Chapitre 24 - Je t'aime, alors je te pardonne

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La vérité I


Franchement la vérité. Qu'est-ce que le mot vérité veut dire ? Est-ce que ma vérité, est ta vérité ? Non. Parce que chaque histoire, nous la vivons différemment, ainsi ce que j'ai ressenti et que j'affirmerai seras différente d'une autre version d'une même histoire, parce que l'autre l'aura ressentit de cette manière. 



N'osant pas bouger, je laisse Taara s'approcher de son frère pour le prendre dans ses bras.

— Aie tu me fait mal...

Sa voix est méconnaissable. Elle semble éraillée, anxieuse et à bout.

— Pardon, est-ce que ça va ?

Question absurde. Il est visible que ça n'allait pas. Allonge dans un lit d'hôpital, le corps emplit de douleur. Personne ne va bien. La preuve, il ne répond rien. Elle soupire.

— Qu'est-ce qui s'est passé ?

Ça par contre, c'était une question pertinente. J'aimerais bien saisir pourquoi et comment s'était-il retrouvé dans une situation aussi absurde et dangereuse que celle-ci.

— Je t'expliquerai plus tard. Sors, je veux parler à Shoyo.

Pris de court. J'étouffe un hoquet de surprise. Je lance un regard désolé à Taara, qui me sourit. Elle pose une main sur mon épaule, qui se veut rassurante. Je m'avance vers lui. Il n'avait toujours pas braqué sa tête en ma direction.

Lorsque je le vois. Ma main droite se pose automatiquement sur ma bouche pour étouffer un cri d'horreur. Coquard violet. Lèvre tuméfiée. Point de suture à l'arcade. Rien n'allait. Je m'assois sur la chaise près de lui.

— Où est Langa ?

— Chez moi. Avec Tobio et ma sœur.

Par chance. Il ne réagit pas. J'imagine que c'est l'énergie qui lui manque. Il hoche simplement la tête.

— Alors, c'est réellement fini ?

— Tooru...

Qu'est-ce que je pouvais répondre ? Je ne voulais pas que ça se termine. Mais j'ai trop de rancœur après son acte. J'ai trop de mal à faire passer la pilule. J'attrape sa main, je sais ce que je veux.

— Non. Ce n'est pas fini. J'ai failli te perdre aujourd'hui, et je ne peux pas, je ne le supporterai pas, pas encore une fois. Alors, oui, je t'en veux, je déteste ce que tu as fait ! Mais vraiment ! Et je ne te pardonnerai pas facilement. Mais là, je veux juste te retrouver.

Il presse ma main, puis essaye tant bien que mal de m'attirer vers lui. Un frisson me parcourt, il est froid. Son corps est froid cependant, je ressens une chaleur au creux de mes reins.

Il m'avait manqué et pas qu'un peu. De retour sur ma chaise, on se regarde sans parler. Je passe délicatement ma main dans ses cheveux.

— Raconte moi..

— Tu connais dé-.

— Non. Je veux savoir comment toi tu a vécu ce traumatisme.

Je souffle désespéré par sa demande. Je lui fais signe d'attendre. Je sors de la chambre et je vais voir ma mère. Elle a l'air complètement déboussolée tant, elle ne me remarque pas quand j'arrive auprès d'elle.

— Maman ?

— Maman !

— Oh oui ? Tu as terminé ?

— Est ce que tu vas bien ?

Mes sourcils s'affaissent, elle me regarde longuement avant de laisser échapper quelques larmes. Alors là, je ne comprends rien du tout. Je panique légèrement.

J'attends qu'elle me parle pour ne pas la brusquer. Je la prends dans mes bras, je l'observe pour qu'elle m'explique cette soudaine tristesse.

— Ce n'est rien. Ton père me manque, c'est tout...

— C'est bientôt son anniversaire, c'est pour ça ?

Elle hoche la tête. Pour dire vrai. Je la comprenais. Lorsque je passais au cimetière, automatiquement, j'allais voir mon père pour lui raconter ce que je vivais.

Je n'avais plus ce sentiment de tristesse, mais un sentiment d'amertume qu'il ne puisse pas me voir évoluer. Enfin, j'imagine que s'il y a un paradis, il m'observe de là-haut.

— Maman, rentre. Va te reposer, je vais rester ici pour continuer à parler avec Tooru. On a des choses à se dire.

— D'accord. Mais je vais lui faire un petit coucou avant.

Elle essuie le résidu de ses larmes, on se dirige ensemble vers la chambre. Ils discutent un peu. Elle réussit à lui dérober un sourire. Elle le réprimande un peu pour ce qu'il a fait.

Mais que de toute façon si moi je ne lui en voulais plus alors elle ne lui en voudra plus. C'était bien elle ça. Elle m'embrasse sur le front et s'en va.

Je me tourne vers Tooru. Mon cœur manque de sortir de ma poitrine. Me souvenir de ça, me dérange, m'angoisse. Mais Tooru, presse ma main pour me soutenir. Alors après une inspiration puissante. Je lui lance mon histoire : 


— Je passe te prendre ! Je finis à 22 h.

— Non je viens te chercher !

— Mais s'il t'arrive un truc ? Non Shoyo, je ne veux pas.

— On vit dans un quartier paisible. Allez à tout à l'heure ma colombe.

— Tss arrête avec ce surnom ridicule !

Je ne qualifierai pas mon amour avec Kei, comme un amour parfait. Tout simplement, on était fait pour être ensemble, on s'entendait bien, comme chien et chat. Deux mille quinze, nous nous étions mis en couple. Nous étions au lycée. Et pourtant, ce n'était pas gagner, il pouvait être odieux, surtout lorsqu'on jouait au volley. Enfin bref, il dissimulait néanmoins une souffrance, que j'avais réussi à appréhender.

Ce jour-là, nous devions fêter nos trois ans ensemble. Le 3 octobre 2018. Il avait prévu une surprise. Mais trop impatient, je voulais aussi le retrouver et lui faire une surprise.
Je récupère mes affaires. Je dis au revoir à ma famille, qui me dit de faire attention. Vingt-et-une heures vingt, je prends mon vélo, la boutique où Kei travaillait était assez loin.

Je coupe court, la ruelle, je la prenais tout le temps, mais vraiment constamment. Une lumière m'éblouit, je tombe de mon vélo surpris.

Les oreilles qui bourdonnent, le nez en sang. Je tente de me relever prudemment, ma tête qui tourne, je cherche désespérément mon vélo. Puis une main, ensuite une deuxième, pour achever une troisième. Bouche bâillonnée. Bras attaché. Pied ligoté. Panique. Peur. Angoisse. Tremblement. Pleur et cris étouffés.

Plus de manteau. Plus de chaussures. Plus de pantalon. Plus de caleçon. Je n'entends plus rien. Cerveau déconnecté. Pleure silencieux. Horribles douleurs. Ne ressens plus le froid du soir, j'entends leur rire, leur paroles insultante. j'aurais jamais imaginer que sa m'arrive à moi, de plus ce soir la, le soir où je devais fêter mon officialisation avec Kei.

Je me réveille à l'hôpital, apparemment une personne âgée m'aurait trouvée, au sol, évanoui, à moitié nu. Plus un mot ne sortit de ma bouche. Je ne voulais parler à personne. Une semaine, deux semaines. Toujours aucun son ne sort de ma bouche. La police poursuit son enquête tant bien que mal, j'avais écrit ce que je viens de te raconter, et seulement eux pouvais le lire.

J'avais un sentiment de honte. Il était immonde. Mais tu ne sais pas à quel point je m'en voulais. C'était ma faute, de ma responsabilité. Si je n'avais pas emprunté ce chemin, si j'avais écouté Kei. Je faisais souffrir tout le monde par ma faute.

Kei me soutenait constamment, corps et âme, il était constamment présent. Je voyais qu'il s'inquiétait que je ne parle toujours pas, mais je m'en fichais. Ma famille pareille, omniprésente. Étouffante. Même si tout cela partait d'un bon sentiment, ils me dégoûtaient tous.


𝒴𝑜𝓊 𝓂𝓎 𝓂𝒾𝓃𝒹 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant