Devious BOSS | En pause jusqu'au 6 octobre 2024

𝟑 - 𝐂𝐡𝐚𝐬𝐬𝐞-𝐦𝐨𝐢 𝐣𝐞 𝐭𝐞 𝐟𝐮𝐢𝐬

𝐄𝐥𝐥𝐲.

Reculer ? Hors de question !

Mélia me serre dans ses bras quand nous arrivons à destination. Je profite de son étreinte pour me gorger de tout son soutien, de son amour, et de tout ce qu'elle m'offre depuis tant d'années, sans retenue. Elle a insisté pour m'accompagner et s'est levée tôt pour faire le trajet avec moi, mais vu sa tête, je doute finalement que c'était une bonne idée.

Ma meilleure amie me considère en se mordant l'intérieur des joues, perceptiblement creusées, incapable de masquer l'inquiétude qui la grignote depuis deux jours. Ses grands yeux se plissent anormalement tandis qu'elle se met à scanner les environs. Je sais que l'endroit ne paie pas de mine, que l'enseigne ne correspond pas à ce qu'elle voudrait pour moi, mais il y a des moments dans la vie où on ne peut pas se permettre de tergiverser des lustres avant de prendre une décision.

Rien qu'une seconde, je me tâte à l'envoyer faire un tour à Vinegar Hill, juste pour lui prouver qu'elle se fait du souci pour rien. Ces dernières semaines, j'ai survécu à des propositions salaces qui auraient probablement filé la nausée à des prostituées aguerries, à des Dobermonstres affamés, à un ex-fiancé fou à lier – deux fois – et un PDG outrageusement arrogant qu'il vaut mieux éviter de côtoyer. Je ne parle même pas des sifflements goguenards et des frottements non désirés dans la rame de métro presque vide, le soir. Je crois que ça, je vais pouvoir gérer.

— Quoi ? demandé-je quand même, calmement.

Je connais déjà la réponse, nous avons déjà eu cette conversation jusqu'à ce qu'elle comprenne que je suis au clair avec ma situation. Les regrets ne servent à rien si ce n'est à nous empêcher d'avancer en nous enchaînant à un passé, pas toujours glorieux ni heureux. Puisque jamais je ne pourrai remonter les aiguilles du temps, je n'ai qu'une chose à faire : travailler sur mon avenir. Et cela commence par le présent. Maintenant.

J'ai fait la paix avec mon histoire. Tout recommencer ne signifie pas simplement claquer une porte et nier tout ce que l'on laisse derrière nous, je l'ai compris il y a peu. C'est être capable d'accepter que les choses sont ainsi. Ma vie m'appartient et si j'ai choisi de changer d'itinéraire pour ne plus marcher dans un sentier créé pour moi sans mon consentement, je dois repartir de plus bas que je ne l'avais cru. Je vois le bon côté des choses : d'en bas, je ne peux que regarder vers le haut.

— Elly, tu es sûre de toi ? Tu n'es pas obligée d'en arriver là. Je veux dire, on peut trouver d'autres solutions, vraiment.
— Je ne veux pas de ton argent, et tout va bien se passer, tu verras !

En me le répétant cent fois, ça devrait marcher. Pas vrai ?

Elle grimace, remue les lèvres corail sans émettre un seul son, saisit mon bras pour tenter de me convaincre de renoncer. J'aime qu'elle veuille prendre soin de moi, moins qu'elle veuille autant me couver, comme si j'étais un oisillon fragile à surprotéger.

— Pour une aventurière, tu es un peu trop frileuse, Amélia Scott.
— Trop tôt pour ce genre d'humour, Elly, commente-t-elle, la moue contrariée. Beaucoup trop tôt.

Elle me dévisage avec perplexité malgré mon air que je veux enjoué. D'accord, la dernière fois qu'elle s'est fait du souci pour moi, j'avais comme qui dirait minimiser les problèmes que je rencontrais : un appartement miteux que je ne pouvais pas me permettre de chauffer, à peine de quoi remplir mon petit frigo et la ferme intention de déménager avant qu'elle ne pose ses valises à New York. Aujourd'hui, plus de secret entre nous, elle sait tout ; y compris ce qui ne lui plaît pas.

— Hum hum, fait-elle avant de faire claquer sa langue sur son palais. Je suis à peu près certaine que je dois quand même me faire la voix de ta raison, Lyanor Johnson.