Chapitre 3

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— Alors ma petite Maya, comment s'est passée ta journée ?

Comme tous les mardi soir depuis environ 2 ans, Madame Owens et moi dînons ensemble toutes les deux devant un bon film du siècle dernier. Madame Owens, c'est ma voisine de palier. Il s'agit d'une vieille dame vivant seule, peut-être même encore plus seule que moi. À mon arrivée ici, après la mort de mes parents, j'ai découvert qu'elle ne recevait jamais de visites et ça m'a fait un peu de peine. Alors maintenant, nous y voilà : chaque mardi soir, je vais dîner chez ma vieille voisine et cela nous fait autant de bien à elle qu'à moi.

— C'était... étrange, lui réponds-je, mais ça va. Je fais des rêves un peu étranges, ces derniers temps.

— Ah oui... ? me demande Madame Owens en plissant le regard. Quel genre de rêves ?

— Oh, vous savez, dis-je en souriant, des choses un peu idiotes. J'ai rêvé du personnage d'un film que j'aime bien. Mais je le revois en boucle dans ma tête, et c'est un peu perturbant. Ça m'empêche de me concentrer sur les choses importantes.

Madame Owens me regarde longuement, intensément, mais elle ne dit pas un mot. Elle se contente de sourire en hochant la tête, ce que je trouve bizarre. Voilà une chose de plus à rajouter sur ma liste des évènements incompréhensibles de ces derniers jours. Finalement après quelques instants, elle finit par hausser les épaules avec nonchalance.

— Parfois la vie ne ressemble pas à l'image qu'on s'en faisait, dit-elle enfin. Les choses les plus importantes ne sont pas toujours celles que l'on croit être importantes. Ne sois pas perturbée par tout ça, Maya, vis avec et c'est tout. Je suis sûre que tout se passera très bien !

— Si vous le dites.

Madame Owens et moi restons ensuite silencieuses jusqu'à la fin du repas, devant l'une des premières sitcoms de tous les temps. J'essaie une ou deux fois de relancer la conversation mais Madame Owens est comme ça : une fois qu'elle décide de terminer une discussion, elle n'y revient pas. C'est comme si une partie d'elle errait ailleurs, très loin d'ici. Un peu comme moi, finalement. Sauf que Madame Owens ne rêve sûrement pas qu'elle discute avec des personnages fictifs.

À la fin du repas, ma gentille voisine me raccompagne jusqu'à la porte d'entrée de son appartement à petits pas. Une fois ici, elle pose la main sur mon épaule et me sourit d'un air assuré.

— Allez, petite Maya, il est temps d'aller faire de beaux rêves. Et surtout ma belle, n'oublie pas : laisse les choses se faire, ne réfléchis pas trop. Laisse ta vie suivre son rythme, car ton destin pourrait te surprendre. D'accord ?

— D'accord Madame Owens, lui réponds-je en hochant la tête. Bon, j'y vais. On se voit bientôt, d'accord ?

Le regard de ma voisine est apaisé, mais je crois y lire une lueur étrange, rien qu'une seconde. J'ai presque l'impression qu'elle me dit adieu.

Je n'ai pas le temps de m'en préoccuper cependant, car Madame Owens reprend son air habituel pour hocher la tête et me sourire.

— Oui, Maya. On se voit bientôt. 

Mischief's RealityOù les histoires vivent. Découvrez maintenant