Je me souviens être rentré chez Khalti Nouria le l'endemain, pleurant dans ses bras en sentant ses larmes rouler sur mes cheveux, me rappelant du visage de cet Ange se décomposer quand je lui disais que Fahd était censé être mon futur fiancé. Je lui ai caché le reste de nos relations, lui racontant uniquement vis-à-vis de lui et moi que je l'avais rencontré dans un grec par l'intermédiaire d'une amie et qu'après nos liens s'étaient tissés, puis que la veille il m'avait dit de l'accompagner à un rendez-vous avec un ami à lui que je ne connaissais pas et qu'en l'attendant il s'était passé ce qu'il s'était passé. Il hochait la tête gravement de haut en bas à chaque réponse que je donnais, puis sans prévenir s'était levé et parti en claquant la porte lui aussi, me faisant sursauter une dernière fois. Je serrais fort ce petit corps dont je n'avais pas sentis l'odeur depuis si longtemps, puis me rendais compte que j'avais eu un comportement tellement mauvais ces derniers mois, j'avais délaissé tellement de personne pour trouver un semblant de bonheur égoïste à cause du mal que Fahd m'avait fait et que je pensais déjà lui pardonner..
- Pardon Khalti..Pardon..Pardon..Pardon Khalti..Pardon..
Je relevais lentemant ma tête, prenant la sienne dans mes mains et déposant pleins de baiser sur le visage de celle qui s'était mieux occupé de moi que quiconque, celle qui avait été si maternel dès mon plus jeune âge, qui m'a fait + ressentir de chaleur humaine que ma supposé famille.. Elle se détacha de moi, les yeux brillant et me chuchota d'une voix étouffer et tremblante « awili perkoi ti dis ça benti.. ci rien, makayn mouchkil wallah .. (y a pas de problème je te jure) ci lu passé.. ci passé.. ». Je pleurais encore plus, réalisant que je l'avais complètement abandonné que je ne l'avais pas secouru quand il le fallait la femme qui m'avait pourtant sauvé. A ce même moment Haytem ouvrit la porte d'entrée, nous regarda quelques secondes bras dessus bras dessous puis ressorti. Je me suis détaché d'elle, le cœur un peu plus lourd, j'avais constamment l'impression d'avoir une bombe à retardement dans la poitrine menaçant d'exploser d'une minute à l'autre, de plus en plus pesante depuis ce qui était arrivé pour Fahd.
En fin d'après-midi alors que j'étais avec Khalti Nouria devant la télé mon téléphone sonna. L'espace d'une seconde l'idée que ce pouvait être Fahd me traversa puis une vague de déception et de haine me traversa lorsque je vis le prénom de Mélanie s'afficher sur l'écran. Alors ça n'en était pas encore terminé de tout cela, je leur devais encore mes services ? Je serrais les dents, tournais un rapide regard sur Khalti Nouria ses yeux remplis d'interrogation à mon sujet, et consentis à remettre le téléphone dans ma poche sans répondre. Je sentais mon cœur se resserrer peu à peu puis une pointe d'apaisement au plus profond de mon être, là où une envie de satisfaire Fahd se faisait ressentir. Comme si je leur en voulais de ce qu'ils lui avaient fait, de lui avoir ôter la vie et que c'était ma manière à moi de me venger de cette acte atroce, avec le peu de moyen que j'avais..
Khalti s'approcha de moi et mis son bras autour de mon épaule, comme pour me rassurer, sa manière à elle de me dire que ça irait même si elle ne savait pas de quoi il s'agissait.. J'aurais tellement aimé pouvoir la croire à ce moment-là.
Les souvenirs des quelques jours qui s'en était suivis commençaient à être flou, défilaient trop vite, il ne s'était rien passé de spéciale, j'avais été accoutumé à me réveiller en pleine nuit, observant mon portable parfois pendant des heures à attendre un de ses appels, à manquer ses mots si mauvais, ses sautes d'humeur, j'en venais à manquer mon enfer, pourvu qu'il pouvait être encore en vie. Je n'étais plus sorti et ne répondait ni aux appels de Mélanie, ni à ceux de Jihane. Les seules fois où je passais le seuil de la porte de Majda était pour aider Khalti Nouria qui me regardait chaque jour avec un peu plus de peine dans son regard, tandis que Haytem lui ne couchait plus à la maison, sa mère ne m'en faisait aucune remarque mais je voyais que cela la préoccupait beaucoup. C'est ce qu'il s'est passé la journée de cette fameuse fin de semaine, de ce dimanche dont la monotonie ne présageait en rien ce qu'il allait se passer, dont je me souviens précisement.
Je me souviens de la vigueur que Jihane avait mis dans ces gestes pour me réveiller, j'étais dans un état presque comateux, je ne trouvais presque plus la force d'ouvrir les yeux quand je reçu un liquide glacé sur le visage qui me fit me redresser directement, la bouche en forme de O et mes bras tendu à la verticale, remplis d'eau eux aussi. Je ne trouvais plus mes mots, observant Jihane un saut d'eau à la main, une main sur ses lèvres qui se tordaient tellement elle avait envie de rire à ma vue dans cet état là.
- Je.. Krkr.. Désolé mais.. krkrkrkr ahaha c'était trop tentant sah la mère d'Haytem m'avait prévenu que tu serais difficile à réveiller donc j'ai pris le saut au cas où ahahahaaa wallah y a pas meilleur moyen pour te réveiller ça y est j'ai trouvé le meilleur moyen !
Un sourire incontrôlé s'imprimait peu à peu sur mes lèvres, le premier vrai sourire depuis la mort de Fahd. Puis je posais mes mains rapidement sur ma bouche, comme pour caché le fait que je pouvais éprouvé ce genre de sensation, l'amusement, le bonheur, j'étais presque honteuse de savoir que Fahd pouvait voir que j'y avais droit alors que ça faisait peu de temps qu'il était mort.
Le sourire de Jihane retomba lui aussitôt, comme le saut vide de ses mains puis elle s'approcha rapidement de moi, le regard ahuris et me saisis les épaules.
- Putain Shérazade réveille toi bordel, réveille toi ! Je te reconnais plus putain tema ce que t'es devenu t'es plus la même t'as complètement changé !
Elle me secouait, de plus en plus violement, ses larmes lui montant aux yeux.
- Elle est où la Shérazade que je connaissais qui souriait tout le temps même quand tout allait mal ? hein elle est où celle qui savait rire, sourire, être là pour les autres avant de s'appitoyer sur son propre sort, tu l'as cacher où zebi, où ? Redonne là moi steuplais parce que là c'est plus possible j'en peux plus d'avoir un légume en face de moi, j'en peux plus... Je fais tout ce que je peux pour faire comme si de rien était mais là c'est trop, tu réponds même plus à mes appels, tu fais la morte mais on dirait que c'est ce que tu veux devenir putain, MORTE, tu veux m'abandonner c'est ça hein ?
Elle se laissait retomber sur le lit, la tête sur mes genous, ne pouvant plus s'arrêter de pleurer et me laissait là sans savoir quoi faire, ma bouche toujours ouverte, ne trouvant pas les mots. J'avançais mes mains vers ses cheveux, me rétractait ensuite, hésitante et finit par lui caresser la tête les mains tremblante, ne sachant pas quoi faire d'autre, les larmes me montant soudain aux yeux.
- P..Par..Pardon ma sœur..si..si je t'ai fais du mal, pardon.. Je..Je..
Mon corps se mettait à trembler sous un torrent de larmes, et voir ma sœur dans cet état me fit réaliser du comportement que j'avais eu, je ne me rendais pas compte que je faisais ressentir ma douleur intérieur à mon entourage et que je ne faisais rien pour le changer, la Shérazade qui n'aimait pas montrer ses faiblesses avait apparemment disparu et n'avait plus donné signe de vie. Elle releva sa tête et me regardait de ses yeux rouges embué de larmes, prête à rétorquer un autre reproche agressivement mais je la coupais dans son élan :
- J'ai tout fais d'une mauvaise manière je le sais, je me reconnais plus, je meurs intérieurement pour celui qui me tuais à petit feu chaque jour un peu plus, je meurs intérieurement à cause de cet amour qui veut pas me quitter, de ce gouffre dans lequel je m'enfonce de plus en plus, toujours sans nouvelles de mon père, le manque de mon frère, et le mal que je ressens au plus profond de mon être en pensant au mal que j'ai fais à toi et Khalti Nouria, je vous ai complètement délaisser je m'en rend compte Oukhty, je veux remonter la pente, je veux surmonter tout ça mais.. mais..
Elle se releva lentement, me prenant le visage dans mes mains et je terminais par un « Mais c'est trop dur » étouffé dans mes sanglots. Elle me prit dans ses bras quelques secondes et se recula, les yeux rougit par les larmes.
- Allez, lève-toi bagra, tu vas pas rester pourrir ici encore longtemps
S'en suivit d'un grand sourire qu'elle avait réussi à faire mine de retrouver si facilement, à ce moment-là au fond de moi je savais qu'avec elle à mes côtés j'arriverais à surmonter toutes ces épreuves et que cette fois, je ferais de mon mieux. J'hochais lentement la tête de bas en haut et m'assit au bord du lit, prenant appui sur la table de chevet et la main de Jihane pour me relever, mes deux pieds prenant appui sur le carrelage froid, prête à faire un pas en avant, ce fameux pas qu'il me fallait faire, prête à réapprendre à marcher, à réapprendre à vivre, vraiment.