Chapitre 5 : Aaron

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Les yeux rivés sur les résultats de mon dernier examen, je me sentais satisfait. J'avais vraiment bossé pour en arriver là. Je zieutais Cam, Liam et Scott. De toute évidence, ils n'étaient pas aussi sereins que moi.

- Putain, il va falloir que j'aille supplier le prof pour qu'il me laisse une chance de me rattraper, se plaignait Scott.

- C'est peine perdu. Zeller est réputé pour sa désagréable détermination à nous saper le moral avec délectation.

- Il y en a au moins un qui n'a pas de soucis à se faire.

Trois paires d'yeux me fixèrent. Je haussais les épaules.

- Je bosse pour ses résultats, les mecs. Si vous pensiez plus à vos études, qu'aux filles qui gravitent autour de nous, vous auriez les mêmes notes.

- Je te ferais dire que j'ai arrêté pour ma part, fit valoir Cam.

Il était vrai qu'il avait cessé ses coucheries incessantes depuis qu'il avait rencontré Nicah. Celle-ci ne lui accorderait jamais aucune chance mais il s'accrochait le bougre. Il n'en démordait pas. Il la voulait.

- Peut-être mais qu'est-ce qui occupent tes pensées en ce moment ? Tes notes ou une certaine jeune femme ?

Il marmonna dans sa barbe en s'éloignant, accompagné de Liam. Toujours ensemble ces deux-là. Scott se rapprocha de moi, les yeux fixés sur les deux comparses.

- Très franchement si j'avais ma chance avec cette meuf, moi aussi je n'aurais qu'elle à l'esprit, blaguait-il.

Je levais les yeux au ciel et avançais rapidement pour tenter de le semer. Lorsque Scott était parti dans ses histoires de filles, on pouvait être sûr qu'il n'aurait pas fini avant des heures. Un véritable obséder. Il parvient, néanmoins, à me rattraper.

- Sérieusement, on ne t'a jamais vu avec une fille. Tu les dévores des yeux sans jamais les toucher. Elles te font peur ou quoi.

De notre bande de potes, Scott était celui qui en savait le moins sur ma personne. Trop frivole pour s'intéresser à quelqu'un d'autre que lui-même, il n'avait jamais fait le pas pour apprendre à réellement me connaître.

- Les relations volages ne m'intéressent pas, c'est tout.

Il demeura silencieux, un instant, avant de m'arrêter dans ma course. Les mains sur mes épaules, il semblait presque solennel.

- Aaron, je peux te poser une question personnelle ?

Je soupirais, me doutant de ce qu'il s'apprêtait à me demander.

- Vas-y. si je trouve que c'est trop perso, je ne répondrais pas, le prévins-je.

Il se racla la gorge et carra les épaules. Il donnait l'impression de préparer un grand discours. Je sus à ce moment-là qu'il se foutait de moi. Je serrais les dents. J'étais quelqu'un de gentil mais il ne fallait pas pousser trop loin.

- Tu es puceau ?

J'avais presque envie de me taper le front du plat de la main devant tant de débilité. Je lui lançais un regard mauvais et me détournais de lui pour poursuivre mon chemin. Il me rattrapa à nouveau.

- Excuse-moi. C'était maladroit de le prendre à la rigolade.

Je lui jetais un coup d'œil pour m'assurer de sa sincérité. Face à son air contrit, je compris qu'il s'était rendu compte d'être allé trop loin. Scott était un déconneur maladroit mais pas méchant. Il savait reconnaître ses torts lorsqu'il s'en rendait compte. Je soufflais, tout de même, déçu, encore une fois, de son comportement.

- Je n'ai jamais couché avec une fille, si tu veux tout savoir. J'ai été élever avec certaines valeurs chrétiennes. Je dois me préserver pour ma future femme.

Son expression choquée ne se fit pas attendre. J'en avais l'habitude. Il n'était pas courant pour un jeune homme, à notre époque, de tenir pareil discours mais je ne pouvais fuir mon éducation. De plus, j'avais choisi de continuer à la suivre après avoir quitté le domicile familial. Cela était un choix libre et non une contrainte.

- Tu ne toucheras pas une seule femme jusqu'à ton mariage ?

- Non. Cela va à l'encontre de mes croyances.

- Mais si tu rencontres une femme qui te fait perdre la tête, comme cet abruti de Cam ?

Vivre une véritable obsession pour une femme, telle que ce que vivait Cameron, était rare. Tellement rare que je ne croyais pas que cela puisse m'arriver, un jour, malheureusement. D'après moi, cette obsession était la conséquence de la reconnaissance de son âme-soeur. Cependant, un doux visage aux yeux obscurs me vint, à cet instant, en mémoire. Cette fille. L'amie bizarre de Farah. Cette jeune femme au tempérament de feu, voire violent, avait, plusieurs fois, traverser mon esprit depuis que je l'avais rencontré, trois jours plus tôt. Chaque fois que cela m'arrivait, je me disais que la cause était qu'elle ne pouvait que faire forte impression. Qui pouvait se targuer d'oublier facilement une femme aussi enragée ? Ginny, un nom si doux pour une femme si froide. Je secouais la tête pour ne pas repartir dans les méandres de mes questionnements à son égard.

- Alors, je la courtiserais, et si elle m'apprécie en retour, alors je l'épouserais lorsque nous serions diplômés et aptes à entrer dans notre vie d'adulte.

Il me regarda, effarer.

- Eh ben... je devrais parler avec toi plus souvent. Je ne te connais pas du tout, en fait.

Je lui servis un petit sourire. Si cette conversation avait pu lui faire ouvrir les yeux sur quelqu'un d'autre que sa petite personne, c'était déjà un bon point.

Au loin, je vis ma voiture. Je supposais que j'allais aussi ramener Scott à la maison puisqu'il me collait au basque. Une voix me stoppa, soudainement, dans mon élan. Celle de Farah.

- Oh merci d'être venue me récupéré, Ginny.

Farah s'approcha d'une grosse moto. On ne pouvait pas louper que c'était une femme qui menait cet engin par le guidon. Ginny. La fameuse. Mon regard se fixa sur sa silhouette ganter dans cet ensemble de cuir, pourtant plusieurs sortes de badges, jusqu'à ses yeux qui me fixait en retour. De mon regard époustoufler à son regard assassin, nous nous scrutâmes un moment avant qu'elle ne me prête plus attention, comme si je n'avais jamais existé pour elle.

- Monte, Farah. Je n'ai pas toute la vie, râla-t-elle.

Lorsque cette dernière fut installer, Ginny démarra en trombe et disparut en quelques secondes, tel un fantôme dans une fumée blanche qu'avait laissé sa machine derrière eux. Oui, cette fille avait quelque chose de spéciale. Elle savait captiver l'attention. Il émanait d'elle une aura diabolique. Pourtant, celle-ci m'attirait clairement. Cela était la première fois. Deux rencontres qui me marquaient au fer rouge. Pourquoi elle ? je ne pouvais être attiré par elle. J'avais dans l'espoir que celle qui me procurerait ce genre de sensation serait une jeune fille avec les mêmes convictions que moi et voilà que je me retrouvais piégé par de magnifiques yeux noirs et aussi sombres que l'enfer. Était-ce seulement une passade ? Je l'espérais...

- Sexy, siffla Scott, à mes côtés.

Dans un soupir de désespoir, je poursuivis mon chemin jusqu'à ma voiture avec l'espoir que le temps jouerait en ma faveur.

River of complicationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant