Chapitre 1 : Aaron

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Une heure plus tôt, je souffrais le martyre après un entraînement intensif. Suite à cela, j'avais appelé mon oncle afin qu'il me reçoive au plus vite. Par chance, il avait eu un désistement de dernière minute et j'avais sauté sur l'occasion. Il était pratique d'avoir un kinésithérapeute dans la famille. Je me levais de la table de massage en expirant fortement. Je me sentais si détendu que j'aurais pu m'endormir dans son cabinet.

- Tu te sens mieux, mon grand ?

- Oui, merci. Tu es un magicien.

Mon compliment le fit rire. Il secoua la tête mais je pouvais voir la fierté que lui avaient procuré mes louanges.

- Tu viens toujours déjeuner à la maison ce week-end ?

- Bien sûr.

- Bien. Tante Sharon prévoit... quelque chose pour toi...

Je grimaçais en grinçant des dents. Je savais ce que ce « quelque chose» signifiait.

- Comment s'appelle cette nouvelle grenouille de bénitier ?

Il soupira.

- Cassandra.

- Je suppose que c'est la fille d'une de ces dames qui fréquentent l'Église.

- Exactement.

Encore un rendez-vous arrangé signer Tante Sharon... Déterminer à me caser avec une jeune femme bien sous tous rapports, elle avait la fâcheuse habitude de jouer à la mère maquerelle à la sortie de la messe.

- Génial...

- Elle fait ça pour toi, tu sais.

- Oui, je sais mais nous en avons déjà parler... elle a même embarqué maman dans cette histoire. Je n'ai pas besoin d'aide pour trouver une femme.

- Elle a juste peur que tu t'éprennes d'une jeune femme «inapproprié».

- N'importe quoi ! Et que veux-tu dire par inapproprié ?

- Ne t'énerve pas contre moi. Ce sont les mots de ta tante, pas les miens.

C'était insupportable. J'avais l'impression d'être, aux yeux de ma famille, un incompétent en matière de séduction. Cela était dégradant pour mon ego. De plus, je n'en avais réellement pas besoin. Je faisais partie de l'équipe de football de l'université. J'étais aussi convoité que mes coéquipiers mais à leurs différences, je ne sautais pas sur tout ce qui bougeait. Mon éducation religieuse m'a imposé des limites qui m'était interdit de franchir. J'avais été éduquer pour trouver une femme, me marier et avoir des enfants. Les relations éphémères ne faisaient donc pas parties de mes espérances.

Lorsque je me voyais dans le futur, je voyais le bonheur d'avoir une famille à moi. L'amour avait une grande importance pour moi. Je voulais ce que m'avait fait miroiter ma famille depuis ma plus tendre enfance. Je voulais aussi réussir dans mes études car contrairement à la plupart de mes amis, je ne rêvais pas de faire carrière dans le sport. Le football avait été un moyen, pour moi, d'obtenir une bourse pour l'université. Ma famille n'était pas des plus riches. Mes parents n'auraient jamais pu payer les frais qu'imposaient mes études. Aussi, je m'étais lancer dans le football américain au lycée et m'étais donné à fond. Quelle surprise lorsque le coach m'avait congratulé sur mon jeu. J'étais doué. Assez doué pour être accepté à l'université avec une bourse. Mon seul objectif était de devenir avocat. Je voulais participer à notre justice. Mon idéalisme me renvoyait l'image d'un avocat luttant pour mettre les méchants en prison. Avec les années et les stages dans plusieurs cabinets, j'avais ouvert les yeux en grand. Cela n'était pas toujours aussi glorieux que je l'aurais voulu. Il avait suffi que l'avocat qui m'avait pris sous son aile durant quelques mois, défende un meurtrier et parvienne à gagner le procès. Savoir cet homme dangereux dans les rues était effrayant. Cependant, je perdurais dans ma quête à une carrière plus idyllique. Je n'en démordais pas. Je parviendrais à devenir l'avocat que je souhaitais être.

- Elle parlait de «marie-couche-toi-là», me ramena mon oncle à la réalité.

Je clignais des yeux plusieurs fois en tentant de me rappeler notre conversation.

- C'est comme ça qu'elle voit les filles du campus ? m'étonnais-je.

Il grimaça.

- Tu l'as connais. Elle a des idées bien arrêter sur certains sujets.

- Oui, justement. Elle devrait ouvrir son esprit. Je ne choisirais jamais une des filles qu'elle me présentera parce qu'elles ne me correspondent jamais, oncle Tom.

- Fait un effort... pour moi. Je n'ai pas envie de l'entendre rouspéter tout le reste de la soirée parce que tu te serais montré indifférent face à Cassandra.

Il me regardait presque avec des yeux de chiot battus. Ce n'était pas fair-play de sa part mais je le comprenais. Ma tante pouvait être vraiment pénible lorsqu'elle n'obtenait pas ce qu'elle voulait.

- Très bien. Je me montrerais courtois envers cette Cassandra.

- Merci, mon garçon.

La moue avait instantanément disparu. Je lui jetais un regard en biais avant de prendre la direction de la porte.

- Il faut que j'y aille. J'ai un cours dans une heure.

- D'accord. À plus tard, Aaron.

- À plus tard, oncle Tom.

Il me revaudrait ça. Ce ne serait pas une soirée agréable mais j'étais prêt à supporter ces échanges soporifiques ou ces silences gênants pour lui. Je pris l'ascenseur et sorti de l'immeuble où était installer son cabinet puis pris à droite, direction l'université. Je ne pouvais pas me permettre d'arrivée en retard. Je ruminais durant tout le trajet quand mes yeux se posèrent sur Farah. Une fille qui traînait pas mal avec les mecs de toutes équipes sportives du campus. Fille aux mœurs légères, elle n'en demeurait pas moins une fille gentille à l'excès. Elle participait à toutes les fêtes jusqu'à récemment où elle avait disparu de la circulation. J'allais poursuivre mon chemin sans m'arrêter quand elle tournait la tête dans ma direction. Elle avait, sans doute, perçu mon regard sur elle. Elle m'offrit un grand sourire et me fit signe de m'approcher. Hésitant, je détournais le regard droit devant moi puis revint à elle et enfin sur la personne qui l'accompagnait. Une fille aux cheveux aussi noirs que les plumes d'un corbeau. Je fronçais les sourcils car il ne me semblait pas l'avoir déjà vu sur le campus.

- Aaron. Viens !

Je pris une grande inspiration et jetais un œil à ma montre. J'avais encore du temps devant moi. Aller les saluer ne me mettrait pas en retard. De plus, cela faisait un moment que je n'avais pas vu Farah et cette fille inconnue m'intriguait. Autant soulager ma curiosité et demander des nouvelles de mon amie avant de retourner à l'université. Prenant ma décision, je traversais la rue avec un étrange sentiment que ce choix allait être un véritable bouleversement.

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant