ai trouvée dans mes désirs de fuite, dans ma quête de Liberté, dans le vent et dans les arbres, dans mes gestes et dans mon âme. Dans son sourire j'ai trouvé mon monde et dans ses yeux, ma raison d'être vivante.
Et quand, ses pupilles emplies de ce sentiment que je sais à présent nommer, elle s'approche de mon visage, prête à poser ces lèvres contre les miennes, je suffoque d'amour, et je sais que c'est dans ses bras que je lâcherai mon dernier souffle.
Je fangirl
Je fangirl
Je fangirl
Je suis tellement heureuse d'avoir pu intégrer cette histoire d'amour, qui change beaucoup de ce que j'écris d'habitude. Et Lily. Et Lily.
(Ce que je dis n'a aucun sens je suis juste beaucoup trop excitée).
J'espère que ce chapitre vous aura plu, ainsi que les prochains ! N'hésitez pas à me dire vos ressentis.
A très vite !
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Jamais demain
Fanfic« - Peter, attend ! [...]Les pensées se bousculent et s'emmêlent. De vieilles comptines, d'anciennes fables reviennent à moi, perdues dans les méandres de l'enfance, temps qui va bientôt disparaître puisqu'il est bientôt minuit. Tous les enfants gra...