Chapitre 33 : Aaron

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Nous attendions depuis, ce qui me semblait, une éternité dans cette salle d'attente froide et austère. Les néons grésillaient au-dessus de nos têtes. Le bruit des machines en libre-service générait un peu plus de nervosité. Je fixais le mur blanc, face à moi, en me tortillant les doigts. Mon père, près de moi, demeurait silencieux.

Lorsqu'il m'avait réveillé, cette nuit, pour m'annoncer que Ginny était partie, j'ai sauté du lit pour m'habiller en quatrième vitesse et me lancer à sa poursuite mais il m'avait avoué qu'elle était partie depuis une demi-heure, que je ne pourrais jamais la retrouver. Je lui en voulais d'avoir attendu pour me le dire.

«Je suis désolé, fils, mais il fallait que je te protège de cette histoire... comprends-le.»

Il s'était, ensuite, expliqué, affirmant qu'elle ne serait pas seule. En effet, mon père avait mis d'ancienne relation, notamment Franklin, sur le coup. Grâce à un tracé, que mon père avait placer dans son téléphone lors d'un moment d'inattention de sa part, celui-ci peut la suivre dans chacun de ses déplacements. Mon père l'avait appelé après le départ de Ginny. Le FBI et la police locale étaient sur le coup. Cela m'avait rassuré mais pas suffisamment pour pardonner à mon père ces cachotteries. Il s'agissait de Ginny. Je devais être au courant de tout. Je n'étais plus un enfant. Il devait accepter que je pouvais géré. D'autant plus que j'avais ma part de responsabilité dans tout ça. Lorsque la police était arrivé dans le périmètre de la rencontre, Franklin en avait, tout de suite, informé mon père. Ils n'étaient pas encore intervenus. L'endroit avait semblé difficile à trouver. Nous avions eu le temps de nous rendre sur place avant de l'avoir retrouvé. Quand un coup de feu avait retenti par écho dans cette forêt dense. La peur m'avait vrillé le corps. Je m'étais mis à trembler et mes jambes avaient pris le contrôle. Je m'étais mis à courir le plus vite possible dans l'espoir de la sauver. Tout le squad du FBI avait pris le même chemin, me dépassant de peu. Puis un deuxième coup de feu avait brisé le silence alors que je n'étais plus très loin d'un grand feu de camp. Plus que cinq mètres pour avoir la plus horrible des visions. Je m'étais figé net. Ginny... au sol... en sang... devant ses trois énormes gars. Allongé sur le ventre, je ne pouvais voir son visage. C'était une vision d'horreur. Deux choix s'offraient à moi, à cet instant. Soit, je prenais la direction de Ginny pour m'assurer qu'elle était toujours en vie. Soit, je me jetais sur son indigne de père pour le tuer de mes propres mains.

Mon père était arrivé à ce moment-là. Il avait posé une main sur mon épaule et fait signe de choisir Ginny. Je savais qu'il avait raison, que c'était le meilleur chemin mais j'avais la rage au ventre. Je voulais le tuer pour avoir blessé la femme que j'aimais. Mon père me poussa alors en direction de Ginny, prenant la décision à ma place, puisque j'étais incapable de faire le moindre pas devant ce choix cornélien. Arrivée devant son corps immobile et ensanglanté, je m'étais laissé tomber à genoux. Des larmes sillonnaient mes joues lorsque je lui pris la main. Les urgentistes arrivaient enfin sur place et la mirent sous oxygènes pendant qu'ils évaluèrent les dégâts. Ils m'avaient demandé de me pousser afin d'avoir l'espace nécessaire pour la stabiliser jusqu'à l'arrivée à l'hôpital. Je m'étais, alors, décalé sans jamais lâcher sa main. J'avais besoin d'un contact, de sentir la chaleur de sa peau. Son électrocardiogramme était faible mais présent. Elle n'était pas morte mais la situation était critique. Le médecin ne semblait pas confiant, ce qui m'alerta. Je les avais poussé à l'emmener au plus vite en gueulant comme un fou. La panique m'avait tordu les boyaux. Il fallait qu'elle s'en sorte.

Je déviais mon regard sur mon père et sa lèvre fendu. Mon père m'avait généreusement poussé à choisir Ginny mais lui, n'avait pu faire ce choix. Trop accaparer par la survie de ma belle, je n'avais pas fait attention aux actions de mon père. Une fois mon attention détournée, il s'était jeté sur Jeaper, qui était pris entre deux agents fédéral, et les deux hommes s'étaient battus comme des acharnés. Mener par la haine, mon père avait cassé le nez et deux côtes de Jeaper. Il en était ressorti qu'avec une lèvre fendue.

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant