Chapitre 30 : Ginny

642 58 0
                                    

Mon regard se perdait sur la rue qui défilait à toute vitesse, je me perdais dans mes pensées. Je me savais prête pour le lendemain. Jared et moi sortions tout juste de la salle de sports où j'avais pu m'exercer au combat. Je savais me battre. Le corps-à-corps ne me faisait pas peur mais plus le temps passé, plus le doute s'installait. Mon père pourrait faire valoir son âge et faillir à sa parole en venant avec ses hommes. S'il y avait bien une chose dont je n'avais jamais douter jusqu'à maintenant, c'était bien de sa parole. Aujourd'hui tout était différent. Jeaper avait la dent dure sur les traîtres et nul doute, qu'il me considérait comme telle. Je devais envisager cette hypothèse.

Je n'allais pas me battre contre lui mais cela serait peut-être nécessaire s'il faisait la sourde oreille à propos d'Aaron. Il pouvait faire ce qu'il voulait de moi, tant qu'il le laissait tranquille. J'étais prête à tout pour ça.

L'étudiant devait poursuivre son chemin sans que les Skull's viennent y interférer.

Je devais le retrouver à une heure du matin au cimetière. Une heure propice à l'horreur qui allait s'y jouait. Depuis trois jours, maintenant, j'attendais que la peur s'imprègne de moi, que mon instinct de survie se réveille mais rien. Cet homme l'avait bousillé à son profit car seule sa survie semblait m'intéresser. D'heure en heure, de minute en minute, de seconde en seconde, ma détermination à le protéger des miens se solidifiait dans mon esprit. Chaque vision de son visage apeuré, tuméfié ou souriant, me rapprochait de la folie. Une folie qui créait en moi un désintérêt de ma potentielle mort. Je n'étais pourtant pas suicidaire. Ma vie était, certes, pourri mais je savais m'en contenter. Ne pas savoir ce qui allait m'arriver, d'ici près de dix d'heures, ne m'inquiétait, pourtant, pas, contrairement aux négociations. Jeaper avait consenti à le laisser tranquille pour le moment mais serait-ce toujours le cas lorsqu'il en aurait fini avec moi ? Si ce n'était pas le cas, qui le protégerait ? Il fallait que je m'organise dans ce but. Il me restait assez de temps pour cela. Nous avions des dossiers potentiellement dangereux pour l'organisation et franchement, cela m'emmerderait de devoir m'en servir mais j'avais besoin qu'Aaron soit en sécurité, que je sois présente ou non.

Jared était une présence silencieusement réconfortante depuis que j'étais arrivé chez lui. Lorsque nous étions jeunes, il avait l'habitude de m'apporter les soins et la tendresse qui me manquait cruellement après m'être fait battre par mon père. Je ne pouvais l'accepter, cependant, aujourd'hui. J'avais besoin de nourrir ma fureur, pas de pleurer sur mon sort. Je ne devais pas flancher car celui qui m'avait donné la vie, allait certainement me la reprendre. Pas question de lui donner la satisfaction de m'atteindre plus que nécessaire.

Il se gara devant sa maison alors que j'envoyais un message à Older. Il ne bougeait pas de son siège, derrière le volant, je relevais alors les yeux sur lui. Il me fixait. Ce n'était pas la première fois qu'il faisait ça, ses soixante-douze dernières heures. Lorsque j'en eus marre, je lui avais demandé pourquoi il faisait ça. Il m'avait répondu qu'il voulait imprimer mon visage dans son esprit.

« Je ne sais ce qui va t'arriver, dans deux jours, ma beauté, mais je ne pense pas que tu en ressortiras entière, voire pas du tout... Et je ne peux rien n'y faire. Ça me tue mais c'est comme ça. Je veux juste profiter de ton beau visage de poupée autant que je le peux.»

Jared avait toujours été un beau parleur mais la douleur qu'il avait mise dans son explication m'interpella. Notre relation ne s'était jamais réellement terminé. Nous n'avions jamais pu avoir la fin de tout ce qui faisait de nous, un couple. Pour ma part, j'étais passé à autre chose avec le temps. J'avais bien d'autres choses à gérer que mon cœur en miettes. Cela n'avait pas été son cas de toute évidence. Je comptais visiblement toujours autant pour lui. Mon éducation me forçait à penser que c'était son problème. La femme rejetée en moi voudrait le rassurer pour qu'il ne ressente pas la même chose. J'étais, néanmoins, obligée d'agir de la sorte en le repoussant. Tout mon être ne semblait réclamer qu'une seule personne.

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant