𝐋𝐢𝐚𝐦.
𝑸𝒖𝒆𝒍𝒒𝒖𝒆𝒔 𝒉𝒆𝒖𝒓𝒆𝒔 𝒑𝒍𝒖𝒔 𝒕𝒐̂𝒕.
— Tu veux bien être un gentleman et me crémer le dos ?
L'espace d'une seconde, je me demande si j'ai bien entendu.
Confortablement calé sur un double transat de la pergola qu'Ethan a réservée pour l'après-midi, face à une piscine aux dimensions olympiques, j'interromps ma lecture, baisse le menton puis relève les yeux par-dessus mes Rayban. Je me retiens de soupirer en déposant ma tablette tactile sur la table d'appoint, et de réciter la définition de « privatisé ».
Gentleman, pense la demoiselle.
En bikinis minimalistes, tout sourire, deux brunes insipides et une jolie métisse nous font de l'ombre. Corps longilignes mais fermes, peaux tannées, poitrines galbées qui défient à elles seules toutes les lois de la gravité, elles nous matent à leur guise. Mes vieilles habitudes me feraient normalement conclure qu'elles se sont payées un après-midi dans ce resort pour capturer dans leurs filets trois beaux portefeuilles bien remplis. Pas aujourd'hui. Peut-être parce qu'Ethan m'a suffisamment reproché de n'emprunter que ce chemin de traverse depuis des années, au point de ne pas voir plus loin que le bout de mon nez.
Parfois, j'ai l'impression qu'il a oublié. Que je suis le seul à avoir vécu ce qui m'a obligé à changer. Je sais que c'est faux. Ethan est simplement parvenu à tourner une page noircie d'erreurs, de peines et de mensonges pour en écrire une nouvelle, alors que toute mansuétude m'a abandonné il y a des années. J'ai la rancune tenace et le pardon exigeant. Mon meilleur ami se reconstruit un présent en faisant preuve de magnanimité tandis que je cultive obstinément l'amertume d'un souvenir qui aurait pu être une tragédie, si la chance n'avait pas été de notre côté, les pronostics contournés. Il lui a fallu du temps, retrouver sa confiance en lui ébranlée ; en l'autre, lapidée. Tout ça est derrière lui.
Je suis entre deux portes, je suppose.
Depuis, la douleur fantôme d'une peur qui ne s'est heureusement pas concrétisée ne me quitte pas. Ethan a écopé de la cicatrice indélébile sur sa peau, rappel quotidien de ce qu'il a subi pour en arriver à une telle extrémité. J'ai hérité de la blessure psychique, invisible mais bien réelle, celle qui a fait naître un masque assujetti à déformer n'importe quelle vérité. Je me suis puni de n'avoir rien vu. Puni de mon inaction. Cette rage s'est sournoisement immiscée dans chaque fibre de mon être jusqu'à modifier profondément celui que j'étais, a empiété sur ma vie personnelle et pas seulement professionnelle.
Un processus d'exorcisme s'est récemment mis en place après que la vérité m'a douloureusement éclaté en pleine gueule. Quand j'ai enfin vu mon propre reflet, celui que j'étais devenu. Ce que j'avais fait. Jusqu'où mon masque avait été capable d'aller. J'ai transformé mon attirance en moteur d'une vengeance dans laquelle elle n'avait pas sa place. Aujourd'hui, je peine à expier mon péché.
Je chemine lentement vers une guérison que je veux une rédemption. Mais mon remède court et m'échappe quand je boitille maladroitement pour la rattraper. Lyanor s'est parée d'œillères, d'un casque antibruit puis murée dans un silence de plomb. Elle n'en sort que pour me gifler de mots ou me rappeler que nous n'avons rien à nous dire. Aujourd'hui, je sais que le danger était là, mais que je ne l'avais pas bien interprété. Aveuglé par mes maux, mes troubles, mes frayeurs, je luttais contre une malédiction chimérique, infoutu de voir que se tenait devant moi l'eucharistie de ma pénitence et non la personnification d'une vénale dépravation. Plus fragile qu'elle n'y paraît, mais à la fois tellement plus forte, vindicative et coriace que je ne m'y attendais. Inattendue, et certainement inespérée.
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Devious BOSS | En pause jusqu'au 6 octobre 2024
Romantik[Romance Enemies To Lovers ∞ Slow burn ∞ romance psychologique *** Dominateur, arrogant, sexy. Insupportable ! Un nouveau boss incompétent qu'elle déteste passe encore, mais découvrir que sa vie n'est qu'un mensonge, c'est la goutte d'eau ! Fraîchem...