Chapitre 6 : Ginny

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Les avant-bras appuyés sur l'encadrement de la porte, à laquelle je venais te toquer, je patientais sagement que la personne m'ouvre. J'avais une mission, au sein du club, bien spécifique. Me sentant inutile, à mes seize ans, j'avais exigé à mon père qu'il m'offre un job afin de contribuer à notre communauté. D'abord contre, car les affaires étaient seulement pour les hommes, j'avais menacé de quitter le club pour leurs ennemies. Me connaissant, il savait que j'en aurais été capable, juste pour l'emmerder. J'avais déjà de bonnes compétences dans les sports de combat et je n'avais pas peur de me servir d'une arme, il m'avait alors confié la tâche de récupérer le cash des mauvais payeurs. Notre organisation touchait à tous ce qui constituait l'illégalité. Les armes. La drogue. Le sexe. Nous possédions pas moins d'une trentaine de «boîtes de nuit», de bar, de magasin en tous genres. Mon père était une personne extrêmement productive. En bref, nous étions blindés. L'argent nous conférait une bonne protection. Nous graissions allègrement la patte aux flics et hommes politiques pour qu'ils ne viennent pas mettre leur nez dans nos affaires. Nous ne comptions pas moins de six flics dans nos rangs et la semaine dernière, le chef de la police avait passé une agréable après-midi auprès de tous les hommes du club, avec sa femme et ses deux fils, au barbecue que nous avions organisé. Tous des corrompus, à nos profits.

La serrure émit un son métallique lorsque le type ouvrit la porte. Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il me vit. Comme je m'y attendais, il tenta de refermer la porte, rapidement. Je passais ma jambe dans l'entrebâillement avant qu'il ne puisse s'enfermer puis pousser violemment la porte, la faisant claquer contre le mur.

- Bonjour Craig. Comment vas-tu ?

Je pénétrais dans l'appartement crasseux et m'appropriais les lieux avant de me tourner vers lui. L'homme tremblait. De la sueur commençait à couler sur son front.

- Je n'ai pas l'argent, lil'Death. Je suis désolé. Je vais m'arranger, je te le promets. Repasse demain. Je les aurais,plaida-t-il en utilisant mon surnom.

Je fis claquer ma langue plusieurs fois dans un signe de déception.

- On avait dit quoi, Craig ?

- Je sais mais...

- Quelle date avions-nous convenue, Craig ? insistais-je plus sévèrement.

- Le mardi quinze...

- On est quel jour, Craig ?

- On est le mardi quinze, chuchota-t-il sans me lâcher de son regard craintif.

- Tu connais les règles, n'est-ce pas ?

- S'il te plaît, Lil'Death. Accorde-moi encore une journée, supplia-t-il.

- Que va-t-il se passer d'ici demain, Craig. L'argent va te sortir du cul ?

Il demeura silencieux un moment. L'instant était prêté à réfléchir vite s'il ne voulait pas que je mette ma précédente menace à exécution.

- Je vais le trouver. Je te le jure. Laisse-moi, au moins, jusqu'à minuit, plaida-t-il.

Je levais mon regard sur l'horloge murale de la cuisine de l'homme.

- Minuit ? Tu auras mon argent dans une heure ?

- Oui, je les aurais, s'exalta-t-il lorsqu'il entrevit une porte de sortie.

Je n'avais rien de mieux à faire de ma soirée. Farah m'avait bien proposé une soirée à l'université, puisque Joe était parti en mission pour mon père depuis deux jours avec Howl. Étant donné que cette soirée étudiante me tentait autant que me faire arracher les dents à vif, je décidais de jouer un peu avec Craig.

- Très bien. Une heure. Pas une seconde de plus.

Je me dirigeais vers la sortie alors que l'homme soufflait de soulagement.

- Ne me met pas plus en colère. Si, lorsque je reviens, tu n'as pas l'argent, tu mourras, aussi simplement que ça.

