Chapitre 2 : Ginny

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J'avais eu l'intention de fuir l'insupportable présence de mon père et de mon frère dans un bar pour me mettre une mine mais il avait fallu qu'elle me suive, comme d'habitude. Depuis son arrivée, elle ne me lâchait pas.

Il y avait un mois, cette nana avait débarqué au club. Toute pimpante. Une joie de vivre franchement excessive. Un esprit naïf. Une bonne âme. Je me rappelais m'être demandé ce que foutais cette fille dans l'antre du diable. Margaret, une traînée du club, m'avait alors informé que la fille, Farah, avait passé la nuit avec Joe, le meilleur ami de mon frère, Howl. Il s'avérait que la nana était devenue complètement accro, en une seule foutue nuit, de lui et l'avait suivi jusqu'ici. Désespérant. Nous en voyons arrivés toutes les semaines des meufs comme elle, espérant avoir leur chance avec ces abrutis finis. Elles sont pathétiques. En apprenant que j'étais la soeur du meilleur ami de Joe, elle avait jeté son dévolu sur moi. Une amitié par intérêt en somme. Je ne pouvais pas la blâmer pour ça. Quand on veut quelque chose, il faut s'en donner les moyens. Seulement, elle n'aurait aucune chance avec lui, malheureusement pour elle comme moi. Clairement, mon père avait décrété à ma naissance, que je serais destiné à devenir la femme du second de mon frère afin d'assurer ma sécurité. Comme si j'avais besoin de cet enfoiré de première.

Quoi qu'il en soit, me voilà assise face à elle a cette terrasse de cafés, car mademoiselle voulait essayer depuis longtemps leur milkshake, à boire une bière en plein soleil. Fait chier !

- Ça fait pas du bien de sortir un peu ? se réjouissait-elle.

- Non, grognais-je, la tête baissée et lunette de soleil sur le nez.

- Oh aller, profite un peu de ce moment sans être grognon. Sois juste cool.

- Je serais «cool» quand je serais bourrée.

Je la fusillais du regard et elle baissait la tête. Elle avait appris à me connaître en un mois. Elle avait eu, un jour, l'audace de me prendre pour sa meilleure amie et tenter de m'imposer sa volonté. Le silence s'était fait dans le bar du club. Les gars attendaient le moment où j'allais péter les plombs, ayant l'habitude de mon caractère de merde. Je m'étais tourné vers elle, la menaçant du regard et je lui avais envoyé mon poing dans la gueule, sans une parole. Lorsque j'avais de nouveau pivoté sur mon siège, au comptoir, les autres filles étaient venus la ramasser et lui expliquer comment ça fonctionnait dans notre monde. Bizarrement, elle m'avait très rapidement pardonner. À sa place, j'aurais répliqué mais pas elle. Elle avait juste compris qu'il ne fallait pas me faire chier, tout en continuant à me coller au cul quand même. Ce faisant, j'avais, à contrecœur, découvert une fille gentille, joyeuse et innocente. Elle n'avait vraiment rien à faire dans notre monde. Pauvre petite.

- Aaron, viens !

Sa voix me sortit de mes pensées. Je ne bougeais pas. Pas envie. Je sortais mon téléphone portable de ma poche et allais dans ma liste de contact. J'avais besoin de relâcher la pression et je connaissais qu'une manière pour que cela soit le cas. Je m'éloignais de la table et appelais alors Perse, un homme de mon père. Le bruit, derrière lui, était assourdissant lorsqu'il décrocha.

- Ouais.

Sa diction lente m'apprit qu'il était bourré.

- Tu te ramènes dans ma chambre, ce soir, ordonnais-je.

- Quand tu veux, poupée, mais c'est qui ?

- Putain, Perse, fait pas chier.

- Ah ouais. Ginny. Je n'ai pas regardé qui appelait.

- M'en fous.

- Ce soir ?

- Ouais.

- Ton père est au club en ce moment...

- J'en ai rien à foutre, putain. Tu viendras ce soir, point.

- S'il me voit entrer dans ta chambre, il va me tuer.

- Pas mon problème.

- Très bien mais après minuit. Ils seront tous trop défoncé pour remarquer quoi que ce soit.

- Est-ce que je t'ai appelé pour discuter ? Non, je crois pas. Je t'informe juste que toi et moi, nous allons baiser ce soir.

- Et j'en suis heureux, crois-moi mais je tiens à ma vie.

- Et moi, à mon orgasme.

Son rire parvient à mon oreille me faisant grincer des dents. Je raccrochais et reportai mon attention sur les deux personnes de trop dans mon espace vital. Le mec et Farah rigolaient comme des niais. Je gardais la tête basse. Je ne me mélangeais jamais aux personnes extérieures à mon monde. Le club, ceux qui le constituaient et moi étions à part. Nous étions différents des gens lambda. Nous avions nos propres lois, nos propres règles qui ne correspondaient pas avec celui du monde de Farah et ce type. C'était sans compter sur la fille.

- Aaron, je te présente Ginny. Ginny, je te présente Aaron. Il est étudiant à l'université comme moi. Il fait partie de l'équipe de football américain.

Elle me racontait tout ça comme si c'était l'information la plus importante du monde. J'en avais strictement rien à foutre de la vie de ce mec. Elle le savait, tout comme elle savait que je serais mariée à ce connard de Joe, un jour. Cherchait-elle à foutre la merde dans le club ?

Je les ignorais et attrapais ma bière sans même rendre les salutations que le type m'envoyait.

- Excuse-la. Elle n'est pas très causante.

Je serrais les mâchoires pour m'éviter de lui sauter dessus pour lui montrer ma façon de causer.

- Ce n'est pas grave.

- Tu veux t'asseoir avec nous ?

- J'ai un cours dans trente minutes...

- On n'est pas très loin du campus. Tu as le temps d'arrivée à l'heure. Prends un café avec nous.

Putain, je vais la tuer !

Le mec semblait hésiter et j'espérais qu'il dégage pour remettre Farah à sa place mais il tira la chaise, à côté de moi, et s'installa. Je sentais le regard de cet abruti figer sur moi. Le premier réflexe qui me vint, était qu'il ne pourrait plus rien regarder avec les yeux crevés mais je me retins. Je n'étais pas au QG. Je ne pouvais pas agir naturellement dans leur monde et je détestais cela. Ça me rappelait pourquoi je ne me mélangeais que très rarement à la populace.

- D'accord mais pas longtemps.

Que tous les démons de l'enfer me viennent en aide ! Je ne suis pas adapté socialement pour côtoyer une âme sensible et innocente, néanmoins je peux le tolérer mais deux... !

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant