𝟒𝟏 - 𝐂𝐡𝐮𝐭𝐞𝐬

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𝐄𝐥𝐥𝐲.

Maître Bowman, mon avocate, et maître Weslay, celui de Liam, pénètrent dans le salon d'attente d'un même pas. Ils n'ont beau être que deux, j'ai soudain l'impression que toute une armée vient d'envahir l'espace. L'air me fait défaut, pas la hâte d'en finir au plus vite.

— Ils nous attendent, nous informe-t-il.

— Ils sont installés en salle 5, lui adjoint-elle.

Les mains dans les poches de son costume beige où aucun pli n'a pu s'inviter, les iris chocolat de l'avocat me sondent intensément pour déceler en moi le moindre doute susceptible de me faire reculer. Liam doit entendre les questions silencieuses du ténor du barreau puisqu'il me propose, d'un timbre posé, aux antipodes de la lave qui a remplacé le sang dans ses veines :

— On peut tout arrêter, sortir d'ici, filer vers l'ascenseur, monter dans ma voiture et...

— Et quoi ? le coupé-je avant qu'il n'évoque la possibilité de quitter l'Etat, le pays, voire le continent pour nous éloigner de cet endroit. Laisser Campbell et sa clique de scénaristes continuer leur chantage minable ? Hors. De. Question.

Mon index martèle son torse pendant que je lui répète ces trois mots, qu'il a lui-même hurlés avant-hier soir. Je voudrais le secouer en le sommant de me rendre Iceberg PDG, juste pour une heure ou deux. L'homme dont la glace cachait un feu, la froideur une douleur. Aujourd'hui, j'ai plus que jamais besoin de l'homme qui me pousse à avancer mais me retient pour m'empêcher de tomber. Je veux l'homme qui ose, car je ne fuirai pas.

— Tu réalises ce que tu me demandes ? m'interroge-t-il en pressant sa main gauche sur ma joue, sans se soucier des quatre yeux en train de nous observer.

— De ne pas oublier pourquoi on le fait, ni que j'ai gagné le droit de décider du goût de ma vengeance.

— Alors allons-y, enchaîne maître Bowman, un sourire carnassier ourlant ses lèvres cerise, certainement pour nous éviter de perdre plus de temps.

Dans son tailleur pantalon blanc cassé, qui constrate avec sa chevelure ébène et son teint caramel, la quadragénaire semble angélique ; en réalité, c'est un requin affamé qui ne sera repue que lorsque ses proies lâcheront leur dernier souffle. Tout cela est purement métaphorique – au grand dam de Liam –, pourtant, c'est bien la peine de mort qui n'attend que d'engloutir les dernières miettes du plan du clan Campbell. Bientôt, il ne leur restera que le souvenir pourpre d'un projet ambitieux qu'ils ont eux-mêmes torpillé.

Comme quoi, même le diable peut s'enterrer.

Devant la salle de conférence numéro 5, j'inspire à pleins poumons un air pas encore vicié par la présence de l'ennemi. Puis, un à un, j'adresse un sourire reconnaissant aux visages familiers qui m'ont accordé leur indéfectible soutien. Liam vient d'abord embrasser la commissure de mes lèvres, avant de me promettre, à l'oreille, qu'il fera de son mieux. Une furieuse nuée de frissons dévale mon échine. De deux doigts sous mon menton, il m'oblige à relever le visage pour arrimer nos regards. L'inquiétude luit dans ses iris acier. C'est déconcertant. Il m'avait habituée à l'homme intraitable, arrogant et fier. Pas à l'homme angoissé qui se tient devant moi. Qui me tient tout contre lui, comme si le monde extérieur menaçait de m'aspirer.

— Je suis prête, Liam, lui assuré-je de nouveau.

D'après la ride qui barre subitement son front, mon assurance ne le convainc que partiellement. Alors je le fixe comme si je lui ouvrais la porte de mon âme, parce que je ne me sens jamais aussi vivante et en confiance que lorsqu'il me contemple ainsi. Je suppose qu'il a trouvé de quoi se rassurer quand ses lèvres se posent sur mon front.

Devious BOSS | En pause jusqu'au 6 octobre 2024Où les histoires vivent. Découvrez maintenant