Suite à cette menace claire et nette, je sortis de l'appartement et fis mine de partir car je savais qu'il avait bel et bien un plan en tête. Je n'étais pas idiote. Je savais qu'il allait me la foutre à l'envers. Jusqu'à présent, le seul grief que j'avais contre lui était le solde qu'il nous devait. Lorsqu'il franchirait la porte de son appartement avec la moitié de ses affaires, la chose allait devenir bien plus grave à mes yeux. Qu'il n'est pas l'argent était une chose. Il n'était pas le premier et ne serait pas le dernier mais qu'il essaye de fuir, c'était clairement un manque de respect envers mon père, ses hommes et moi. C'était intolérable. Je comptais, seulement, le passer à tabac pour son comportement mais s'il faisait ce que je soupçonnais, il allait devoir devenir un exemple pour tous les mauvais payeurs. On ne s'amusait pas avec les Skull's Fire à moins d'avoir envie de mourir. Tapie dans l'obscurité d'une ruelle adjacente, j'attendis en me grillant une clope qu'il daigne faire l'exploit de toute sa lâcheté.

Quatre minutes plus tard, précisément, il sortit précipitamment de son immeuble avec un gros sac en main. Un sourire froid et calculateur prit forme sur mes lèvres. Huit ans d'expérience m'ont appris à cerner les gens et leurs comportements. Je ne me trompais jamais sur les intentions des gens. Preuve en était devant moi. Il marchait rapidement dans ma direction, sans même se rendre compte qu'il se jetait dans la gueule du loup.

Une voiture noire passa près de lui, le faisant sursauter. Je n'y prêtais, d'abord, pas attention, entièrement concentrer sur ma proie. Puis, j'y jetais, tout de même, un léger coup d'œil et fus décontenancer, durant une seconde, d'y trouver le type du café-terrasse et d'autres mecs, riant. Invisible, aucun d'eux ne me remarqua. Je me repris rapidement, maudissant le sort de le mettre, un peu trop souvent, sur mon chemin et reportais mon attention sur Craig, qui approchait bien plus vite que je l'aurais voulu. Il n'était plus qu'à cinq mètres de moi. Je sortis mon arme, jetais ma cigarette au sol et me découvrais à ses yeux. L'homme s'arrêta brutalement, les yeux écarquillés de terreur. Son sac tomba au sol dans un bruit sourd. Les bras le long de mon corps, arme à la main. Je m'avançais en sa direction en secouant la tête dans une fausse déception.

- Craig, Craig, Craig. Il a fallu que tu essayes, hein ?

- Je vais juste essayer de trouver l'argent, tenta-t-il.

Je me baissais et attrapais son sac pour l'ouvrir. Je laissais ses affaires se déverser sur le trottoir.

- Tu as besoin de vêtements pour plusieurs jour et nuit pour trouver de l'argent ?

Il sembla chercher ses mots, paniquer. Il savait qu'il était coincé et que rien ne le sortirait de ce mauvais pas. C'est alors, qu'il s'élança dans une course vaine pour me fuir afin de sauver sa peau. Je soupirais de mécontentement. Pourquoi réagissaient-ils tous de cette manière... ?

Je levais mon bras armé et pris le temps de lui donner l'espoir qu'il allait peut-être s'en tirer puis lui tirait dans le dos. La première balle vint se loger dans ses reins. L'homme tomba. Je m'approchais nonchalamment de lui. Lorsque je fus arrivé à son niveau, je posais ma semelle sur son dos blesser, sans douceur. Il poussait des gémissements de douleur et sanglotait lorsque je m'abaissais prenant appui sur son dos.

- Tu as pris la dernière mauvaise décision de ta vie, Craig. Que Dieu est pitié de ton âme merdique, connard !

Je me relevais sous ses plaintes de plus en plus hystériques et tirais une dernière balle dans sa poitrine pour l'achever. Je retirais ensuite mon pied et rangeais mon arme à la ceinture de mon pantalon en cuir noir et reparti de là d'où je venais. Des bières m'attendaient depuis bien trop longtemps à cause de cet abruti. 

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant