Partie 38

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Je le regardais avec de grands yeux, fébrile, en train de me donner toutes sortes d'indications pendant que je n'avais qu'une seule question en tête :

- Pourquoi moi ?

Il me regarda profondément, sourire en coin, comme amusé, comme s'il s'agissait d'un jeux et qu'il éprouvait même un malin plaisir de me voir désemparé, sans comprendre quoi que ce soit. Comme un maître aimant pousser son chiot sans défense dans une cours remplis de pitbulls, sans qu'il ne soit préparer et mis au courant d'aucune règle.

- Parce que j'vais quand même pas m'salir les mains avec ces petites affaires et..

Il plaça ses mains sur mes joues, je reculais instinctivement mais il resserra son contact, ne me laissant pas le choix.

- Que j'adore l'idée que Haytem deviendra fou quand il apprendra ce que tu fais.

J'en avais les larmes aux yeux, rien qu'à cette pensée, à cette image. Je baissais la tête afin qu'il ne puisse pas voir qu'il arriva à m'affaiblir, à me faire mal, et il se mit à rire après m'avoir lâcher de son emprise. Il tourna les talons et me dit tout en marchant « La loi de la street ma ptite, la loi de la street ». Je la haïssais, cette rue qui offrait des cauchemars aux allures de rêves à ces jeunes qui devenaient crapules, vermines après y avoir goûté. J'étais en train de payer le prix de cette haine, cette rivalité qui subsistait entre Fahd et Haytem, j'étais le seul point faible que ce monstre avait trouver pour l'atteindre, j'étais maintenant piégé, obligé de faire ce qu'il voulait que je fasse.

Je l'observais monter dans sa voiture, et rouler à toute vitesse, me laissant maintenant seule dans un nuage de poussière, une larme roulant le long de ma joue, ce gros sac de sport à l'épaule et bout de papier à la main. J'observais les alentours, Fahd avait garé sa voiture plus loin du grec, je ne le voyais donc plus, l'image de l'expression de Ramzi à la vue de celui qui avait passer son bras autour de moi en boucle dans ma tête. J'espérais intérieurement qu'il se doute de quelque chose et qu'il essaye de me sortir de là, qu'il y arrive et que j'en aurais finis de tout cela.. Tu rêves trop Shérazade, beaucoup trop..

J'avais fais une queue de cheval et avait enfoncer la casquette sur ma tête, cachant le plus possible mes yeux et mon visage pour ne pas être reconnu, mis la capuche du sweat d'Haytem sur la tête et pris le bus que Fahd m'avait dit de prendre sur le papier. Dedans il y avait placé deux tickets de bus, je fronçais les sourcils en les voyant, ne comprenant pas pourquoi il prenait la peine de le faire vu la situation déjà catastrophique dans laquelle il me mettait. Je m'installais dans le fond du bus qui n'était pas encore remplis, toute tremblante, appréhendant. Je n'étais jamais partis dans une autre cité que celle où je vivais, je n'étais jamais aller plus loin qu'aux alentours, et je n'aurais jamais imaginer que le jour où ça arriverait serait pour aller livrer des substances illicites, ou même pire..

Je tenais fermement le sac de sport près de moi, même si j'aurais préféré le tenir éloigné le plus possible. Le trajet promettait d'être long, j'allais devoir attendre de descendre jusqu'au terminus, je risquais de rentrer tard comme toutes les fois où je voyais Fahd. Le bus se remplissait de plus en plus petit à petit, surtout quand il s'arrêta devant une Mosquée. Je n'y étais jamais rentré, depuis que j'habitais chez ma tante j'avais été mise l'écart de toute éducation religieuse, le seul contact que je pouvais avoir avec l'islam était lorsque j'allais chez Khalti Nouria et qu'elle me parlait religion, qu'elle me récitait du coran quand elle voyait que j'allais mal.

On voyait des hommes et des femmes de tout âges rentré dans le bus, voilés, en qamis, l'air serein, sans cette haine que j'avais pris l'habitude de voir dans les yeux de ces hommes qui vivent une vie synonyme de haram. J'étais presque surprise de voir autant de personnes comme cela, sous ma casquette et ma capuche je les observais, presque envieuse. Un jeune homme en qamis blanc éclatant vint s'asseoir à côté de moi, je baissais la tête instinctivement, gêner de cette promiscuité entre lui et moi. Il était mate de peau, les cheveux bruns, rasé de près. Il avait une tête d'enfant mais son corps était celui d'un homme, il avait l'air gentil et sage, patient, il était pieux. Comme j'imaginais Haytem dans les débuts. J'aurais tellement voulu que les choses se passent autrement, que son père n'ai jamais oser frapper sa mère, que Fahd n'ai jamais croisé la route de Majda, que Kassim n'ai jamais essayer de lever la main sur Soraya, qu'il évite les tentations de la rue.. Mais c'était le mektoub, son destin était ainsi.

Chronique de Sherazade : Du balai à la bague au doigtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant